Le deuil royal plonge les commerçants thaïlandais dans une situation délicate

L’hommage populaire à la reine défunte Sirikit se traduit par des gestes commerciaux symboliques, tandis que certains vendeurs subissent une baisse d’activité notable par rapport aux deuils précédents.

Dans les marchés de Bangkok, l’effervescence commerciale habituelle a cédé la place à une atmosphère plus recueillie. Des centaines de commerçants proposent depuis plusieurs jours des vêtements sombres à des tarifs volontairement réduits, permettant à la population de se conformer aux recommandations gouvernementales en matière de deuil. Cette démarche s’inscrit dans le cadre de l’hommage national rendu à la reine mère Sirikit, disparue récemment après soixante-six années de présence aux côtés de la monarchie.

Certains vendeurs ont choisi de brader leurs articles noirs, considérant cette pratique moins comme une stratégie commerciale que comme un témoignage de respect. Un commerçant explique ainsi proposer ses t-shirts à quarante bahts, soit près de cinq fois moins que leur prix habituel, affirmant que sa situation financière stable lui permet ce geste symbolique. Vêtu intégralement de noir comme le recommande le protocole, il souligne que son intention première est de contribuer à l’hommage collectif.

Les autorités thaïlandaises ont instauré une période de deuil d’un an pour les fonctionnaires et encouragé la population à porter des tenues noires ou blanches durant trois mois. Le ministère du Commerce a parallèlement mis en garde contre toute tentative de spéculation sur les vêtements de deuil, allant jusqu’à créer une ligne téléphonique dédiée aux signalements de surfacturation.

Mais derrière cette unanimité apparente se cachent des réalités économiques contrastées. Plusieurs commerçants constatent que les ventes actuelles ne connaissent pas le même essor qu’en 2016, lors du décès du roi Bhumibol. L’un d’eux rapporte écouler à peine cinquante articles par jour, contre quatre cents lors du deuil précédent. La concurrence des plateformes en ligne et le contexte économique actuel sont évoqués pour expliquer cette différence.

Des observateurs notent par ailleurs une évolution dans la nature de l’engagement populaire. Si les générations plus âgées et les fonctionnaires suivent scrupuleusement les consignes officielles, l’hommage rendu à la reine mère semblerait relever davantage d’un respect institutionnel que d’une affliction personnelle profonde. Cette distinction traduirait, selon certains analystes, les transformations en cours au sein de la société thaïlandaise.