Le 31 août 2023, un courriel des Thermes de Balaruc-les-Bains fait basculer l’Agence régionale de santé (ARS) Occitanie dans une urgence sans précédent. Après plus d’un an de silence, la directrice Qualité révèle que douze réacteurs SUBLIO, installés depuis le printemps 2022, opèrent clandestinement sur le réseau d’eau thermale. Ce n’est pas une simple annonce, c’est une bombe administrative. En quelques jours, la machine étatique se met en marche, oscillant entre stupéfaction et action, pour répondre à un scandale sanitaire et financier d’une ampleur inattendue.
Dans les bureaux de l’ARS Occitanie, la nouvelle provoque un séisme [lire épisode 1]. Selon des échanges de mails que nous avons pu consulter, datés de septembre 2023, un cadre s’alarme : « La directrice du laboratoire Qualité – Recherche & Développement nous annonce l’installation complète du dispositif sans que nous n’en ayons été informés. C’est une situation très problématique. Il faut alerter immédiatement la DGS ». Un autre agent, sidéré, interroge : « Comment un établissement public peut-il brancher un tel dispositif sans autorisation, ni évaluation, ni contrôle ? ». La révélation d’une technologie illégale, coûteuse et apparemment inutile met les services sanitaires sous haute pression.
Les inquiétudes s’intensifient dans une note confidentielle adressée au Préfet de l’Hérault, que nous avons pu consulter. Un haut responsable de l’ARS Occitanie y dresse un constat accablant : « L’établissement a intégré un dispositif de traitement non autorisé, inconnu du référentiel, sans aucune information préalable. C’est un fait accompli. »
Elle pointe un risque sanitaire majeur : « Une désinfection non autorisée pourrait altérer l’eau minérale naturelle (EMN), violant l’article R.1322-3 du Code de la santé publique, qui interdit tout traitement modifiant ses caractéristiques microbiologiques. » Sur le plan financier, l’aberration est criante : « L’établissement thermal en aurait fait équiper plusieurs réacteurs, montant entre 500 000 et 700 000 euros. Mais des extensions étaient prévues pour atteindre une trentaine de dispositifs, soit plus de deux millions d’euros. » Une dépense colossale pour un système que les Thermes de Balaruc-les-Bains eux-mêmes décrivent comme inefficace.
La note conclut, atterrée : « Ce n’est plus une erreur. C’est une stratégie délibérée », qualifiant le projet d’absurde face à son inutilité avérée.
Dans le même temps, la Direction générale de la santé (DGS) entre dans la danse. Un cadre écrit à l’ARS Occitanie : « Ce type de procédé n’a pas sa place dans un établissement thermal. Il ne figure dans aucun cadre réglementaire. Il est suspecté de produire un effet de désinfection équivalent à une insolation UV douce, ce qui est interdit par l’article R.1322-3 du Code de la santé publique. » La recommandation est sans appel, retrait immédiat, saisie du préfet, mise en demeure. La DGS va plus loin, alertant le Conseil national des établissements thermaux (CNEth) pour contrer ce « démarchage commercial », un signal clair que l’État perçoit SUBLIO comme une menace systémique.
Le 28 novembre 2023, la préfecture de l’Hérault agit. Dans une mise en demeure adressée à Paul-François Houvion, elle énonce les bases juridiques, l’article R.1322-12 exige une déclaration préalable, l’arrêté du 27 février 2007 limite les traitements autorisés, l’article R.1322-3 interdit toute désinfection. Elle assène : « Aucune information n’indique l’absence d’un effet de désinfection de l’eau pouvant résulter de l’énergie générée dans ces réacteurs. » Elle exige le retrait complet des réacteurs sous deux mois, soit avant le 28 janvier 2024, avec un avertissement sévère : « Aucun traitement ne doit avoir pour effet de modifier les caractéristiques microbiologiques de l’eau minérale naturelle, au risque de perdre la reconnaissance en tant qu’eau minérale naturelle des forages exploités. » Les enjeux sont colossaux, perte du statut thermal, fin du conventionnement avec l’Assurance maladie, sanctions pénales possibles !
Mais à Balaruc, on ne plie pas. Le 19 janvier 2024, Paul-François Houvion répond au Préfet de l’Hérault, tentant de minimiser la portée de la mise en demeure. « Il ressort du constat d’huissier réalisé le 3 octobre 2023 que les réacteurs SUBLIO ne sont plus connectés au réseau d’eau minérale naturelle », écrit-il, ajoutant : « Ils ont été désactivés en attendant une potentielle autorisation. » Le constat d’huissier, joint au dossier, confirme que les réacteurs ont été débranchés électriquement, mais ils n’ont pas été démontés ni retirés physiquement.
Une désactivation purement formelle, qui ne répond pas à l’exigence de retrait total formulée par la préfecture de l’Hérault. Paul-François Houvion va plus loin, arguant que « la présente technologie respecte les dispositions législatives et réglementaires », car elle « ne modifie pas la composition de l’eau dans ses constituants essentiels et n’a pas pour but d’en modifier les caractéristiques biologiques ». Il propose des études approfondies. Une défense qui cherche à gagner du temps, mais qui ignore l’ordre clair de retrait.
Le directeur des Thermes de Balaruc-les-Bains confirme à son tour dans cette correspondance au préfet de l’Hérault que le système SUBLIO n’a aucun effet mesurable sur l’eau. Ni pH, ni conductivité, ni minéralisation modifiés. Un deuxième aveu qui rend la dépense de centaines de milliers d’euros injustifiable.
Dans les bureaux de l’ARS Occitanie, un sentiment s’installe peu à peu, il ne s’agirait pas d’une simple méconnaissance de la législation en vigueur, mais bien d’un passage en force, orchestré avec méthode, pour tenter de faire évoluer le droit encadrant les eaux minérales naturelles. Ce soupçon prend corps à la lecture de la réponse juridique adressée par le directeur des Thermes de Balaruc à la mise en demeure préfectorale du 28 novembre 2023. Cette réponse a été décrite par des agents comme « surprenante » et « très construite sur le plan juridique », au point d’être assimilée à un « mémoire en réponse » ou un recours gracieux déguisé. Une analyse interne relève même qu’il s’agirait là d’une manœuvre destinée à « ouvrir la voie à une requalification réglementaire ».
Tout semble indiquer qu’une stratégie bien établie a été mise en œuvre pour forcer la main aux autorités sanitaires. La qualité millénaire de l’excellente eau thermale de Balaruc-les-Bains aurait-elle été instrumentalisée comme tremplin, à des fins de lobbying, pour faire évoluer la législation et faire plier l’État ? La question mérite d’être posée, tant les indices s’accumulent.
À ce stade, la communication officielle des Thermes reste active. Le post Facebook du 8 février 2023, promettant un « transfert osmotique intracutané » et un « rajeunissement de la peau », est encore en ligne en janvier 2024. Pourtant, dans le courrier adressé au préfet le 19 janvier 2024, le directeur des Thermes de Balaruc-les-Bains assure avoir suspendu toute communication sur le dispositif SUBLIO et produit pour rassurer les autorités une lettre de mise en demeure à SUBLIO France pour lui interdire toute référence aux Thermes et exiger la suppression d’éléments déjà publiés.
L’établissement public invoque, par la voie de son avocat, une prétendue obligation de discrétion, tout en étant lui-même à l’origine de multiples déclarations publiques.
Une tentative tardive et incohérente de reprendre le contrôle, alors que la transparence devrait prévaloir dans un établissement public détenu à 85 % par la commune. Les curistes, eux, n’ont pas été informés de l’utilisation passée de SUBLIO ni de sa désactivation. Une opacité qui contraste avec la gravité de la situation.
Dans le prochain épisode, Le Singulier dévoilera les manœuvres déployées pour tenter de sauver le système SUBLIO. Face à la pression des autorités sanitaires, une nouvelle stratégie émerge, celle du lobbying de haut niveau. Un ancien ministre de la Santé entre en scène, tentant d’ouvrir une brèche réglementaire pour rendre légale une technologie pourtant rejetée par l’administration. Une tentative de sauvetage aussi spectaculaire que périlleuse.
Nous tenons à informer nos lecteurs que, dans l’après-midi du 14 avril 2025, notre site lesinguliersete.fr a été la cible d’une attaque de type DDoS, rendant impossible la publication de ce deuxième numéro. Nous condamnons avec la plus grande fermeté cette tentative manifeste de porter atteinte à un média libre et indépendant. Une plainte sera déposée dans les prochaines heures auprès des autorités compétentes, et des éléments techniques sont en cours de collecte afin d’identifier l’origine de cette attaque.
ÉPISODE 3 – Balaruc-les-Bains – SUBLIO 3/6 : Le lobbying de Claude Évin pour sauver le projet
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ClaudeIS
15 avril 2025 at 9 h 39 min
C’est bon, vous pouvez arrêter la série, ils sont tous morts. Ces types se servent d’un outil local qui génère des centaines d’emplois pour faire entrer le loup dans la bergerie. C’est inacceptable. Manifestation et démission ! Canovas n’y est pour rien, c’est un brave mec. Il s’est entouré de requins, et ils vont détruire tout ce qu’il a construit. Honteux.
Jhon
15 avril 2025 at 10 h 06 min
Un moment il faut assumer les actes canevas et bien le maire de la ville donc il devait faire le nécessaire avant
CLAUDEIS
15 avril 2025 at 10 h 16 min
Canovas est dépassé, vous avez vu les gens qui l’entourent ?? Que des requins. Il arrive à la fin, pas besoin de taper sur lui comme le fait ce journal. Il a beaucoup donné pour la commune, il mérite du respect et de sortir avec les honneurs et non pas sur un scandale. Un peu de respect svp. Merci.
BERNARD D
15 avril 2025 at 10 h 55 min
Êtes vous en train de dire que le Maire est vieux et sénile ?
N’est ce pas lui qui au cours de ses différents mandats a mis en place les « requins » que vous citez ? N’est ce pas lui qui a viré l’équipe dirigeante qui a construit le nouvel établissement pour pouvoir y placer sa belle-fille et ses amis ?
Jhon
15 avril 2025 at 11 h 44 min
Bien voila une chose de plus apre c est un mec 🤣🤣🤣pour la famille et les amis
CLAUDEIS
15 avril 2025 at 12 h 40 min
Vous savez c’est quoi gérer une commune ? On ne peut pas être de partout.
THOMAS
16 avril 2025 at 13 h 53 min
En tout cas le maire a été condamné par le tribunal administratif de Montpellier pour arrêté municipaux illégaux et a du payer 1500€ au plaignant…J’ai moi même porte plainte en 2023 au même motif et mes plaintes ont été classé sans suite donc ce monsieur fait ce qu’il veut.et la police est aux ordres…cqfd
Rauzier
16 avril 2025 at 7 h 08 min
Bonjour, sans rentrer dans les considérations techniques et sanitaires pour lesquelles je n’ai aucune compétence, je me contenterai de dire que ces thermes sont une véritable usine.
Les thermes sont magnifiques mais le registre humain est absent.C’est la course pour arriver aux divers soins dans les cases temporelles.Un jeune continents d’agents thermaux formés à la hâte peu sensible à la déontologie qu’élise l’empoi.(remarque essentiellement dirigée envers la gêne masculine)
Ces remarques concernent des séjours effectués entre l’ouverture des nouveaux thermes et l’année 2020.Depuis nous avons délaissé Balaruc pour d’autres sites plus conviviaux et plus calmes.
Il est possible que les choses se soient améliorées depuis
Rex
15 avril 2025 at 13 h 38 min
M.Canovas devait savoir, beaucoup d’argent sur le tapis, nous recherchons une saine gestion des deniers publics sur le Bassin de Thau.
Difficile de trouver une réponse à cette demande, étant donné l’accumulation de sales affaires….
le Balarucois libre
15 avril 2025 at 22 h 18 min
CANOVAS n’a rien d’un « brave mec », croyez moi… c’est le maire des copains, le reste il s’en fout… il faut un AUDIT indépendant sur tous les sujets (finances, thermes, urbanisme, …)
Marc Dernis
15 avril 2025 at 10 h 05 min
C’est que l’épisode 2…
Elsa
15 avril 2025 at 10 h 55 min
Ça fait 7 ans que je fais mes cures à Balaruc…. Ça sera la dernière… Dommage…
MICHELLE BALARUC
15 avril 2025 at 11 h 58 min
C’est triste pour gérard de finir comme ça. Ce que je viens de lire est hallucinant !!! Merci pour votre travail et bravo aux journalistes. J’ai moi aussi fait un don.
BERNARD D
15 avril 2025 at 12 h 00 min
J’invite le journal à faire le rapprochement de la date du courrier de la Directrice Qualité pour déclarer le système SUBLIO et celles qui ont rythmé la mise en lumière pour le grand public du scandale des eaux minérales de Vittel par NESTLE WATERS.
La chronologie est troublante. Était ce un tentative désespérée pour espérer passer à travers les mailles du filet qui se resserrait?
Nini
15 avril 2025 at 12 h 14 min
BERNARD D : Bien sur que c’est lié. C’est certainement là qu’ils se sont appercu de la conn.. monumentale effectuée. Ca fait quand même peur de voir un tel amateurisme dans des dirigants qu’ils soient élus, fonctionnaires ou cadres de la SPLETH. Je mets même en doute la société qui commercialise ce système. Comment penser qu’elle ne sache pas que cela est interdit dans l’exploitation des eaux naturelles ?? Tous dans le même lot .. ouste dehors et passage devant la justice si il y a lieu !! Si en plus il y a des emplois familiaux aux responsabilités comme le laisse penser certains commentaires, c’est une prise illegale d’intérêt c’est 5 ans et 500000€ …
Audrey Coste
15 avril 2025 at 12 h 38 min
Incroyable travail du singulier. Ça fait vraiment plaisir de vous voir grandir, moi qui vous ai toujours soutenus auprès de mes proches.Un succès amplement mérité. Ça, c’est du journalisme, du vrai.
Nathalie Renoux
15 avril 2025 at 13 h 06 min
J’ai fait ma cure à cette période là. Je n’y reviendrai plus.
Nicollon Franck
15 avril 2025 at 13 h 56 min
J’y ai attrapé un érysipèle l’an dernier qui, j’en suis persuadé à 100%, viens de ce problème d’eau. Bien entendu, le médecin de cure m’a certifié le contraire, mais quand j’ai pris connaissance de ce mauvais traitement d’eau, ça n’a fait que confirmer mon intime conviction. C’est dommage, mais je n’ai plus envie de faire ma cure à Balaruc.
Claudine Ris…
15 avril 2025 at 16 h 10 min
Je comprends beaucoup mieux mes problèmes de démangeaisons après ma cure. C’est tout simplement inadmissible. Il faut créer un groupe de victimes et engager une action judiciaire collective. L’État a clairement manqué à ses obligations en ne contrôlant pas ces irresponsables.
Jhon
15 avril 2025 at 18 h 32 min
Entièrement d accord avec vous combien de personnes qui ont eux des problèmes de peau il faut faire un article la dessus
Clovis 90
15 avril 2025 at 17 h 32 min
SUBLIO, tout simplement une belle arnaque que les élus ne veulent pas reconnaître…
Tout cela me rappelle les avions RENIFLEURS de Giscard d’Estaing.
David
15 avril 2025 at 17 h 58 min
Je suis en cure ce mois-ci.
Pouvez vous être plus clair, plus simple pour une personne lambda comme moi sur le problème d eau évoqué anterierement « Transfert osmotique intracutane » Merci
Pieds dans l'eau
15 avril 2025 at 18 h 22 min
Incroyable polémique… après bien des tentatives de dissimulation éhontée de lobbying :seuls les requins sont en cause… A condition que le Maire sache se dépêtrer du scandale… Annoner les chiffres de l’apport du thermalisme balarucois est une chose (notamment emplois, retour financier vers nos finances publiques…)… Conserver le conventionnement de la Spleth, un challenge réouvert probablement par la concurrence.. Avec en toile de fond un risque de déremboursement pour les curistes réservataires non avertis et « à l’insu de leur plein gré ». Et au surplus la pression gouvernementale pour « soulager » nos dépenses de santé publique…
Boi.
15 avril 2025 at 18 h 50 min
Quelle honte et nous qui comptons sur eux pour des soins ..et c est la sécu pour payé en partie ils méritent d être destituer
Mathieu
16 avril 2025 at 3 h 08 min
Bonjour,
Pour faire simple,quel est le problème pour les curistes?
MERCI
Muriel
16 avril 2025 at 15 h 52 min
Merci Mathieu, j’allais poser la même question
JACQUES
16 avril 2025 at 12 h 22 min
Bonjour
Je viens à Balaruc depuis 2016 , j’ai fait 7 cures et c’est bien la dernière , ça c’est bien dégradé depuis le début , niveau réservations soins , entretient , éléments rouillés dans les vestiaires boue et massages , je quitte l’usine et vais voir ailleurs
Patatras
16 avril 2025 at 18 h 32 min
J’attends avec intérêt la publication des autres articles sur le sujet.