Monde
Avec la pandémie, le graffiti explose à New York, en toute illégalité
Ils font partie de l’histoire de la ville depuis plus de 50 ans mais avec la pandémie, les graffitis fleurissent comme jamais à New York, signe de décadence pour les uns, ou de vitalité pour les autres.
La nuit tombe sur Soho, quand après un rapide coup d’oeil aux alentours, le graffeur Saynosleep s’attaque à la devanture d’un magasin de luxe, fermé après avoir été pillé début juin en marge des manifestations liées à la mort de George Floyd.
« Si vous n’êtes pas en train de peindre en ce moment, je ne sais pas ce que vous foutez », lance le quadragénaire, qui vit de son art sous un autre pseudonyme. « On n’a jamais vu une époque comme ça. »
Ces centaines de vitrines de commerces fermés définitivement, frappés par les conséquences économiques de la pandémie, « c’est une invitation », résume Marie Flageul, conservatrice du musée du street art à New York (MoSA).
Murs, ponts ou trottoirs sont autant de supports, jusqu’aux emblématiques wagons du métro, dont 34 ont récemment été peints en deux fois depuis début décembre.
« C’est une résurgence, une renaissance du graffiti », s’enthousiasme Saynosleep.
Déjà passé de la rue aux galeries dès les années 1980, le graffiti a conquis le grand public durant les années 2000 par le biais du street art, sorti souvent de l’illégalité pour s’exprimer dans des espaces autorisés.
Mais depuis mars, le graffiti, largement domestiqué jusque récemment, explose de façon désordonnée, en toute illégalité.
« Les gens veulent s’exprimer », explique Saynosleep, qui dit avoir vu des sexagénaires à l’oeuvre. « Ils s’ennuient. Ils ont besoin d’avoir quelque chose à faire. »
L’accélération du mouvement Black Lives Matter a aussi joué, avec son lot de slogans et revendications, déclinés par écrit.
Dans une ville où la plupart des occasions de vie sociale ont disparu, où les rues ne vibrent plus, « c’est une façon de dire: vous ne nous voyez pas, on a l’impression que New York est mort, mais on est là », décrit Marie Flageul.
« Signe de dégradation »
Tous ne goûtent pas cet élan créatif. Le gouverneur de l’Etat de New York, Andrew Cuomo, a notamment critiqué, en juillet, le laxisme supposé du maire de la ville, Bill de Blasio. Pour lui, « c’est un autre signe de dégradation » des conditions de vie à New York, avec la hausse des meurtres et des fusillades.
Des critiques confortées par la suspension pour raisons budgétaires, dès mars, du programme Graffiti-Free NYC, qui avait permis de nettoyer presque 15.000 sites en 2019.
« Je trouve que c’est vraiment laid », réagit Darcy Weber, récemment installée à New York. « Il y a des gens qui disent que c’est de l’art mais est-ce que c’est autorisé? Non. Donc c’est du vandalisme. »
Pour certains, ces graffitis renvoient à la période des années 1970 et 1980, lors de laquelle la ville était exsangue financièrement et la criminalité omniprésente.
« Il y a moins de police dans les rues », affirme Saynosleep.
Sollicitée par l’AFP, la police de New York assure qu’elle « est très au fait de l’importance de traiter les délits liés aux graffitis ». Elle indique également que le nombre d’incidents liés aux graffitis a baissé de 17% par rapport à l’an dernier.
Même son de cloche à la régie des transports de New York (MTA), où l’on annonce un taux d’incident en baisse de 35%.
« Depuis le début du confinement », affirme pourtant Saynosleep, « j’ai été repéré par la police plusieurs fois et j’ai continué à peindre », sans être interpellé.
« Dire que parce qu’il y a des tags (signatures à la peinture, ndlr) partout, on est en train de retomber dans les années +ghetto+, c’est un peu un cliché. C’est facile », rétorque Marie Flageul, qui est aussi porte-parole du collectif de graffeurs 5Pointz.
« C’est quelque chose qui détruit le paysage de notre quartier », s’est insurgé Eric Adams, président de Brooklyn, dans un message vidéo publié début novembre. « Cela coûte aux propriétaires des centaines de milliers de dollars pour les nettoyer. »
Ken Lovett, conseiller du PDG de la MTA, souligne que les graffitis ponctionnent des ressources précieuses « à une période durant laquelle la MTA fait face à la pire crise financière de son histoire », liée à la pandémie.
« Ça ne me préoccupe pas beaucoup », relativise Emile Fu, en regardant une devanture recouverte de graffitis. « Il y a de quoi s’inquiéter par ailleurs. »
« Ça m’aurait choqué dans une autre ville, comme Ottawa au Canada où tout est archi-propre », explique Bryce Graham, qui habite le quartier de Chelsea, « mais ici à New York, c’est un sacré mélange de ce qui est propre et de ce qui est crade. »
Monde
Le réseau social X rétabli au Brésil après un bras de fer juridique
Après plusieurs mois de tensions, la Cour suprême brésilienne autorise la reprise des activités de X, ex-Twitter, suite à la satisfaction des exigences judiciaires, dont le paiement d’amendes et la suppression de comptes associés à la désinformation.
Le réseau social X, propriété d’Elon Musk, est de nouveau accessible au Brésil après une suspension imposée en août par la Cour suprême, motivée par la lutte contre la désinformation. Le juge Alexandre de Moraes, qui avait ordonné cette suspension, a finalement levé l’interdiction ce mardi, estimant que toutes les conditions légales avaient été respectées par la plateforme. Parmi celles-ci, le versement d’amendes s’élevant à 28,6 millions de réais (environ 4,8 millions d’euros) ainsi que la suppression de comptes diffusant de fausses informations, souvent liés à l’extrême droite brésilienne.
Cette décision marque la fin d’un long bras de fer entre le réseau social et les autorités judiciaires brésiliennes. Accusé d’ignorer des injonctions de justice visant à bloquer certains comptes, X avait été pointé du doigt par le juge Moraes pour son rôle présumé dans la diffusion de contenus menaçant la démocratie. Musk avait même qualifié ces actions de « censure », comparant Moraes à un dictateur. Toutefois, après des mois de résistance, la plateforme a fini par se conformer aux demandes de la Cour, facilitant ainsi la réactivation de ses services pour les 22 millions d’utilisateurs brésiliens.
Ce conflit juridique s’inscrit dans un contexte politique tendu, où les plateformes numériques sont de plus en plus impliquées dans la lutte contre la désinformation. Le président brésilien Lula da Silva, soutenant fermement la position de la Cour suprême, a rappelé que les entreprises ne sont pas au-dessus des lois. En revanche, l’ancien président Jair Bolsonaro, allié de Musk, avait vivement critiqué ces restrictions, les assimilant à une atteinte à la liberté d’expression.
Malgré cette période tumultueuse, X semble prêt à reprendre ses activités tout en promettant de respecter les cadres légaux. L’impact de cet épisode sur l’usage de la plateforme reste à déterminer, alors qu’une partie des utilisateurs avait commencé à explorer des alternatives comme Threads ou Bluesky sans succès notable.
Monde
Mexique: Sheinbaum officiellement investie première présidente
Claudia Sheinbaum, ancienne maire de Mexico, a officiellement pris ses fonctions en tant que première présidente de l’histoire du Mexique ce mardi. Elle a prêté serment devant le Congrès et s’est engagée à poursuivre les politiques de son prédécesseur, tout en affirmant sa volonté de garantir les libertés et la justice sociale.
Claudia Sheinbaum, 62 ans, a fait son entrée dans l’histoire en devenant la première femme présidente du Mexique, succédant à Andres Manuel Lopez Obrador. Après avoir prêté serment devant les députés et sénateurs réunis, elle a affirmé avec émotion : « Je suis mère, grand-mère, scientifique, et à partir d’aujourd’hui, présidente par la volonté du peuple du Mexique ». Son élection, marquée par un large soutien populaire avec près de 60 % des voix, est un moment historique pour le pays.
Sous la bannière du parti de gauche au pouvoir, Morena, Sheinbaum a bénéficié de l’héritage laissé par son prédécesseur, Lopez Obrador, qui demeure très populaire. Avec 36 millions de voix, elle devient la candidate la mieux élue de l’histoire mexicaine, portée par des slogans comme « D’abord les pauvres » et « austérité républicaine ». Son programme s’articule autour de la continuité des réformes sociales et économiques initiées sous le mandat précédent.
En matière de sécurité, l’un des dossiers les plus épineux au Mexique, la nouvelle présidente a réaffirmé sa volonté de lutter contre la narco-violence. Face à un bilan de plus de 400 000 morts et 100 000 disparus depuis 2006, elle a mis l’accent sur le renforcement des services de renseignement et de la Garde nationale, qui passera désormais sous le contrôle de la Défense. Cette décision a suscité des préoccupations, notamment de la part de l’ONU, qui a souligné l’importance de ne pas militariser la sécurité publique.
Claudia Sheinbaum a également rassuré les investisseurs nationaux et internationaux, en promettant un cadre économique stable et sécurisé. « Notre gouvernement garantira toutes les libertés », a-t-elle insisté, rejetant les accusations d’autoritarisme.
Son élection intervient dans un contexte de réforme controversée du pouvoir judiciaire, qui prévoit, à partir de 2025, l’élection populaire des juges, une première mondiale qui inquiète notamment les États-Unis. Cependant, le président américain Joe Biden a réaffirmé son engagement à collaborer avec le Mexique, soulignant les liens profonds qui unissent les deux nations.
Claudia Sheinbaum succède à Lopez Obrador, son mentor, et prend la tête d’un pays confronté à de nombreux défis, notamment les relations bilatérales avec les États-Unis, les questions de sécurité, et la gestion des catastrophes naturelles. Dès mercredi, la nouvelle présidente se rendra à Acapulco pour évaluer les dégâts causés par l’ouragan John, qui a récemment frappé le Mexique, faisant 15 morts.
Cet événement marque une nouvelle ère pour le Mexique, avec une dirigeante déterminée à poursuivre l’œuvre de son prédécesseur tout en adressant les préoccupations sociales, économiques et sécuritaires du pays.
Europe
Julian Assange plaide pour la liberté d’informer lors d’une audition au Conseil de l’Europe
Dans sa première apparition publique depuis sa libération, Julian Assange, fondateur de WikiLeaks, a appelé à la défense de la liberté d’informer. Se décrivant comme victime d’une persécution par les États-Unis, il a insisté sur l’importance de continuer à lutter pour la vérité.
Mardi, Julian Assange, qui a passé plus d’une décennie cloîtré entre l’ambassade d’Équateur à Londres et la prison de Belmarsh, est intervenu devant une commission du Conseil de l’Europe à Strasbourg. Cette audition, consacrée à l’impact de sa détention et de sa condamnation sur les droits de l’homme, marque sa première déclaration publique depuis sa sortie de prison en juin dernier. Arrivé tôt dans la matinée, il a été accueilli par des applaudissements à son entrée dans l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE), levant le poing en signe de détermination.
Durant son discours, Assange a exprimé ses regrets quant à l’évolution des conditions de transparence et de liberté d’expression. « Dire la vérité est de plus en plus stigmatisé, attaqué et affaibli », a-t-il affirmé. Il a également insisté sur le fait que sa libération n’était pas le résultat d’un système judiciaire juste, mais d’un plaidoyer en faveur du journalisme.
Condamné pour avoir publié des documents classifiés révélant les opérations militaires et diplomatiques américaines, Assange avait, en juin dernier, conclu un accord de plaider-coupable avec la justice américaine. Cet accord lui a permis de purger une peine déjà effectuée en détention provisoire et d’éviter une longue incarcération aux États-Unis. De retour en Australie depuis sa libération, il a toutefois réitéré devant le Conseil de l’Europe que son emprisonnement résultait de persécutions politiques, en lien avec son travail pour WikiLeaks.
Assange a rappelé les débuts de WikiLeaks en 2010, lorsque le site avait publié des centaines de milliers de documents sensibles, révélant des abus, des exécutions extrajudiciaires et des opérations de collecte de renseignements. Si ces révélations lui ont valu le soutien des défenseurs de la liberté de la presse, elles lui ont aussi attiré les foudres des autorités américaines, qui l’accusent d’avoir mis des vies en danger.
Dans un appel poignant, il a exhorté les institutions comme l’APCE à faire en sorte que des situations similaires ne se reproduisent pas, appelant à la défense de la liberté d’expression et à la poursuite de la quête de vérité. Il a également mis en garde contre l’influence d’une minorité d’individus cherchant à faire taire les voix critiques.
Alors que l’APCE doit débattre de son cas sur la base d’un rapport le qualifiant de « prisonnier politique », le plaidoyer de Julian Assange pourrait avoir un impact sur sa demande de grâce présidentielle auprès de Joe Biden.
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