Après une décennie d’enquête, Phuoc-Vinh Tran, 74 ans, devra répondre de ses actes devant la justice pour des accusations glaçantes portées par plus d’une centaine de femmes.
Un procès retentissant se profile dans le Val-d’Oise, où un ancien gynécologue, Phuoc-Vinh Tran, aujourd’hui âgé de 74 ans, sera jugé pour viols et agressions sexuelles sur plus de 100 patientes. Ce mardi 4 mars 2025, une source proche du dossier a confirmé que la cour criminelle départementale examinera cette affaire hors norme, qui a mis plus de dix ans à éclater au grand jour. L’instruction, débutée en 2013 suite à une première plainte, a révélé une série d’actes présumés d’une gravité exceptionnelle, impliquant 133 femmes au total.
Tout commence en juin 2013, lorsqu’une patiente de 52 ans pousse la porte des autorités pour dénoncer une consultation anormale dans le cabinet de ce médecin installé à Domont, à une quarantaine de kilomètres au nord de Paris. Ce qui semblait être un cas isolé a rapidement pris une ampleur inattendue : les enquêteurs, en épluchant la patientèle du praticien, ont recueilli des témoignages concordants et troublants. Au fil des années, 133 plaintes ont été déposées, décrivant des faits similaires – des touchers vaginaux à caractère sexuel, des caresses injustifiées et des questions intrusives sur la vie intime des patientes, souvent tétanisées sur la table d’examen.
Phuoc-Vinh Tran, né au Vietnam et formé en France, a exercé pendant des décennies avant de prendre sa retraite. Face aux accusations, il a maintenu une défense inébranlable, niant tout comportement répréhensible. Il affirme pratiquer une gynécologie « avec douceur », selon une prétendue « méthode asiatique », et soutient que ses gestes ont été mal interprétés par des femmes méconnaissant les procédures médicales. Une explication qui n’a pas convaincu la juge d’instruction, qui, dans son ordonnance de mise en accusation, souligne le « caractère sériel » des actes et leur incompatibilité avec une démarche strictement médicale.
Après des requalifications et la prise en compte des délais de prescription, le gynécologue devra répondre de 92 viols et 25 agressions sexuelles sur 112 patientes. Les récits des victimes, âgée de 18 à 52 ans au moment des faits, dressent le portrait d’un praticien qui aurait abusé de sa position de confiance. Certaines rapportent des caresses sur les cuisses ou le clitoris, d’autres des demandes explicites de contracter leur vagin autour de ses doigts, le tout accompagné de questions sur leurs plaisirs sexuels. La juge a balayé la théorie d’un complot avancée par l’accusé, estimant que la médiatisation n’a fait qu’encourager les victimes à briser le silence, souvent par honte ou peur de ne pas être crues.
Ce procès, qui s’annonce long et médiatisé, met en lumière les failles d’un système où des plaintes antérieures, dès les années 2000, avaient été classées sans suite faute de preuves. Pour les victimes, l’attente a été interminable, accentuée par la crainte que l’âge avancé de Tran – et la fin de son contrôle judiciaire en juin dernier – ne lui permette d’échapper à la justice, potentiellement en fuyant vers le Vietnam. Alors que la cour criminelle s’apprête à trancher, ce dossier soulève des questions brûlantes sur la protection des patientes et la responsabilité des institutions médicales face à de tels scandales.