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Économie

Au Venezuela, l’or coule encore dans les veines d’El Dorado

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Dans ce village légendaire, le métal précieux rythme la vie quotidienne, entre espoirs démesurés et réalité brutale.

Au cœur de la jungle vénézuélienne, El Dorado vit toujours au rythme fiévreux de l’or. Les étals des commerces affichent leurs prix en grammes de métal jaune, et les balances numériques remplacent les caisses enregistreuses. Ici, une poignée de poudre dorée vaut plus que des billets. Cette ruée moderne, héritière des mythes coloniaux, se déroule dans une région minée par l’exploitation illégale et la violence des groupes armés.

L’Arc Minier de l’Orénoque, où se niche El Dorado, regorge de richesses souterraines. Mais cette manne s’accompagne d’une loi implacable : celle du plus fort. Syndicats, gangs et milices imposent leur propre fiscalité, un « vaccin » qui garantit une protection illusoire. Les conflits pour le contrôle des sites ont fait des centaines de victimes ces dernières années, une réalité sombre que les habitants évitent d’évoquer.

Pour José, mineur depuis des décennies, l’or reste une loterie. Certains jours, le filon se tarit ; d’autres, la chance sourit avec des découvertes miraculeuses. « Personne n’abandonne, car le gros coup peut arriver demain », confie-t-il. La rivière Cuyuni, frontière naturelle avec le Guyana, charrie autant de rêves que de désillusions.

L’essor chaotique d’El Dorado se lit dans ses rues poussiéreuses, où les motos slaloment entre les échoppes. Hilda, commerçante depuis cinquante ans, se souvient d’un village perdu dans la végétation. Aujourd’hui, près de 5 000 âmes y cherchent fortune, malgré les aléas des « bullitas », ces mini-ruées éphémères. « Sans les mineurs, ce serait un désert », murmure-t-elle en comptant quelques grains d’or pour une bouteille d’eau.

Plus loin, dans les camps de traitement, des familles entières s’épuisent à tamiser des tonnes de sable pour quelques grammes de précieux métal. Le mercure, utilisé pour amalgamer les paillettes, empoisonne lentement les travailleurs. Pourtant, personne ne renonce. « C’est notre seule chance », lâche un ouvrier en serrant dans sa paume une pépite à peine plus grosse qu’un grain de riz.

Entre légende et survie, El Dorado incarne le paradoxe d’un Venezuela où l’or brille autant qu’il aveugle.

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