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L’Europe face au dilemme de la surveillance numérique

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Un projet de régulation visant à protéger les mineurs contre les abus sexuels en ligne provoque de vives tensions entre impératifs sécuritaires et préservation des libertés fondamentales.

Les Vingt-Sept abordent ce mercredi un dossier particulièrement sensible qui oppose depuis plusieurs années partisans de la protection de l’enfance et défenseurs des droits numériques. La proposition législative examinée à Bruxelles entend imposer aux plateformes numériques et services de messagerie l’obligation de détecter et signaler les contenus pédopornographiques circulant sur leurs réseaux. Présentée initialement en 2022 par la Commission européenne, cette initiative cherche à endiguer la propagation d’images d’exploitation sexuelle des mineurs et les sollicitations illicites dont ils peuvent faire l’objet.

Le texte rencontre une opposition résolue de la part des services de messagerie chiffrée, de certaines autorités de protection des données et de plusieurs États membres. Ces derniers dénoncent un dispositif qui autoriserait le balayage systématique des communications privées, y compris sur les applications cryptées, au motif qu’il porterait atteinte au secret des correspondances. Des voix s’élèvent pour mettre en garde contre les risques de dérives, craignant que ces mécanismes de surveillance ne soient ultérieurement détournés par des régimes autoritaires pour réprimer l’opposition politique.

Une campagne d’ampleur baptisée « Stop Chat Control » mobilise activement les réseaux sociaux pour influencer le processus décisionnel. Des milliers de messages sont adressés quotidiennement aux représentants européens, selon des sources diplomatiques qui reconnaissent l’intensité inédite de cette mobilisation citoyenne. La présidence danoise du Conseil de l’UE, à l’origine de la dernière version du texte, tente de rassurer les sceptiques en soulignant les garanties incorporées au dispositif. Le projet prévoit ainsi que le scanning se limiterait aux images et liens, excluant les messages textuels, et ne pourrait être activé que sur décision d’une autorité judiciaire ou administrative indépendante.

Les partisans de la régulation rappellent l’urgence face à l’ampleur du phénomène. Un rapport récent indique que près des deux tiers des contenus illicites identifiés sont hébergés sur des serveurs situés dans l’Union européenne. La détection reposant actuellement sur le volontariat des plateformes est jugée insuffisante par les institutions européennes. L’enjeu du vote réside désormais dans la position que compte adopter l’Allemagne, dont le soutien s’avère déterminant pour atteindre la majorité qualifiée requise. Le sort du texte pourrait être scellé dès la réunion prévue à Luxembourg mi-octobre, ou au contraire connaître de nouvelles prolongations si les divergences persistent entre capitales.

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