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Les gardiens invisibles de l’Amazonie

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Dans le cœur vert du Brésil, des traces ténues révèlent l’existence de peuples autochtones isolés, ultime rempart contre la déforestation.

Au plus profond de la forêt amazonienne, dans l’État du Pará, des indices discrets mais persistants attestent de la présence de communautés indigènes vivant en marge du monde moderne. Une carapace de tortue abandonnée, des fragments de poterie ou encore des récits transmis entre générations composent un puzzle fragile, mais essentiel pour la protection de ce territoire baptisé Ituna/Itata. Cette zone, aussi vaste que la mégapole de São Paulo, bénéficie d’un statut provisoire de protection depuis 2011, une mesure récemment reconduite par les autorités brésiliennes.

Les témoignages des habitants du village voisin de Koatinemo, membres du peuple Asurini, évoquent des rencontres fugaces avec ces groupes isolés. Takamyi Asurini, un ancien du village, montre une cicatrice qu’il attribue à l’une de ces rencontres. Ces récits, bien que fragmentaires, s’ajoutent aux observations recueillies depuis les années 1970, formant un faisceau de preuves jugé suffisant par les défenseurs des droits indigènes pour exiger une protection permanente.

Le Brésil recense officiellement 114 signes de présence de peuples isolés en Amazonie, mais seuls un quart d’entre eux sont considérés comme avérés. Pour les communautés locales, cependant, ces indices ne font aucun doute. « Nous les percevons dans la nature, dans les sons, parfois même dans les odeurs », explique Mita Xipaya, une militante indigène de 24 ans. Cette connaissance intime du territoire contraste avec l’approche bureaucratique de l’État, accusé de négliger ces preuves pourtant cruciales.

La déforestation, fléau majeur de l’Amazonie, frappe particulièrement Ituna/Itata. Sous la présidence de Jair Bolsonaro, la suspension temporaire des mesures de protection a transformé cette zone en épicentre du défrichement illégal. Malgré le rétablissement des garde-fous sous l’administration Lula, les stigmates demeurent visibles depuis le ciel, où des pans entiers de forêt ont été rasés pour laisser place à des activités minières ou agricoles.

Alors que le Brésil s’apprête à accueillir la COP30 à Belém, la pression monte pour une démarcation définitive de ces terres. « Protéger la forêt passe par la protection de ceux qui l’habitent », rappelle Toya Manchineri, coordinateur d’une association indigène. Dans cette course contre la montre, chaque trace, chaque récit, devient une pièce maîtresse pour préserver l’un des derniers sanctuaires de biodiversité de la planète.

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