Alors que les pubs traditionnels voient leur fréquentation chuter, le pays mise sur une reconnaissance internationale pour redynamiser ce pilier de son identité nationale.
En République tchèque, la bière est bien plus qu’une simple boisson : c’est une institution. Avec une consommation annuelle de 130 litres par habitant, le pays caracole en tête des classements mondiaux. Pourtant, les pubs locaux, autrefois bondés, se vident peu à peu. Face à ce déclin, les autorités ont lancé une démarche pour faire reconnaître cette tradition brassicole par l’Unesco, à l’image de la Belgique, distinguée en 2016.
Dans les ruelles pavées de Prague, l’ambiance des tavernes reste chaleureuse, mais les clients se font rares. Gabriela Galetkova, une habituée des lieux, sirote une Pilsner en soulignant le caractère unique de cette boisson. Pour elle, ces établissements sont des lieux de rencontre essentiels, où se tissent des liens sociaux. Mais l’époque où la bière coûtait moins cher que l’eau est révolue. Aujourd’hui, une pinte peut atteindre 4 euros dans le centre-ville, poussant de nombreux Tchèques à privilégier les bouteilles achetées en grande surface.
Le secteur subit aussi les contrecoups de l’inflation et des changements d’habitudes. La pandémie a accéléré la fermeture de nombreux débits de boissons, tandis que les jeunes générations se tournent vers des modes de consommation plus sains. Résultat : la consommation moyenne a baissé de 15 litres en dix ans. Malgré tout, la filière reste un moteur économique, avec 550 brasseries employant 65 000 personnes.
Pour Tomas Slunecko, président de l’association nationale des brasseurs, l’inscription à l’Unesco serait un levier pour relancer l’attractivité des pubs et stimuler les exportations, encore modestes. Il mise sur une offre plus qualitative, incluant des bières artisanales et une restauration soignée, pour séduire une clientèle diversifiée. Car au-delà de l’aspect économique, cette tradition joue un rôle social fondamental, comme l’explique un sociologue local : elle renforce les liens communautaires et participe à la construction identitaire du pays.
Entre défis économiques et enjeux culturels, la République tchèque espère bien voir sa culture brassicole rejoindre le prestigieux patrimoine immatériel de l’Unesco. Une reconnaissance qui, selon les professionnels, pourrait redonner vie à ces lieux conviviaux où bière et camaraderie ont toujours fait bon ménage.