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Culture

Monetochka, une voix libre dans l’exil

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L’artiste russe en exil incarne la résistance culturelle face au pouvoir moscovite, transformant sa musique en message d’espoir pour ses compatriotes.

Depuis son départ de Russie en 2022, la chanteuse Monetochka a érigé sa création musicale en instrument de soutien à la diaspora russe et à tous ceux qui, dans leur pays, ne peuvent exprimer leur opposition au conflit en Ukraine. Âgée de vingt-sept ans, l’artiste originaire de Saint-Pétersbourg constate avec amertume les conditions de vie de la jeune génération confrontée à un environnement marqué par la violence et les tensions permanentes. Elle affirme devoir se tenir éloignée de ce qu’elle qualifie de folie destructrice tout en assistant ceux qui en sont devenus les otages.

Réfugiée en Lituanie, Monetochka a été inscrite par les autorités russes sur la liste des agents étrangers et fait l’objet d’un mandat d’arrêt. Cette situation complique considérablement l’organisation de ses déplacements professionnels, la privant au passage d’une part importante de ses revenus. La chanteuse doit désormais éviter soigneusement les États alignés sur Moscou et sélectionner avec précaution ses compagnies aériennes pour échapper à toute éventuelle extradition. Chaque vol nécessite désormais une validation préalable, comme elle l’a confié récemment dans les coulisses du Bataclan à Paris où elle se produisait devant une salle comble.

Malgré ces contraintes, sa carrière connaît un nouvel élan international. Sa tournée actuelle la mènera prochainement aux États-Unis, en Australie et au Japon. Son dernier album, publié cette année, sera suivi d’un nouvel opus en préparation. Avec le rappeur Noize MC, autre figure de la dissidence russe, elle a collecté plus de quatre cent mille euros au profit des réfugiés ukrainiens.

Les textes de Monetochka évoquent sans détour la réalité du front, à l’image de sa récente composition « Tu es un soldat » qui décrit l’univers des militaires empreint de sang et de cicatrices. Certaines de ses chansons, devenues virales sur les réseaux sociaux où elle compte 3,6 millions d’abonnés, expriment la nostalgie d’une Russie d’avant-guerre. Curieusement, bien que la dissidence soit criminalisée en Russie, sa musique n’y est pas interdite et sa popularité aurait même augmenté depuis le début des hostilités.

L’artiste considère ses compositions comme un code secret permettant à son public russe de traverser ces périodes sombres. Elle observe que de nombreux spectateurs viennent spécialement de Russie pour assister à ses concerts, preuve selon elle que l’opposition à la guerre existe bel et bien dans son pays natal. Récemment, Alla Pugatcheva, icône de la pop russe et critique du Kremlin, a salué le travail de Monetochka, la qualifiant d’artiste intelligente et passionnante. Un encouragement particulièrement significatif pour la jeune chanteuse qui voit dans cette reconnaissance une forme de légitimation.

Monetochka reconnaît qu’elle aurait souhaité agir différemment si elle avait mesuré plus tôt l’imminence du conflit. Ses démêlés avec le pouvoir remontent cependant à avant la guerre, lorsqu’elle avait exprimé son soutien à la communauté LGBT. Consciente de la chance d’avoir pu quitter le pays, elle pense à ceux de ses confrères réduits au silence sous la pression exercée sur leurs proches. Mère de deux enfants nés en exil, elle invite aujourd’hui son public à préserver le bonheur simple face à l’adversité, questionnant la valeur de l’héroïsme lorsqu’il se fait au détriment des joies humaines fondamentales.

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