Monde
L’opposant russe Navalny condamné en appel et menacé de camp de travail
Le principal adversaire du Kremlin, Alexeï Navalny, visé par de multiples procédures judiciaires, a vu samedi sa peine d’emprisonnement confirmée en appel mais légèrement réduite à deux ans et demi, et risque désormais d’être transféré dans un camp de travail.
Il s’agit de la première longue peine de M. Navalny confirmée en appel en près d’une décennie de démêlés avec les autorités.
Revenu en Russie en janvier d’une convalescence en Allemagne après un empoisonnement dont il tient le président Vladimir Poutine pour responsable, Alexeï Navalny a été arrêté dès son arrivée. Il a ensuite écopé, le 2 février, de deux ans et huit mois d’emprisonnement.
Samedi, un juge moscovite a légèrement réduit cette sentence d’un mois et demi, en prenant en compte une période passée par l’opposant en assignation à résidence, selon une journaliste de l’AFP présente à l’audience.
Au final, le militant anti-corruption de 44 ans devra purger une peine d’environ deux ans et demi de prison. Dans cette affaire, la justice a converti une peine de prison avec sursis pour fraude datant de 2014 en sentence ferme, pour violation de contrôle judiciaire.
Bible et Harry Potter
Présent à l’audience, le visage souriant, l’opposant a rejeté l’accusation en disant n’avoir jamais voulu se dérober aux autorités russes en allant en Allemagne, et les avoir averties de son retour.
« J’ai acheté un billet et j’ai dit à tout le monde que je rentrais à la maison (…) C’est juste absurde », a-t-il affirmé à la juge.
La procureure, Elizaveta Frolova, a rétorqué en affirmant que l’opposant avait « ouvertement et effrontément » défié la loi.
« Notre pays est bâti sur l’injustice », a lancé M. Navalny avant l’énoncé du verdict. Se disant croyant, il a également cité la Bible : « Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils seront rassasiés. »
Il a en outre mentionné un passage d’Harry Potter sur « l’importance » de ne pas se « sentir seul » car c’est ce que voudrait Voldemort, l’ennemi du célèbre jeune sorcier.
Une porte-parole du palais de justice de Moscou a indiqué vendredi à l’AFP que les services pénitentiaires seraient libres, en cas de confirmation de son emprisonnement, de transférer l’opposant vers un camp de travail.
Héritage de l’Union soviétique, la plupart des peines d’emprisonnement en Russie sont effectuées dans des camps pénitentiaires situés parfois loin de tout. Le travail des détenus, habituellement dans des ateliers de couture ou de fabrication de meubles, y est obligatoire.
Dénonçant une décision « attendue », l’un des avocats de M. Navalny, Vadim Kobzev, a indiqué que son client allait faire appel en cassation.
Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a soutenu pour sa part que cette sentence n’allait pas changer le paysage politique « riche et pluraliste » de la Russie en amont des élections législatives de septembre.
Deuxième procès en cours
Alexeï Navalny comparaissait aussi samedi après-midi devant une autre juge dans un procès pour « diffamation » d’un ancien combattant de la Seconde guerre mondiale.
Le Parquet a requis dans ce dossier 950.000 roubles d’amende (10.600 euros environ) et réclamé lui aussi que le sursis de l’opposant soit converti en prison ferme.
« Vous humiliez et insultez les vétérans en utilisant celui-ci comme une marionnette », a dénoncé M. Navalny.
Ces deux audiences interviennent alors que la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a demandé cette semaine la libération du militant, arguant d’un risque pour sa vie. Cette décision a été immédiatement rejetée par Moscou.
Alexeï Navalny, dont l’incarcération en janvier avait conduit à trois journées de manifestations réprimées, dénonce des procédures montées de toutes pièces et a passé les audiences précédentes à défier la cour.
Selon lui, le Kremlin veut le jeter en prison pour le faire taire, après avoir échoué à le tuer en l’empoisonnant l’été dernier, ce que Moscou dément.
D’autres affaires sont en cours contre M. Navalny. Une enquête pour escroquerie, passible de 10 ans de prison, le vise notamment.
L’Union européenne et les Etats-Unis ont multiplié les appels à le libérer, tandis que ses collaborateurs ont exhorté les Occidentaux à sanctionner des responsables russes et proches de Vladimir Poutine.
Moscou y voit une « ingérence » et a menacé les Européens de représailles.
Culture
Insolite : Des retraitées s’invitent sur le podium de la Fashion week de Vienne
À la Fashion week de Vienne, des mannequins de 60 à plus de 80 ans ont défilé, brisant les stéréotypes liés à l’âge. Une initiative inédite en Autriche, portée par la créativité et la volonté d’inclusion.
Brigitte Hrdlicka, 63 ans, résume parfaitement l’esprit de cette révolution discrète dans le monde de la mode : « C’est fini, les mamies assises à ne rien faire ». Alors qu’elle met la dernière main à sa création avant le défilé, elle incarne, avec neuf autres retraitées, un changement de regard sur l’âge et la vieillesse. Ces femmes, âgées de 60 à plus de 80 ans, ont défilé sur le podium de la Fashion week de Vienne, dans une célébration de la diversité et de l’inclusion.
Ce projet inédit en Autriche est le fruit de plusieurs mois de travail, où les participantes ont conçu et réalisé leurs tenues à partir de matériaux de récupération. Loin d’être des novices, elles ont été guidées par Irina Reichel, animatrice d’ateliers de couture pour retraités. En voyant ces mannequins d’un jour défiler avec assurance et élégance, le message est clair : l’âge n’est plus une limite, et la mode devient un outil pour déconstruire les préjugés.
Le spectacle, loin d’être une simple performance, revendique une prise de position contre l’âgisme et met en avant une joie de vivre palpable. Sur le podium, chaque femme rayonne, reflétant une pluralité de styles : du léopard audacieux aux robes de mariée colorées, il y en a pour tous les goûts. Ce défilé ne fait pas seulement écho à une tendance globale d’ouverture à la diversité dans la mode, mais il s’impose comme un événement symbolique. Si les icônes comme Naomi Campbell ou Claudia Schiffer ont déjà démontré qu’il est possible de célébrer la beauté à tous les âges, ces femmes viennoises montrent que l’élégance et la modernité n’ont pas d’âge non plus.
Les jeunes spectatrices, admiratives, s’imaginent déjà suivre leur exemple à un âge avancé, tandis que les retraitées comme Verena Heger, 60 ans, applaudissent l’initiative. « Ce n’est pas parce qu’on a plus de 60 ans qu’on fait des choses ringardes ! », s’exclame-t-elle, résumant la fierté et la modernité de cette nouvelle génération de femmes âgées qui refusent d’être invisibles.
Avec son ambiance festive, son tapis rouge et ses créations uniques, ce défilé aura marqué les esprits, prouvant que la mode est un terrain où chacun peut trouver sa place, peu importe son âge.
Europe
Victoire historique de la justice européenne contre Apple et Google
La Cour de justice de l’Union européenne a tranché en faveur de la Commission européenne dans deux affaires majeures impliquant Apple et Google, infligeant des sanctions financières record et marquant un tournant dans la lutte contre les abus des géants de la tech.
Mardi, la justice européenne a confirmé deux décisions aux lourds enjeux financiers, donnant raison à la Commission européenne face à Apple et Google. La commissaire à la Concurrence, Margrethe Vestager, s’est félicitée de cette issue, la qualifiant de « grande victoire pour les citoyens européens », soulignant son importance pour l’équité des règles économiques et la justice fiscale.
La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), dernière instance dans ces affaires, a ordonné à Apple de rembourser 13 milliards d’euros à l’Irlande, correspondant à des avantages fiscaux illégaux, assimilés à une aide d’État. En parallèle, Google a vu confirmée une amende de 2,4 milliards d’euros pour abus de position dominante, infligée pour avoir favorisé son service de comparaison de prix au détriment de ses concurrents.
L’affaire Apple remonte à 2016, lorsque la Commission européenne avait demandé à l’entreprise de rembourser les impôts non perçus par l’Irlande entre 2003 et 2014. Durant cette période, Apple a rapatrié la majorité de ses bénéfices européens en Irlande, bénéficiant d’un taux d’imposition presque nul, allant de 1 % à 0,005 %. En 2020, le Tribunal de l’UE avait annulé cette décision, infligeant un sérieux revers à Margrethe Vestager. Cependant, en novembre 2023, l’avocat général de la CJUE avait recommandé d’annuler ce jugement initial et de renvoyer l’affaire au tribunal. La Cour a finalement confirmé que l’Irlande avait accordé une aide illégale à Apple, scellant ainsi l’obligation de remboursement. Apple a réitéré son désaccord, affirmant que l’entreprise n’avait bénéficié d’aucun traitement fiscal particulier.
Dans l’autre dossier, la CJUE a confirmé la sanction de 2,4 milliards d’euros imposée à Google pour avoir abusé de sa position dominante en favorisant son comparateur Google Shopping dans les résultats de recherche, rendant ses concurrents quasiment invisibles pour les utilisateurs. Cette amende, imposée en 2017, est l’une des nombreuses sanctions financières infligées à Google pour des pratiques anticoncurrentielles, le total des amendes infligées au groupe dépassant les 8 milliards d’euros. Google a exprimé sa déception face à ce verdict, rappelant avoir déjà ajusté ses pratiques en 2017 pour répondre aux exigences européennes.
Ces décisions marquent un tournant dans la régulation des géants de la technologie, tant en Europe qu’aux États-Unis, où Google fait également face à plusieurs enquêtes et procès. Elles réaffirment la volonté de la Commission européenne de réguler les pratiques des entreprises multinationales pour garantir une concurrence équitable et une fiscalité juste au sein de l’Union.
Europe
Rome envisage de faire payer l’accès à la fontaine de Trevi
Face à l’afflux massif de visiteurs à la fontaine de Trevi, la municipalité de Rome étudie l’idée d’instaurer un accès payant pour les touristes. Cette mesure vise à protéger ce site emblématique tout en préservant l’expérience locale et culturelle des Romains.
La fontaine de Trevi, chef-d’œuvre baroque et symbole incontournable de la Ville éternelle, attire chaque année des millions de touristes. Afin de répondre au défi croissant du surtourisme, les autorités romaines envisagent de mettre en place un système de gestion plus strict de l’accès à ce lieu mythique. Alessandro Onorato, adjoint au tourisme à la mairie, a ainsi suggéré l’instauration d’horaires d’accès précis et de quotas de visiteurs pour mieux encadrer la foule et limiter les débordements.
Cette initiative, encore à l’étude, proposerait aux visiteurs de réserver des créneaux horaires, un dispositif permettant de contrôler non seulement le flux des touristes, mais aussi leurs comportements souvent inappropriés. L’un des objectifs principaux est d’éviter des scènes de désordre, telles que la consommation de nourriture sur les marches entourant la fontaine. Onorato a précisé que ce système de réservation ne serait pas une source de revenus pour la ville : les Romains auraient un accès gratuit, tandis que les touristes étrangers se verraient demander un modeste droit d’entrée d’un euro.
Toutefois, il n’y a encore aucune décision ferme. Un porte-parole de la municipalité a tempéré l’enthousiasme autour de ce projet en rappelant qu’il ne s’agit pour l’instant que d’une ébauche d’idée. Pourtant, le problème du tourisme de masse devient de plus en plus pressant, avec un nombre croissant de visiteurs dans la capitale italienne. Ce phénomène devrait s’intensifier à l’approche du Jubilé de 2025, une année sainte qui pourrait attirer près de 30 millions de personnes à Rome et au Vatican.
Rome n’est pas la seule ville italienne confrontée à ce défi. Venise, autre site emblématique, a déjà testé un système de billets payants pour les visiteurs à la journée lors des périodes d’affluence, une mesure destinée à canaliser les flux touristiques. Parallèlement, le gouvernement de Giorgia Meloni réfléchit à une hausse significative de la taxe de séjour, une proposition qui suscite la colère des professionnels du secteur touristique, craignant une baisse de la fréquentation.
Outre la gestion des flux, les autorités romaines veulent également préserver le centre historique de la capitale en limitant l’ouverture de nouvelles structures d’hébergement touristique. Toutefois, ce pouvoir échappe pour l’instant à la municipalité. Si elle peut encadrer l’implantation de nouveaux restaurants et fast-foods dans cette zone, elle n’a pas la compétence pour réguler le développement des chambres d’hôtes ou des logements de vacances.
La volonté de Rome d’encadrer l’accès à ses trésors culturels illustre bien le dilemme auquel sont confrontées les grandes métropoles européennes : préserver leur patrimoine tout en accueillant un tourisme toujours plus florissant.
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