**Un chef-d’œuvre baroque ressuscité à Libourne : la révélation d’une toile perdue de Guido Reni**
_*Longtemps considérée comme une simple copie, une toile conservée dans les réserves du musée de Libourne pourrait bien être un original du célèbre peintre italien Guido Reni. Une découverte qui bouleverse le monde de l’art.*_
Cachée pendant des décennies dans les sous-sols du musée des Beaux-Arts de Libourne, en Gironde, une toile représentant « Atalante et Hippomène » a récemment suscité l’émoi des experts. Jusqu’alors cataloguée comme une copie du XIXe siècle, cette œuvre monumentale de 2 mètres sur 3 pourrait en réalité être une version authentique du maître baroque italien Guido Reni (1575-1642). Une révélation qui relance le débat sur l’authenticité et la provenance de cette peinture.
L’histoire de cette toile remonte à l’après-guerre, lorsqu’elle fut léguée au musée par la veuve d’un ancien député. Considérée comme une reproduction tardive, elle fut reléguée dans les réserves, loin des regards. Ce n’est qu’en 2022, lors d’un récolement des collections, que les équipes du musée ont porté une attention particulière à cette œuvre négligée. Sous une couche protectrice, une main délicatement peinte, celle d’Atalante tenant une pomme d’or, a immédiatement captivé les spécialistes.
Sophie Jarrosson, restauratrice d’art indépendante, a été la première à émettre des doutes sur la datation initiale. La texture de la toile, typique du XVIIe siècle, ainsi que la présence de « repentirs » – ces corrections effectuées par l’artiste lors de la création – ont renforcé ses soupçons. Ces indices ont conduit à une expertise approfondie menée par le Centre de recherche et de restauration des musées de France (C2RMF).
Les analyses scientifiques, incluant radiographies, réflectographie infrarouge et cartographie de fluorescence X, ont confirmé que la toile ne datait pas du XIXe siècle. Ces résultats préliminaires ont ouvert la voie à une hypothèse fascinante : cette œuvre pourrait provenir de l’atelier de Guido Reni, voire être de sa main. À l’époque, il était courant que plusieurs versions d’une même scène coexistent, certaines réalisées par des élèves sous la supervision du maître.
Aujourd’hui, la toile est exposée au public dans le cadre d’une restauration en direct, offrant aux visiteurs un aperçu unique du travail minutieux des experts. Cette découverte soulève également des questions passionnantes : s’agit-il de la version perdue vendue à Paris en 1867 ? Pourrait-elle même précéder les autres versions connues, conservées au Prado, au musée Capodimonte et chez un collectionneur privé à Bologne ?
Pour Caroline Fillon, directrice du musée de Libourne, cette enquête est une aventure exceptionnelle. « Des rebondissements de cette ampleur, c’est unique dans une carrière », confie-t-elle. Alors que les recherches se poursuivent, une chose est certaine : cette toile, longtemps oubliée, pourrait bien réécrire une page de l’histoire de l’art.