Une réforme annoncée inquiète les associations, qui craignent une évaluation insuffisante des besoins spécifiques.
À l’aube de la rentrée scolaire 2024, une réforme visant à améliorer l’accueil des élèves handicapés dans les établissements scolaires est sur le point de voir le jour. Annoncée en mai, cette initiative introduit les pôles d’appui à la scolarité (PAS), composés d’un enseignant référent et d’un éducateur spécialisé. Ces pôles sont destinés à évaluer les besoins des élèves en situation de handicap et à leur fournir des aides techniques adaptées. Cependant, cette perspective suscite des inquiétudes parmi les familles et les associations concernées.
Malgré la dissolution récente de l’Assemblée nationale et les incertitudes politiques à l’approche des élections du 7 juillet, le ministère des Personnes handicapées a confirmé la mise en œuvre progressive des PAS dès la rentrée, avec une expérimentation dans quatre départements avant une généralisation prévue par une future loi. L’objectif affiché est clair : passer de la simple intégration à une véritable inclusion, en apportant des solutions concrètes et rapides aux besoins des élèves handicapés.
Actuellement, les parents doivent constituer un dossier médical et le soumettre à la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) pour une reconnaissance administrative du handicap et la détermination des aides nécessaires. Ce processus, souvent qualifié de « parcours du combattant », est coûteux et lent, retardant la prise en charge adéquate des enfants et leur scolarité. Les PAS promettent de simplifier cette démarche en permettant l’attribution directe de matériel adapté (tablette braille, ordinateurs, etc.) et en facilitant les interventions de professionnels de santé au sein des établissements scolaires, avec l’accord des parents.
Nathalie Groh, présidente de la Fédération française des Dys, voit dans cette réforme une avancée significative. « Une maman d’enfant ‘dys’ sur deux réduit son temps de travail pour accompagner son enfant chez divers spécialistes », explique-t-elle, soulignant l’intérêt de la coopération entre enseignants et professionnels de santé. Cependant, elle exprime aussi des réserves : « Ce n’est pas l’enseignant ou l’éducateur qui peut diagnostiquer un trouble. Ce rôle doit revenir à des professionnels de la médecine. »
Cette méfiance est partagée par Audrey Chanonat du Syndicat national des personnels de direction de l’Education nationale (SNPDEN). « La plupart des enseignants ne sont pas suffisamment formés au handicap, certains pas du tout », déclare-t-elle. Cette lacune dans la formation des enseignants est également pointée du doigt par de nombreuses familles, comme celle d’Elodie Villelongue, mère de deux enfants suivis pour des troubles du déficit de l’attention et du spectre autistique, qui regrette le manque de compréhension et de soutien de l’école maternelle.
Pour Danièle Langloys, présidente d’Autisme France, le risque de laisser la main à l’Éducation nationale est réel : « Un très grand nombre d’enfants ne vont pas à l’école, ou de façon très partielle, en raison des réticences des enseignants à les accueillir ». Christine Getin, directrice de l’association Hypersupers TDAH, abonde dans ce sens : « Quand le pouvoir de décision est exercé par l’Éducation nationale, il est fréquent que les parents n’obtiennent pas les aménagements nécessaires. »
Face à ces critiques, certains voient tout de même un potentiel positif dans la réforme. « Les MDPH décidaient des aides à attribuer sans connaître les moyens dont disposait l’Éducation nationale. Les PAS pourraient être positifs s’ils permettent d’adapter les propositions aux moyens existants », argue Mme Chanonat. Les familles pourront toujours saisir directement la MDPH si elles ne sont pas satisfaites du dispositif prescrit par l’Éducation nationale.
Toutefois, pour beaucoup, la clé du succès réside dans l’amélioration du fonctionnement des MDPH et dans une meilleure formation initiale et continue des enseignants sur le handicap. Seule une approche véritablement inclusive, bien coordonnée et informée, permettra d’assurer un accueil digne et efficace pour tous les élèves en situation de handicap.