Un conservateur allemand à la croisée des chemins : Friedrich Merz face aux défis européens

À 69 ans, le futur chancelier allemand incarne à la fois les espoirs d’un renouveau conservateur et les craintes d’une rupture avec les traditions politiques du pays.

Friedrich Merz, désigné chancelier après la victoire de la CDU/CSU aux législatives de février 2025, symbolise un paradoxe politique. Perçu comme une figure ancrée dans le passé, il porte pourtant les aspirations d’une Europe en quête de stabilité face aux bouleversements géopolitiques. Son arrivée au pouvoir marque un tournant pour l’Allemagne, confrontée à des choix stratégiques majeurs, entre réarmement, tensions migratoires et recomposition des alliances transatlantiques.

Juriste de formation et ancien cadre de BlackRock, Merz incarne un conservatisme pragmatique. Après des années d’éclipse politique sous l’ère Merkel, son retour fulgurant s’accompagne de promesses audacieuses : un plan de réarmement massif, une réforme du frein à la dette, et un durcissement des politiques migratoires. Ces mesures, saluées par les partenaires européens, divisent cependant l’opinion allemande, où son taux de popularité reste fragile.

Ses détracteurs lui reprochent notamment d’avoir assoupli les règles budgétaires, une volte-face qui alimente la montée de l’AfD. Pourtant, Merz défend cette approche comme une nécessité face aux menaces russes et aux incertitudes américaines. Atlantiste de longue date, il prône une Europe plus autonome sur le plan militaire, sans rompre avec l’OTAN, tout en cherchant à préserver les intérêts industriels allemands menacés par les tarifs douaniers de Donald Trump.

Sur le plan intérieur, son discours vise à séduire un électorat tenté par l’extrême droite, avec des propositions restrictives sur l’immigration et une rhétorique patriotique. Mais son héritage libéral – réduction des impôts, simplification administrative – pourrait entrer en tension avec les réalités économiques. Pour les observateurs, sa capacité à concilier ambition européenne et stabilité nationale déterminera son succès.

Entre héritage kohlien et adaptation aux nouveaux équilibres mondiaux, Friedrich Merz incarne ainsi une Allemagne à la recherche de son identité politique. Son mandat s’annonce comme un test décisif pour l’avenir du conservatisme en Europe.