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Économie

Chlordécone aux Antilles : une catastrophe écologique qui asphyxie la pêche locale

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Des décennies de pollution au pesticide ont bouleversé l’écosystème marin, contraignant les pêcheurs à se réinventer face à des interdictions draconiennes.

Aux Antilles françaises, l’héritage toxique du chlordécone continue de hanter les eaux côtières. Cet insecticide, massivement épandu dans les bananeraies entre 1972 et 1993, a durablement contaminé les sols et les fonds marins, obligeant les autorités à restreindre sévèrement les activités de pêche. Près des côtes guadeloupéennes, des casiers abandonnés témoignent de l’ampleur du désastre : certaines zones sont totalement interdites, d’autres soumises à des quotas stricts réservés aux professionnels.

La persistance du produit dans l’environnement – sa durée de vie est estimée à plusieurs siècles – a conduit à des mesures radicales. Depuis 2013, près de 200 km² au sud de Basse-Terre sont classés en zone interdite, tandis que d’autres secteurs autorisent uniquement la capture d’espèces peu contaminées. Pour les pêcheurs, souvent artisans, ces restrictions représentent un défi économique majeur. Beaucoup ne disposent pas des bateaux ou des certifications nécessaires pour s’aventurer plus au large, malgré les aides publiques destinées à moderniser les flottes.

Face à cette crise, l’État a mis en place un système d’indemnisation, versant environ 300 000 euros à 700 professionnels depuis 2022. Parallèlement, des dispositifs de traçabilité ont été instaurés pour garantir la sécurité des produits commercialisés et rassurer les consommateurs. Pourtant, le secteur décline inexorablement : entre 2008 et 2021, le nombre de pêcheurs a chuté de moitié, et les ressources halieutiques se raréfient sous l’effet cumulé de la pollution et de la dégradation des récifs coralliens.

Confrontés à une concurrence accrue des importations – qui représentent les deux tiers de la consommation locale –, les professionnels se tournent vers des activités alternatives, comme l’entretien des filets anti-sargasses. Mais pour beaucoup, l’avenir reste incertain, tant l’ombre du chlordécone plane sur l’économie et la culture maritime antillaises.

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