Dans les rues bondées de la capitale indonésienne, des modèles iconiques convertis à l’électrique séduisent les amateurs de deux-roues, sans pour autant convaincre les puristes.
Au cœur du chaos urbain de Jakarta, où les scooters thermiques dominent le paysage, une nouvelle tendance émerge : les Vespa électriques. Ces engins silencieux, transformés à partir de modèles vintage, attirent une clientèle soucieuse de concilier nostalgie et écologie. Hendra Iswahyudi, fonctionnaire de 56 ans, en est l’un des adeptes. Son scooter des années 1960, autrefois capricieux, a été métamorphosé en un véhicule propre et performant. « C’est une façon de préserver l’histoire tout en réduisant la pollution », confie-t-il.
Heret Frasthio, fondateur de l’atelier Elders, est l’un des artisans de cette transition. Spécialisé dans la conversion électrique, son entreprise propose des kits allant de 1 300 à 3 500 euros, permettant de moderniser ces icônes sans sacrifier leur esthétique rétro. « Une Vespa, ce n’est pas qu’un moyen de transport, c’est un style de vie », souligne-t-il, pilotant fièrement un modèle de 1957. Depuis 2021, son atelier a converti près de 1 000 scooters à travers le pays, surfant sur un marché prometteur : l’Indonésie compte encore près d’un million de Vespa en circulation.
Pourtant, l’adoption de l’électrique ne fait pas l’unanimité. Pour des passionnés comme Muhammad Husni Budiman, le rugissement du moteur thermique reste indissociable de l’identité de la marque. « Le son, c’est l’âme de la Vespa », argue ce collectionneur, qui dirige un club dédié aux modèles des années 1960. Si les conversions séduisent les néophytes, les puristes continuent de défendre l’authenticité mécanique, organisant même des rassemblements pour exhiber leurs bolides d’époque.
Face à une pollution atmosphérique alarmante, les autorités indonésiennes encouragent pourtant cette transition. Le gouvernement vise 13 millions de deux-roues électriques d’ici 2030, contre 160 000 aujourd’hui. Un défi de taille, dans un pays où la culture automobile reste profondément ancrée. Pour Heret Frasthio, l’enjeu n’est pas de culpabiliser les conducteurs, mais d’offrir une alternative pratique. « L’électrique simplifie la conduite, surtout pour ceux qui ne maîtrisent pas les vitesses », explique-t-il. Entre tradition et innovation, la Vespa électrique trace sa route, sans faire taire les débats.