Des personnels hospitaliers sont descendus dans la rue dans toute la France mardi pour réclamer des hausses de salaires, mais aussi « des moyens » et des « postes » pour l’hôpital public lessivé par les vagues successives de Covid-19 et l’arrêt des fermetures de lits.
A Paris, quelque 3.000 personnes selon la CGT sont parties de l’hôpital Cochin (XIVe arrondissement) pour rejoindre les Invalides derrière une banderole « ensemble pour obtenir de meilleurs salaires et l’amélioration de nos conditions de travail ».
Le Ségur de la santé, qui s’est traduit par des hausses salariales et des investissements, « n’a rien réglé », a estimé le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, évoquant des personnels hospitaliers « harassés ». « C’est beaucoup plus de moyens qu’il faut, des moyens humains et financiers. Et il faut arrêter de fermer des lits », a-t-il souligné. Dans le cortège, les ballons rouges de la CGT étaient nombreux, les drapeaux de SUD plus rares.
Cette manifestation s’inscrivait dans le cadre d’une journée de mobilisation nationale à l’appel des syndicats CGT, SUD et CFE-CGC et de plusieurs collectifs de soignants (Inter-Hôpitaux, Inter-Urgences, Inter-Blocs, Printemps de la psychiatrie…).
A Bordeaux, la manifestation a réuni environ 1.500 participants selon les organisateurs. « On en a plein le CHU », « Ségur pour tous », « les premiers de cordée, c’est nous », pouvait-on lire sur les pancartes des participants, qui ont réalisé devant l’Agence régionale de santé une minute d’applaudissements pour tous les soignants « tombés en burn-out » depuis le début de la pandémie.
« Au-delà de la fatigue »
Pour Hakim Cherifi, médecin urgentiste à l’hôpital bordelais Saint-André, l’hôpital public a souffert de « 20 ans de politique comptable » et a besoin de « plus de moyens » pour « ne pas mourir ». « Avoir des patients aux urgences 24 heures sur un brancard par manque de lits, c’est ce qui me gêne le plus », a-t-il dit.
De nombreux techniciens et ouvriers hospitaliers étaient présents dans le cortège pour dénoncer leurs conditions de travail et leur rémunération. « On a des protocoles de nettoyage de nos machines extrêmement rigoureux et toujours plus de patients pour Covid, cancers, maladies graves, à soigner. On travaille comme à l’usine », a dénoncé Cécile Mata, 39 ans, manipulatrice en radiologie au CHU de Bordeaux, réclamant « les mêmes primes » pour les techniciens que pour les soignants afin de recruter des jeunes.
Partout, les manifestants ont dénoncé la charge de travail de plus en plus lourde, à l’instar de Charlène Germain, manipulatrice au CHU de Brest, rencontrée parmi les quelque 300 manifestants qui ont défilé dans la ville mardi matin: « l’activité a augmenté mais les effectifs n’ont pas augmenté », explique-t-elle. « On a de moins en moins de temps pour s’occuper des patients alors que par ailleurs le nombre d’examens radiologiques a presque triplé avec la crise sanitaire. Ce qu’on ressent va au-delà de la fatigue, c’est de la lassitude ».
A Lille, où quelque 400 personnes ont défilé, une pancarte proclamait « plus t’es utile, moins t’es payé ». Adrien, infirmier de 29 ans en établissement public de santé mentale, déplore un effectif passé de 29 à 22 équivalents temps plein dans son service au cours de ses sept ans de métier: « les effectifs sont à la rue, il n’y a pas assez de monde. J’ai toujours la vocation, mais je suis fatigué ».
Parmi les manifestants, certains dénonçaient aussi le fait d’être exclus des revalorisations du Ségur de la santé, à l’instar d’Antony Valladon, 48 ans, aide-soignant dans une association qui défilait à Paris: « dans notre établissement, 50% des personnels ont été exclus » du Ségur, « les métiers du soin vont avoir les 183 euros mais pas les métiers de l’accompagnement ni les personnels non qualifiés ».