Elles guettent chaque appel, chaque message, dans l’espoir d’un signe de vie. Leur quotidien est rythmé par l’incertitude et la peur de perdre à jamais ceux qu’elles aiment.
Kateryna, 28 ans, passe des heures le regard fixé sur son téléphone, espérant un mot de son compagnon, engagé sur le front depuis trois ans. Comme des milliers d’autres femmes en Ukraine, sa vie amoureuse a été bouleversée par la guerre. Les rares échanges et les permissions sporadiques sont devenus son seul lien avec lui. « Je suis une femme qui attend », confie-t-elle, assise sur un banc dans un parc de Kiev.
Ancienne ambulancière bénévole, Kateryna a dû quitter le front après une grave blessure. Cette distance renforce son angoisse. Elle a déjà perdu un premier compagnon dans les combats, et chaque silence prolongé réveille cette douleur. « L’esprit ne pense jamais à quelque chose de positif. Il imagine toujours le pire », murmure-t-elle, un sourire fragile aux lèvres.
La perspective d’une paix rapide, souvent évoquée par certains dirigeants étrangers, ne la rassure pas. Elle vit dans un état de tension permanent, consciente que chaque jour pourrait être le dernier. « On sait qu’il peut mourir à tout moment, sans même que l’on retrouve son corps », avoue-t-elle.
Daria, 29 ans, partage cette inquiétude. Son mari combat près de Kharkiv, tandis qu’elle s’occupe seule de leurs deux jeunes enfants et rénove leur nouvel appartement à Kiev. « J’aimerais croire à une paix durable, mais nous vivons dans la réalité », soupire-t-elle. Leur fille de onze mois peine à reconnaître son père, et leur fils de trois ans ne cesse de réclamer sa présence.
Quand, par miracle, une permission est accordée, ces femmes s’accrochent aux petits bonheurs éphémères. Pour Kateryna, c’est un dîner dans un restaurant chinois et un gâteau rose partagé avec son compagnon. Ces instants volés sont devenus leur seule échappatoire face à un avenir incertain.
La méfiance envers les promesses de paix extérieures grandit, tout comme le sentiment d’abandon. Beaucoup redoutent que les négociations ne se fassent au détriment de l’Ukraine. « Quand la Russie nous attaquera à nouveau – et ce n’est qu’une question de temps –, les chances de survie de nos proches seront encore plus minces », conclut Kateryna, la voix tremblante de colère.
Dans l’attente, ces femmes continuent de vivre au rythme des alertes et des silences, entre espoir et désespoir. Leur guerre à elles ne connaît pas de trêve.