La Haute assemblée a adopté deux textes controversés sur l’immigration, alignés sur les positions du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau. Ces mesures, qui visent à durcir les conditions de rétention et d’accès aux aides sociales, suscitent de vives réactions.
Le Sénat, dominé par la droite, a approuvé mardi deux propositions de loi emblématiques des positions de Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur et figure centrale des Républicains. Ces textes, qui s’inscrivent dans un contexte politique tendu, relancent le débat sur la politique migratoire française. Le premier vise à allonger la durée de rétention administrative pour les étrangers jugés dangereux, tandis que le second conditionne l’accès à certaines prestations sociales à une durée minimale de résidence en France.
Le premier texte, soutenu par le gouvernement, a été adopté par 230 voix contre 109. Il prévoit d’étendre la durée maximale de rétention administrative de 90 à 180 jours, voire 210 jours dans des cas spécifiques. Cette mesure s’appliquerait aux étrangers condamnés pour des crimes ou délits graves, ainsi qu’à ceux considérés comme une menace pour l’ordre public, notamment en cas de radicalisation. Cette disposition, déjà en vigueur pour les affaires de terrorisme, fait écho à plusieurs faits divers récents, comme l’attaque au couteau de Mulhouse ou le meurtre de l’étudiante Philippine, perpétrés par des individus sous obligation de quitter le territoire français.
Le second texte, adopté à 204 voix contre 136, cible l’immigration régulière. Il propose de conditionner l’accès à certaines aides sociales, comme les allocations familiales ou l’aide au logement, à une durée de résidence minimale de deux ans en France. Cette mesure, qui reprend partiellement des éléments censurés par le Conseil constitutionnel en 2024, vise à limiter ce que la droite qualifie d' »appel d’air » migratoire. Toutefois, son application pourrait être limitée par les nombreuses conventions bilatérales de sécurité sociale signées avec des pays tiers, notamment en Afrique.
Ces initiatives ont suscité de vives réactions, notamment à gauche. Les sénateurs socialistes ont dénoncé une « dérive xénophobe », tandis que Patrick Kanner, chef du groupe PS au Sénat, a critiqué une instrumentalisation de la Haute assemblée au profit des ambitions politiques de Bruno Retailleau. Le gouvernement, quant à lui, a adopté une position prudente, émettant un « avis de sagesse » sur le second texte, sans prendre clairement parti.
Dans un contexte marqué par les tensions franco-algériennes et la pression du Rassemblement national, ces textes s’inscrivent dans une stratégie de fermeté sur l’immigration. Le Premier ministre François Bayrou a laissé entendre que ces propositions pourraient être examinées à l’Assemblée nationale, ouvrant la voie à de nouveaux débats sur un sujet toujours aussi clivant.