Une séance parlementaire mouvementée a vu s’affronter partisans et opposants de mesures controversées sur les messageries cryptées et la surveillance algorithmique, dans un contexte de lutte renforcée contre le narcotrafic.
La nuit du 20 au 21 mars 2025 restera marquée par des débats intenses à l’Assemblée nationale, où les députés ont été confrontés à des questions sensibles liées à la lutte contre le trafic de stupéfiants. Au cœur des discussions, deux sujets ont polarisé les échanges : l’accès aux messageries cryptées et l’utilisation du renseignement algorithmique. Ces propositions, portées par le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, ont suscité de vives réactions, tant sur le fond que sur la forme.
Le premier point de tension concernait une mesure visant à obliger les plateformes de messageries chiffrées, comme Signal ou WhatsApp, à transmettre les échanges des trafiquants aux services de renseignement. Cette idée, déjà rejetée en commission des Lois la semaine précédente, a été de nouveau débattue dans l’hémicycle. Les opposants, y compris des députés de la majorité, ont souligné les risques de créer une faille de sécurité mettant en péril la confidentialité des communications de millions d’utilisateurs. Malgré une tentative de réécriture de l’article par trois députés centristes, la proposition n’a pas convaincu. Le vote, entaché par une panne technique du système de scrutin, a finalement abouti à un rejet net, avec 119 voix contre et seulement 24 pour.
La séance a été marquée par un incident inédit. Une panne du système de vote électronique a contraint les députés à recourir à une méthode plus archaïque : l’appel nominal de chaque élu, une procédure qui a duré près d’une demi-heure. Si certains ont évoqué l’hypothèse d’un piratage, la vice-présidente de l’Assemblée, Naïma Moutchou, a rassuré en expliquant qu’il s’agissait simplement d’un problème technique lié à une surchauffe.
Parallèlement, les députés ont adopté une autre mesure controversée : l’expérimentation du renseignement algorithmique pour détecter les menaces liées à la criminalité organisée. Cette décision a provoqué une levée de boucliers de la part des élus de gauche, qui y voient une étape supplémentaire vers une surveillance de masse. La députée Elisa Martin a dénoncé une atteinte aux libertés fondamentales, tandis que Bruno Retailleau a défendu un dispositif « encadré et ciblé ».
En marge de ces débats houleux, un consensus s’est dégagé autour de la réforme du régime des « repentis ». Inspiré du modèle italien, ce dispositif vise à encourager les membres des réseaux criminels à collaborer avec la justice en échange de réductions de peine pouvant aller jusqu’aux deux tiers. Cette mesure, soutenue à l’unanimité, a même permis une rare entente entre le ministre de la Justice Gérald Darmanin et les députés de La France Insoumise.
Les discussions sur ce texte complexe se poursuivront dans les prochains jours, avec l’objectif de renforcer les outils de lutte contre le narcotrafic tout en préservant les droits et libertés individuelles. Une équation délicate, qui continue de diviser les élus et les experts.