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Lèpre en Éthiopie : une maladie guérissable, une exclusion tenace

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Malgré les avancées médicales, les patients continuent de subir rejet et précarité dans un pays où les préjugés ont la peau dure.

En Éthiopie, la lèpre reste synonyme d’exclusion sociale, même si elle est aujourd’hui parfaitement traitable. Tilahun Wale, agriculteur de 46 ans originaire de l’Oromia, en a fait l’amère expérience : sa famille l’a renié après l’apparition des symptômes. « Ils ont bloqué mon numéro et refusé tout contact », confie-t-il, montrant son pied amputé, séquelle d’une infection diagnostiquée il y a dix ans.

Bien que le pays ait officiellement éradiqué la lèpre en tant que problème de santé publique en 1999, près de 2 500 nouveaux cas sont encore enregistrés chaque année. Transmissible mais curable, cette maladie provoque des lésions cutanées et nerveuses, souvent irréversibles si elle n’est pas prise en charge à temps. Pourtant, les idées reçues persistent, alimentées par des croyances religieuses qui y voient une punition divine.

À l’hôpital Alert, établissement spécialisé d’Addis-Abeba, des patients comme Haile Kairos tentent de reconstruire leur vie. Atteint depuis l’enfance, il dissimule ses blessures sous une couverture et déplore les regards fuyants de son entourage. « Les gens manquent d’information. Ils ont peur ou montrent leur dégoût », regrette-t-il. Fondé en 1934 en périphérie de la capitale pour isoler les malades, l’hôpital est désormais intégré à la ville, mais les mentalités évoluent lentement.

Des ONG comme Mission lèpre internationale œuvrent à briser ces tabous via des campagnes de sensibilisation et des programmes de réinsertion. Des ateliers de tissage ou de couture permettent aux patients, majoritairement des femmes, de gagner un revenu modeste tout en retrouvant une dignité. « Travailler ici préserve notre santé mentale », explique Atale Mekuriyaw, 70 ans, qui tisse du coton pour survivre.

Cependant, l’avenir de ces initiatives est menacé par les réductions budgétaires internationales, notamment après le retrait des États-Unis de l’OMS. « Nos médicaments préventifs dépendent de l’organisation », alerte le directeur de l’hôpital Alert, qui mise sur un plan local pour pallier ces coupes. Un défi de plus pour des patients déjà fragilisés par l’indifférence ou le rejet.

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