Chili : une centrale électrique menace l’avenir des télescopes de l’Observatoire européen
L’Observatoire européen austral (ESO) tire la sonnette d’alarme : un projet de centrale à énergie verte pourrait compromettre gravement les observations astronomiques dans le désert d’Atacama, l’un des ciels les plus purs au monde.
L’ESO a exprimé de vives inquiétudes concernant l’installation d’une centrale électrique à proximité de ses observatoires de Paranal et d’Armazones, situés dans le nord aride du Chili. Selon l’organisme, cette infrastructure, bien qu’axée sur les énergies renouvelables, générerait une pollution lumineuse « dévastatrice » et irréversible pour les recherches astronomiques. Itziar de Gregorio, astronome et représentante de l’ESO au Chili, a souligné lors d’une conférence de presse à Santiago que les impacts seraient inévitables si le projet était maintenu à son emplacement actuel.
Le projet, porté par Aes Andes, filiale chilienne de l’américaine Aes Corporation, prévoit un investissement de 10 milliards de dollars pour produire de l’hydrogène vert, de l’ammoniac, ainsi que de l’énergie solaire et éolienne. Cette initiative s’inscrit dans le cadre du plan chilien visant à remplacer les énergies fossiles d’ici 2050. Cependant, l’emplacement choisi, à seulement 11 km de Paranal et 20 km d’Armazones selon l’ESO, suscite de vives tensions. L’entreprise, quant à elle, estime ces distances à 20 ou 30 km.
Paranal abrite l’un des télescopes les plus performants au monde, tandis qu’Armazones accueille la construction du plus grand télescope optique et infrarouge jamais conçu. Ces installations bénéficient actuellement d’une pollution lumineuse exceptionnellement faible, de l’ordre de 0,2%, ce qui en fait des sites uniques pour l’observation astronomique. Or, selon les estimations de l’ESO, la centrale ferait grimper ce taux à 1,49% pour Paranal et 2,45% pour Armazones, des niveaux jugés incompatibles avec des recherches de pointe.
Aes Andes se défend en affirmant que son projet respecte les normes les plus strictes en matière d’éclairage, conformes aux directives gouvernementales. Cependant, l’ESO insiste sur le fait que même une légère augmentation de la pollution lumineuse pourrait compromettre des décennies d’investissements scientifiques. L’organisme avait déjà alerté sur ces risques en janvier, mais une analyse approfondie a confirmé l’ampleur des dommages potentiels.
Alors que le projet doit encore obtenir l’approbation des autorités environnementales chiliennes, la communauté scientifique internationale suit de près ce dossier. L’enjeu est de taille : préserver l’un des derniers sanctuaires de l’astronomie mondiale tout en soutenant la transition énergétique du Chili.