Le Salon du meuble milanais célèbre l’audace créative italienne, où chaque pièce devient une œuvre à part entière.
Dans les allées du Salon du meuble de Milan, les visiteurs découvrent un univers où la frontière entre mobilier et art s’estompe. Des vases monumentaux inspirés de Giacometti côtoient des fauteuils aux formes picturales, signés par des designers qui revendiquent une approche artistique. Chez Imperfettolab, par exemple, les canapés en fibre de verre évoquent des écorces d’arbres, créant une ambiance organique et poétique. Le fondateur, Verter Turroni, décrit sa philosophie : privilégier les courbes et l’esthétique plutôt que la rigidité fonctionnelle.
L’événement met en lumière une tendance forte : le design italien s’affranchit des contraintes utilitaires pour embrasser une dimension conceptuelle. Des tables sculptées à la main dialoguent avec des fauteuils en forme de nids, tandis que des résines aux teintes naturelles habillent les murs comme des toiles. Pour Turroni, il s’agit de transposer des paysages dans les intérieurs, une démarche qui séduit particulièrement les marchés américain, asiatique et moyen-oriental.
La question de la distinction entre art et design anime les débats. Si certains estiment que le design répond avant tout à un besoin pratique, d’autres, comme Maria Porro, présidente du Salon, soulignent que la valeur esthétique prend le pas dans les créations d’auteur. Cette ambiguïté se ressent au Palazzo Donizetti, où des pièces uniques – lustres, miroirs sculptés ou chaises en marbre – témoignent du savoir-faire de 180 artisans italiens.
Brigette Romanek, décoratrice d’intérieur pour des célébrités hollywoodiennes, confirme cet engouement pour le *Made in Italy*. Selon elle, les créations italiennes transcendent leur fonction pour devenir des pièces de collection. Des marques comme Visionnaire poussent cette logique plus loin en collaborant avec des artistes comme Aurel K. Basedow, dont les touches picturales animent des tissus jacquard.
Face à la disparition progressive des métiers d’art, des initiatives comme Artemest œuvrent à préserver ce patrimoine artisanal. Ippolita Rostagno, directrice créative, alerte sur la nécessité de transmettre ces compétences, autrefois héritées de génération en génération. Dans ce contexte, le design italien s’impose comme un pont entre tradition et avant-garde, où chaque objet raconte une histoire – bien au-delà de sa simple utilité.