À Abidjan, une initiative médicale redonne espoir aux victimes de mutilations génitales, combinant soins et formation de professionnels locaux.
Dans un hôpital public de Treichville, au sud d’Abidjan, des femmes retrouvent peu à peu une partie de ce que la tradition leur a arraché. Parmi elles, Adèle, 45 ans, sage-femme et mère de trois enfants, vient de subir une intervention chirurgicale visant à réparer les séquelles d’une excision subie dans son adolescence. Le regard serein, elle évoque avec émotion ce nouveau départ, après des années de gêne et de complexes.
Cette opération s’inscrit dans le cadre d’une mission médicale soutenue par un fonds international, visant à offrir des reconstructions génitales gratuites tout en formant des praticiens locaux. Une équipe française, dirigée par une chirurgienne spécialisée, a opéré 28 patientes en avril, tout en encadrant une dizaine de médecins africains pour pérenniser ces interventions sur le continent.
Pour Adèle comme pour d’autres, cette démarche va bien au-delà du physique. Elle raconte avoir longtemps cherché une solution, confrontée au regard pesant de ses partenaires et à une estime d’elle-même ébranlée. Aujourd’hui, elle se sent « fière » et apaisée, malgré le long chemin de reconstruction psychologique qui l’attend. D’autres femmes, plus jeunes, partagent ce soulagement, comme cette trentenaire dont le mariage a volé en éclats à cause des conséquences de l’excision.
Selon les dernières estimations, près d’une Ivoirienne sur trois a subi une mutilation génitale, un chiffre alarmant qui reflète une pratique encore ancrée dans certaines communautés. L’enjeu de ces missions est donc double : soigner, mais aussi sensibiliser. Les patientes opérées deviennent des ambassadrices, brisant le silence autour d’un sujet longtemps tabou.
La chirurgienne en charge du projet insiste sur l’importance d’un accompagnement global, incluant un suivi psychologique pour éviter toute stigmatisation. Son objectif ? Que ces interventions ne restent pas l’exception, mais s’intègrent durablement dans le système de santé local. Un combat médical, mais aussi social, pour que ces femmes puissent enfin tourner la page.