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Au Cachemire indien, la peur pousse à effacer les marques de rébellion

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Dans les cliniques de Srinagar, les demandes de suppression de tatouages politiques explosent, révélant un climat de tension et de surveillance accrue.

La région du Cachemire, disputée entre l’Inde et le Pakistan depuis des décennies, vit une nouvelle phase de crispation. Dans les rues de Srinagar, capitale estivale du territoire administré par New Delhi, une tendance inhabituelle se dessine : des centaines de personnes se ruent dans les cliniques pour faire disparaître des tatouages aux connotations politiques ou religieuses. Ces symboles, autrefois arborés comme des emblèmes de résistance, sont désormais perçus comme une menace pour leur sécurité.

Parmi les motifs les plus fréquents figurent des armes à feu, comme la kalachnikov, ou des inscriptions liées à l’islam. Les propriétaires de ces marques corporelles craignent les représailles des forces de sécurité indiennes, qui ont intensifié leur surveillance depuis la révocation, en 2019, du statut semi-autonome de la région. Les arrestations massives et les contrôles renforcés ont instauré un climat de méfiance, poussant de nombreux habitants à gommer toute trace de leur passé militant.

Les professionnels du secteur observent une hausse significative des demandes, notamment après les récentes escalades violentes entre l’Inde et le Pakistan. Certains clients avouent avoir agi sur les conseils de proches, redoutant que leurs tatouages ne deviennent un prétexte à harcèlement. Les cliniques spécialisées, de plus en plus nombreuses, facturent ces interventions entre quelques euros et plusieurs dizaines, selon la complexité des motifs.

Pour beaucoup, cette démarche relève autant d’une nécessité pratique que d’un renoncement symbolique. Une avocate, ayant requis l’anonymat, confie s’être fait tatouer une arme durant les années 1990, en pleine insurrection. Aujourd’hui, elle considère ces marques comme un risque inutile dans un contexte où la moindre suspicion peut entraîner des ennuis judiciaires.

Cette ruée vers l’effacement illustre les mutations profondes que traverse le Cachemire, où les revendications indépendantistes cèdent peu à peu devant la pression sécuritaire. Les tatouages, jadis signes d’appartenance, deviennent les cicatrices d’une époque révolue.

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