Plusieurs dizaines d’étudiants en Institut d’études politiques (IEP) se sont réunis vendredi à Strasbourg et Grenoble pour dénoncer la « culture du viol » présente, selon eux, dans leurs établissements, à l’issue d’une semaine marquée par la dénonciation des violences sexuelles dans les IEP.
« Nos IEP restent marqués par la culture du viol », a déclaré Loriane Guidal, étudiante et co-présidente du collectif féministe Arc-en-Ci.elles, devant ses camarades, des membres du corps enseignant et du personnel de direction de l’établissement de Strasbourg. « Il nous semble que la culture +Grande école+ favorise ces violences et l’omerta qui les entoure ».
Elle a notamment réclamé des « poursuites disciplinaires » systématiques contre les auteurs de violences sexuelles, la mise en place de formations à « l’écoute des violences » pour le personnel et un renforcement du « dialogue » des représentants étudiants avec la direction.
Dans l’assemblée, plusieurs étudiants brandissaient des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Des violeurs impunis dans nos amphis », « Confronte tes potes violeurs » ou encore « (Victimes,) On vous croit ».
Le directeur de l’Institut, Jean-Philippe Heurtin, a également pris la parole pour saluer cette mobilisation qui, malgré certaines « outrances », cherche « à éveiller les consciences » face à un « problème général ».
« La prévalence des violences sexistes dans l’ensemble de l’enseignement supérieur est 10% supérieure à d’autres secteurs de la société », a-t-il pointé.
Il a exprimé sa volonté de « tirer les leçons » de la mobilisation étudiante, en reconnaissant « les limites » des dispositifs d’écoute des victimes. Il a surtout insisté sur la « nécessité absolue que des plaintes soient déposées ». « Sans cela, nous demeurerons impuissants ».
Il a annoncé la décision, prise collectivement par les directeurs d’IEP, de « mettre un terme au Crit », compétition sportive inter-écoles dénoncée dans plusieurs messages postés sur les réseaux sociaux comme étant le cadre de violences sexuelles.
Après la multiplication des messages reprenant le hashtag #sciencesporcs de la part d’étudiantes se disant victimes ou témoins de violences sexuelles, une plainte avait été déposée le 6 février à Toulouse par une étudiante de Sciences Po et a entraîné l’ouverture d’une enquête préliminaire pour viol.
Deux enquêtes pour agressions sexuelles ont également été ouvertes à Grenoble suite à des signalements de l’IEP, tandis que la direction de l’IEP de Strasbourg a également adressé « un signalement au procureur pour des faits qui pourraient s’apparenter à un crime ».
Contacté par l’AFP, le parquet de Strasbourg a indiqué jeudi soir n’avoir pas encore réceptionné ce signalement.
A Grenoble, une cinquantaine d’étudiants se sont rassemblés devant l’entrée de l’IEP pendant qu’une délégation d’associations tenait une réunion avec la direction de l’établissement. « Culture du viol : Sciences Po coupable », pouvait-on lire sur une banderole.
Etudiante en première année, Maëlle a appelé la direction à « écouter les victimes, les croire et les accompagner au lieu de juste minimiser ce qu’il se passe et de garder le silence ».
Elle a salué un « premier pas » suite aux récentes ouvertures d’enquêtes, mais, méfiante envers l’institution judiciaire, elle a demandé à ce que « l’administration de Sciences Po accompagne les victimes et les aide à obtenir justice quand elles le souhaitent ».