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Le Turkménistan face à l’avancée inexorable des sables

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Au cœur du désert du Karakoum, les communautés locales et les autorités engagent un combat de longue haleine pour contenir la désertification, un phénomène aggravé par les bouleversements climatiques et les pressions anthropiques.

Le village de Bokourdak, perdu à une centaine de kilomètres au nord d’Achkhabad, illustre les défis posés par l’expansion des zones arides. Ses habitants, les goumly, voient depuis des années leur environnement se transformer sous l’effet de dunes mobiles qui redessinent le paysage et compliquent les conditions de vie. Un retraité du lieu évoque un déplacement progressif de l’habitat, contraint de suivre la baisse du niveau du sol face à l’ensablement. Dans cette région où l’élevage camelin et ovin prédomine, la réponse s’organise désormais autour de la plantation d’essences locales, conseillée par les instances scientifiques nationales.

Cette situation dépasse les frontières du Turkménistan. En Asie centrale, environ un cinquième des terres sont considérées comme dégradées. Les experts observent une accélération du processus de désertification, attribuée à la conjugaison d’aléas climatiques et de pratiques humaines. Les conséquences sont multiples, touchant à la fois les équilibres sociaux et l’économie régionale, avec un coût estimé à plusieurs points de produit intérieur brut annuel. Un scientifique turkmène souligne que si le désert constitue un écosystème naturel, sa progression est souvent le fruit du surpâturage, de la déforestation et de l’érosion des sols, phénomènes amplifiés par la recrudescence des vents secs et des épisodes de sécheresse.

Les autorités turkmènes ont fait de la lutte contre la désertification une priorité affichée, mettant en avant des campagnes de reboisement massives. Elles annoncent ainsi avoir planté des centaines de millions d’arbres au cours des deux dernières décennies, avec pour ambition affichée de transformer le territoire en une oasis florissante. La communication officielle, très contrôlée, met régulièrement en scène l’engagement des plus hautes figures de l’État dans ces opérations de verdissement. Sur le terrain, les méthodes évoluent. Les plantations d’espèces exotiques cèdent progressivement la place à des variétés endémiques, jugées plus résilientes.

Parmi elles, le saxaoul joue un rôle clé. Cet arbre robuste, capable d’envoyer ses racines à plus de dix mètres de profondeur pour capter l’humidité, forme des barrières végétales efficaces pour fixer les dunes. À Bokourdak, des passionnés veillent sur des milliers de jeunes pousses destinées à constituer une muraille verte. Un tel projet demande cependant de la patience, la croissance complète d’un saxaoul pouvant exiger une vingtaine d’années. Ces plantations servent également à protéger la capitale Achkhabad des intrusions sableuses qui menacent les infrastructures.

Cependant, les efforts de reverdissement se heurtent à une contrainte majeure, la raréfaction de l’eau. Les besoins en irrigation des jeunes plants ont considérablement augmenté avec la hausse des températures, doublant dans certains cas. Pour surmonter cet obstacle, la recherche explore des pistes innovantes, comme l’utilisation de cyanobactéries pour stabiliser les dunes et améliorer la rétention d’humidité, facilitant ainsi l’enracinement. Conscient de la dimension régionale du défi, le Turkménistan a proposé aux Nations unies la création d’un centre dédié à la lutte contre la désertification en Asie centrale, marquant ainsi la volonté de coordonner une réponse à une menace environnementale qui ne connaît pas de frontières.

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