Agde : le député RN, Aurélien Lopez-Liguori rattrapé par une affaire de comptes de campagne

Le député sétois, pressenti pour se présenter à Agde lors des municipales de 2026, voit ressurgir une affaire autour de son compte de campagne législative. Une enquête de Libération jette le doute sur la régularité de ses finances et expose des pratiques aux airs de contournement de la loi.

L’affaire pourrait bien empoisonner la stratégie d’implantation locale du député de la 7e circonscription de l’Hérault. Aurélien Lopez-Liguori, élu en 2022 sous l’étiquette du Rassemblement national, est pressenti pour briguer la mairie d’Agde lors des prochaines élections municipales. Mais à peine cette perspective évoquée, elle se retrouve lestée d’un passif judiciaire embarrassant. Selon une enquête publiée par le journal Libération, de lourdes irrégularités entoureraient la gestion de son compte de campagne législative. L’ancien mandataire financier désigné, Jean-Louis Cousin, assure n’avoir jamais tenu les rênes de la trésorerie, affirmant que ce rôle aurait été assuré de manière informelle par les propres parents du député, Carole Liguori et André Lopez.

Les déclarations de Jean-Louis Cousin, consignées dans une plainte déposée en novembre 2023 au commissariat d’Agde, pointent des anomalies graves. Il évoque la soustraction de documents officiels, des paiements en liquide de militants sans justificatif, et surtout une mise à l’écart délibérée dès les premières semaines de campagne. Selon ses propos recueillis par Libération, le rôle de mandataire aurait été un leurre. Il dit avoir seulement ouvert le compte bancaire, transmis les identifiants, puis signé le protocole de remboursement sans avoir eu accès à aucune facture. Le tout, à la demande explicite du père du candidat.

Plusieurs militants confirment dans les colonnes de Libération avoir reçu des enveloppes contenant de l’argent liquide des mains du père du député. Des sommes comprises entre 100 et 200 euros, sans trace comptable. Un troisième colleur d’affiches évoque le même procédé. Tous disent avoir agi sans penser enfreindre la loi, convaincus de rendre service. Pourtant, l’absence totale de mention de ces versements dans le compte de campagne interroge. La Commission nationale des comptes de campagne rappelle dans le même article que seul le mandataire financier déclaré peut procéder à des retraits, à condition que l’origine des fonds soit justifiée. Tout versement extérieur ou paiement non tracé pourrait être interprété comme l’existence d’une caisse noire.

À cela s’ajoute le témoignage de Jean-Louis Cousin, qui affirme avoir signé une vingtaine de chèques en blanc, remis à André Lopez. Des documents que le père du député aurait utilisés pour régler certaines prestations, sans contrôle ni suivi. Lors de son audition, l’ancien mandataire reconnaît avoir eu conscience de commettre une faute. Il parle d’une campagne dont les manettes logistiques étaient entièrement entre les mains du couple parental, pendant que lui-même était tenu à l’écart.

Interrogé par Libération, Aurélien Lopez-Liguori se défend. Il reconnaît que sa mère a pu procéder à des virements, arguant de l’indisponibilité du mandataire. Il assure que tout a été transparent, que les factures ont été montrées à Jean-Louis Cousin pour validation. Une version que l’intéressé conteste fermement, déclarant que la mère du député ne s’est jamais rendue à sa boutique, contrairement aux affirmations de ce dernier. D’autres éléments viennent renforcer les soupçons. Le journal Libération dévoile qu’une adresse mail créée par le député utilisait l’identité du mandataire pour gérer les échanges avec les prestataires. Un comportement assimilable, selon Jean-Louis Cousin, à une usurpation d’identité.

Les dépenses de campagne consultées par le journal Libération montrent pourtant des montants conséquents. Des chèques versés à La Poste pour plusieurs dizaines de milliers d’euros, des factures réglées à l’expert-comptable Nicolas Crochet, figure familière du RN, ou encore un repas à plus de mille euros au restaurant La Marina d’Agde en présence de Marine Le Pen et de ses proches collaborateurs. La campagne d’Aurélien Lopez-Liguori fut l’une des plus dispendieuses du parti d’extrême droite en 2022, dépassant même celle de Marine Le Pen. Le député a apporté personnellement plus de 33 000 euros et reçu plusieurs dons à hauteur du plafond légal.

Dans cette séquence d’atterrissage politique à Agde, les révélations tombent comme un pavé dans le canal. Alors qu’Aurélien Lopez-Liguori s’apprêtait à officialiser sa candidature pour les municipales, les premiers tirs sont déjà partis depuis son propre camp. Plusieurs figures locales du RN hostiles à sa venue n’ont pas attendu l’annonce pour dégainer. Le ton est donné. Dans les prochains mois, la confrontation s’annonce électrique entre deux lignes qui s’affrontent désormais à visage découvert.

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