Le Premier ministre, jugé trop indulgent envers l’extrême droite, divise jusqu’au sein de la majorité présidentielle.
La réaction de François Bayrou face à la condamnation de Marine Le Pen continue de faire des vagues. Le chef du gouvernement a exprimé son trouble concernant l’application immédiate de la peine d’inéligibilité infligée à la présidente du Rassemblement national, une position qui a provoqué des remous jusque dans son propre camp. Selon ses proches, le Premier ministre aurait été particulièrement marqué par la sévérité du verdict, allant jusqu’à remettre en question la législation française, qu’il estime plus stricte que dans d’autres pays européens.
Marine Le Pen elle-même s’est emparée de ces déclarations, suggérant dans un entretien que ce malaise aurait précipité la tenue d’un procès en appel. Pourtant, les élus du MoDem, le parti de François Bayrou, ont rapidement pris leurs distances. Plusieurs d’entre eux ont rappelé leur respect pour la décision de justice, soulignant que l’exécution provisoire était prévue par la loi. Une divergence qui illustre les tensions au sein de la majorité.
Du côté des alliés macronistes, les critiques ont fusé. Gabriel Attal, chef de file des députés Renaissance, a fermement défendu l’indépendance de la justice, rejetant toute forme de complaisance envers l’extrême droite. Emmanuel Macron, lors d’un Conseil des ministres, a lui aussi rappelé l’importance de respecter les décisions judiciaires, dans un contexte où le Premier ministre semble régulièrement commenter les affaires en cours, au risque de brouiller les frontières entre pouvoir exécutif et judiciaire.
Cette affaire n’est pas sans rappeler les précédentes prises de position controversées de François Bayrou, notamment sur des dossiers sensibles comme celui des violences au sein d’un établissement scolaire lié à son histoire personnelle. Certains observateurs y voient une stratégie maladroite pour séduire l’électorat frontiste, tandis que d’autres dénoncent une mise en danger de la crédibilité des institutions.
Les relations entre le Premier ministre et Marine Le Pen, bien que politiquement opposés, restent ambiguës. Leurs convergences sur des sujets comme la proportionnelle ou le financement des partis, ainsi que le parrainage accordé par Bayrou à Le Pen pour la présidentielle de 2022, alimentent les spéculations. Une proximité qui pourrait, selon certains, refléter une tentative de préserver des appuis en cas de revers judiciaire. Mais pour d’autres, il s’agit d’une erreur tactique, le RN n’ayant jamais caché sa volonté de tirer profit des divisions adverses.
Alors que la majorité tente de contenir les débordements, une ministre résume l’impasse : commenter une décision de justice, c’est risquer d’affaiblir la confiance des citoyens dans les institutions. Un avertissement qui résonne alors que le gouvernement navigue en eaux troubles.