Dans une époque marquée par le virtuel, les danses folkloriques d’Auvergne retrouvent une popularité inattendue, rassemblant jeunes et moins jeunes autour d’un patrimoine vivant.
À Clermont-Ferrand, la Coopérative de Mai, habituellement dédiée aux musiques actuelles, a vibré au rythme des cabrettes et des violons lors d’un « bal barré ». Sous la direction de Camille Lainé, musicienne et formatrice en danses traditionnelles, les participants ont découvert ou redécouvert les pas de la polka, de la scottish et, bien sûr, de la bourrée. Cette dernière, apparue au XVIIe siècle et autrefois pratiquée jusqu’à la Cour, connaît aujourd’hui un véritable renouveau.
L’ambiance était à la fois conviviale et festive. Antoine Valentin, 42 ans, témoigne de la simplicité de ces danses, accessibles même aux novices. « En une heure, on est déjà dans le bain. Il n’y a pas de règles strictes, pas besoin d’être un expert pour s’amuser », explique-t-il. Camille Lainé souligne quant à elle l’aspect intergénérationnel de ces soirées, où toutes les tranches d’âge se côtoient sans barrières.
Après l’initiation, place au bal. Les mélodies traditionnelles, parfois revisitées avec des touches rock ou électro, ont fait danser une foule venue de toute l’Auvergne. David de Abreu, directeur de l’Agence des musiques des territoires d’Auvergne (Amta), constate un engouement particulier chez les étudiants. « Une nouvelle génération réinvente ces danses et ces musiques, créant une explosion créative », affirme-t-il.
En milieu rural, les « bals trads » attirent également un public nombreux, avec une nette augmentation depuis 2015. « Avant, c’était souvent le même public qui se déplaçait. Aujourd’hui, les événements attirent des profils très variés », précise David de Abreu. Pour lui, ce succès s’explique par un besoin de lien social et de défoulement collectif dans une société où les espaces de convivialité se raréfient.
Jeanne Monteix, 36 ans, apprécie particulièrement cette dimension collective. « C’est un moment de partage où tout le monde s’entraide. On improvise, on se laisse guider, et cela procure une sensation de liberté très agréable », confie-t-elle.
Le phénomène dépasse désormais les frontières de l’Auvergne, avec des « bals barrés » organisés dans plusieurs villes françaises comme Bordeaux, Rouen ou La Rochelle. Pour David de Abreu, cette tendance reflète un désir de se reconnecter à ses racines tout en restant ouvert aux autres. « Nous nous raccrochons à une identité, non pour nous enfermer, mais pour dialoguer avec le monde », conclut-il.