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Les Rohingyas risquent les coups, l’extorsion, la mort pour échapper à l' »enfer »

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Les rickshaws se faufilent discrètement hors du plus grand camp de réfugiés au monde entouré de barbelés. C’est le point de départ d’un vaste réseau de trafic d’êtres humains à travers l’Asie impliquant des extorsions en haute mer, des policiers corrompus et des barons de la drogue.

Dans ces rickshaws pétaradants se cachent des hommes, des femmes et des enfants rohingyas qui risquent tout pour échapper à la vie de misère de cette minorité musulmane issue de Birmanie entassée dans le vaste bidonville qu’est le camp de Cox’s Bazar sur la côte sud du Bangladesh.

Au début de l’année, Enamul Hasan, 19 ans, s’est caché à bord de l’un de ces petits véhicules qui l’a amené sur la côte. Il a ensuite pris une embarcation, qui l’a transféré dans un bateau de pêche plus gros ancré dans la Baie du Bengale où il a retrouvé des centaines d’autres Rohingyas espérant rejoindre la Malaisie.

Toutes ses économies y sont passées. Des passeurs « m’ont assuré que je pourrais terminer mes études et gagner de l’argent pour sortir ma famille de la pauvreté », raconte-t-il à l’AFP.

Au lieu de cela, après avoir subi les coups de l’équipage, vu nombre de ses compagnons de voyage mourir pendant six semaines en mer, le bateau l’a ramené à son point de départ au Bangladesh et à sa maison misérable.

« Je n’oublierai jamais ce que j’ai vécu. Les trafiquants, la brutalité des marins, (…) je ne referai plus jamais ça ».

L’AFP a interrogé Enamul Hasan au cours d’une enquête sur ces réseaux de passeurs au cours de laquelle ont été réalisées des dizaines d’entretiens avec des réfugiés au Bangladesh et en Indonésie, où plusieurs centaines d’entre eux ont débarqué cette année après des mois en mer. Des pêcheurs impliqués dans ce trafic, des policiers, des responsables politiques locaux et des humanitaires ont également été interviewés.

Cette enquête a révélé un système sophistiqué et toujours évolutif pesant plusieurs millions de dollars et dans lequel des membres de la communauté rohingya jouent un rôle clé.

Dans les camps, au Bangladesh ou en Indonésie, le trafic est organisé essentiellement par des Rohingyas, petits intermédiaires réfugiés ou chefs de gangs, et en mer les bateaux sont souvent pilotés par des équipages de Birmans bouddhistes, des pêcheurs indonésiens aussi.

Le réseau mobilise des chalutiers battant pavillon thaïlandais pouvant transporter un millier de personnes, des téléphones satellite, une armada de petits bateaux ravitailleurs et des responsables corrompus à travers l’Asie du Sud-Est et jusque dans le camp bangladais.

« C’est un gros business sous couvert de motifs humanitaires », explique Iskandar Dewantara, co-fondateur de la Fondation Geutanyoe, un groupe de défense indonésien des réfugiés.

En réalité, la violence est omniprésente.

L’équipage souvent birman des bateaux, qui a peu d’estime pour les Rohingyas, fait tout pour en tirer un maximum d’argent, des coups à bord aux menaces de mort à l’arrivée si leurs proches refusent de payer plus que prévu.

Enamul Hasan a fourni à l’AFP une vidéo filmée sur un smartphone qui appartenait à l’un des membres de l’équipage birman et montre comment les réfugiés sont battus à bord.

Sur ces images, un trafiquant frappe des hommes torses nus avec ce qui apparaît comme un fouet sous le regard d’enfants amaigris et de femmes entassés sur le pont.

Le marin qui détenait ce téléphone l’a laissé quand il a abandonné le navire, selon le jeune Rohingya.

Fiancées

La minorité musulmane rohingya est persécutée depuis des décennies en Birmanie, pays en majorité bouddhiste, qui ne leur donne pas la citoyenneté. Ces réseaux qui permettent leur fuite par la terre ou la mer existent depuis longtemps.

La répression de l’armée birmane en 2017, qui a donné lieu à des exactions qualifiées de génocide par l’ONU, a poussé quelque 750.000 Rohingyas à fuir vers le Bangladesh voisin. Ils se sont établis dans le gigantesque camp de Cox’s Bazar, d’où Enamul Hasan a voulu fuir.

Sur 28 km2, un million de réfugiés y survivent pour la plupart grâce à l’aide humanitaire dans des maisons de tôle et de bambous alignées à perte de vue où ils sont soumis à la chaleur l’été, au froid l’hiver, aux inondations et aux glissements de terrain à la saison des pluies.

C’est en Malaisie, pays musulman relativement riche, qu’ils veulent pour la plupart se rendre. Quelque 100.000 Rohingyas y vivent aujourd’hui en marge de la société et travaillent illégalement dans la construction où d’autres secteurs en demande de main d’oeuvre bon marché.

L’un des principaux moteurs du trafic à présent sont les hommes rohingyas de Malaisie qui payent les passeurs pour faire venir leur famille ou leur épouse après un mariage arrangé, selon les ONG et les témoignages de plusieurs femmes.

Cette année, les autorités malaisiennes ont repoussé la plupart de ces navires, refusant d’accueillir de nouveaux réfugiés de peur d’une contamination par le coronavirus.

Quelque 500 Rohingyas sont parvenus tout de même en Malaisie en 2020 après trois débarquements, selon un comptage de l’AFP.

Depuis juin, 400 Rohingyas environ ont accosté au nord de l’Indonésie faute de pouvoir rejoindre la Malaisie, ce qui représente la plus grosse vague d’arrivées dans ce pays depuis cinq ans.

Mais plusieurs centaines de réfugiés sont morts en mer, de faim, de soif ou à la suite de mauvais traitements, selon le Haut-commissariat des Nations unies aux réfugiés (HCR).

Et cette année, une grande partie des réfugiés arrivés en Indonésie sont des femmes.

Parmi elles, Janu, 18 ans, a raconté que sa famille avait organisé son mariage avec un Rohingya travaillant en Malaisie.

« Cela faisait deux ans que j’attendais dans le camp, ça valait la peine de prendre le risque » pour tenter de le rejoindre, dit-elle à l’AFP, au camp de Lhokseumawe, dans la province d’Aceh, où elle a été débarquée en tentant de rejoindre son mari. Elle espère toujours arriver à passer.

S’échapper des camps

Pour s’échapper des camps du Bangladesh, il faut un acompte qui peut atteindre l’équivalent de 2.000 dollars, souvent versé par le mari d’une réfugiée ou un proche en Malaisie, via une application bancaire mobile.

Puis les candidats au voyage reçoivent l’appel d’un inconnu.

« On m’a appelée au bout de quelques jours et un homme nous a demandé d’aller à l’arrêt des rickshaws dans le principal marché du camp », raconte Julekha Begum, 20 ans, qui a épousé un Rohingya de Malaisie par vidéoconférence.

Les conducteurs de rickshaws sont souvent embauchés par les trafiquants pour faire passer aux réfugiés les postes de contrôle avec un pot-de-vin.

Au bout de quelques heures de route, ils rejoignent l’un des points de la côte où des milliers de bateaux de pêche se rassemblent avant de prendre la mer de nuit.

Les Rohingyas attendent que l’une de ces embarcations se remplisse, avant d’être transportés dans des bateaux beaucoup plus gros en haute mer, parfois des chalutiers de deux étages capables de contenir plus de 1.000 passagers.

Ces gros navires sont équipés de GPS, de téléphones mobiles, avec des  réserves de nourriture et d’eau, régulièrement réapprovisionnées par de petits bateaux une fois partis pour la Malaisie.

« Beaucoup de bateaux de pêche emmènent actuellement des gens en haute mer où de gros bateaux attendent les victimes » de ces trafics, décrit un commandant de police du camp de Cox’s Bazar, Hemayetul Islam.

Mais, dit-il, « quand on va inspecter ces bateaux, on voit des filets et du matériel de pêche. C’est très dur pour nous de faire la différence entre les vrais pêcheurs et les passeurs ».

Les réfugiés rohingyas interrogés par l’AFP disent avoir reçu, avant de tenter la traversée, la promesse d’arriver en Malaisie au bout d’une semaine. En réalité, leur voyage a pris des mois, pour ceux qui sont arrivés à bon port.

Des réfugiés arrivés en Indonésie ont raconté avoir été battus, torturés, nourris de rations permettant à peine de survivre pendant le voyage et ensuite avoir été retenus en otages pour soutirer plus d’argent à leurs proches.

Selon plusieurs témoignages, des réfugiés sont restés prisonniers à bord de gros bateaux au large de la Malaisie avant d’être transférés dans de plus petites embarcations, pour débarquer seulement si une rançon avait été payée.

Les trafiquants « battent les gens si leurs proches ne payent pas ou ne peuvent pas payer plus », décrit Asmot Ullah, un jeune homme de 21 ans qui a débarqué en septembre à Lhokseumawe en Indonésie.

Un autre, Mohammad Nizam, témoigne avoir été empêché de rejoindre un petit bateau faute de pouvoir verser plus. « Ils demandaient plus d’argent que ce qui avait été convenu, mais mes parents ne pouvaient pas payer », explique le jeune homme de 25 ans. Mais « si on payait plus on vous emmenait en Malaisie. »

Selon les autorités, un bateau d’un millier de passagers clandestins peut rapporter jusqu’à trois millions de dollars aux trafiquants.

Faux « sauvetage »

C’était en juin. Les pêcheurs indonésiens ont d’abord affirmé avoir porté secours au premier bateau qui transportait une centaine de Rohingyas cette année.

Mais ce soit-disant « sauvetage » était en fait une opération organisée par les passeurs, pour contourner les contrôles stricts en Malaisie, ont indiqué ensuite les autorités indonésiennes et les pêcheurs.

« Cette histoire selon laquelle les pêcheurs avaient trouvé (les réfugiés) après que leur bateau s’est renversé est inventée », explique le directeur de la police criminelle d’Aceh, Sony Sanjaya.

« Mais ils ne sont pas arrivés ici par hasard. »

Une fois en Indonésie, les passeurs espèrent emmener clandestinement les Rohingyas en Malaisie via le détroit qui sépare les deux pays, selon les autorités locales. Dans les faits, la plupart restent bloqués dans le camp de Lhokseumawe.

Trois pêcheurs de cette localité ont été arrêtés en octobre avec plusieurs autres passeurs après le débarquement de juin.

Interrogé par l’AFP dans la cellule où ils sont détenus à Aceh, ces hommes ont raconté avoir été recrutés par un Rohingya vivant en Indonésie – lui aussi arrêté – pour louer un bateau et aller récupérer une embarcation pleine de réfugiés.

Les passeurs ont fourni aux pêcheurs les coordonnées en mer des réfugiés et leur ont dit de montrer, comme signal, des paquets de cigarettes locales au clou de girofle, selon la police.

« J’avais un besoin désespéré d’argent et donc j’ai accepté ce job », dit Faisal, l’un des pêcheurs père de six enfants.

Compassion, appât du gain

Dans les camps du Bangladesh, c’est un mélange complexe de compassion, de désespoir et d’appât du gain qui motive ceux qui tirent les ficelles de ces réseaux clandestins de passeurs, en liens étroits avec le trafic de drogue.

La région est un haut lieu de fabrication du yaba, sorte de méthamphétamine bon marché, populaire chez les plus pauvres en Thaïlande comme ailleurs en Asie du Sud-Est.

L’AFP a parlé avec un Rohingya de 25 ans, né dans l’un des plus anciens camps et qui a commencé à travailler à l’âge de 14 ans pour l’un des chefs de gang de sa communauté.

« J’ai travaillé pour lui pendant deux ans et j’ai réussi à faire passer au moins 200 Rohingyas en Malaisie, loin de l’horreur de ces camps », explique Mohammed, qui ne souhaite être identifié que par son prénom. Trouver des candidats au voyage lui rapportait quelque 500 dollars par mois.

Les forces de sécurité bangladaises ont finalement abattu son patron et depuis il cherche un moyen de reprendre son activité d’intermédiaire pour bien gagner sa vie. « Je cherche une opportunité et sinon je recommencerai en utilisant mes propres contacts à l’étranger », assure-t-il.

Pour d’autres Rohingyas impliqués dans le trafic à Cox’s Bazar, c’est même un devoir moral.

« C’est de l’aide humanitaire, pas un crime », affirme Mohammad Taher, 34 ans, chargé d’organiser la fuite des réfugiés en rickshaw par les postes de contrôle et jusqu’aux première embarcations.

« Si quelqu’un veut sortir de cet enfer, en tant que grand-frère compatissant, je pense que c’est mon devoir de l’aider ».

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Présidentielle américaine : Joe Biden justifie pour la première fois les raisons de son retrait de la campagne

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Présidentielle américaine : Joe Biden justifie pour la première fois les raisons de son retrait de la campagne

Joe Biden s’est exprimé en direct mercredi 24 juillet depuis le Bureau ovale de la Maison-Blanche. Il a révélé les raisons de son retrait de la présidentielle américaine et loué les compétences de Kamala Harris, sa vice-présidente, qui devrait le remplacer en tant que candidate démocrate pour la présidentielle.

Mercredi 24 juillet au soir, Joe Biden s’est exprimé en direct depuis le Bureau ovale de la Maison-Blanche. C’était sa première prise de parole depuis l’annonce de son retrait de la campagne de la présidentielle américaine, dimanche 21 juillet. « Ce bureau est sacré pour moi, mais j’aime mon pays bien plus encore », a déclaré Joe Biden dans son allocution d’une dizaine de minutes.

Joe Biden a assuré à ses citoyens que cela a été « l’honneur de sa vie » de « vous servir en tant que président des États-Unis ». Il a expliqué qu’il s’est retiré de la campagne électorale au nom de « la défense de la démocratie qui est en jeu et, je pense, plus importante que n’importe quel titre ». Depuis plusieurs semaines, l’état de santé de Joe Biden était dans le viseur de l’opinion publique, le camp démocrate et Donald Trump qui ne loupait aucune occasion de se moquer des lapsus du président américain.

Pour Joe Biden, « mon bilan en tant que président, mon leadership dans le monde, ma vision de l’avenir de l’Amérique, tout cela méritait un second mandat », mais il a aussi martelé que « rien, rien ne peut nous empêcher de sauver notre démocratie, y compris l’ambition personnelle ». Il assurera sa fonction présidentielle jusqu’aux élections du mois de novembre. « Au cours des six prochains mois (…), je continuerai à réduire les coûts pour les familles qui travaillent dur et à développer notre économie. Je continuerai à défendre nos libertés individuelles et nos droits civils », a-t-il ainsi expliqué.

« J’ai donc décidé que la meilleure façon d’aller de l’avant est de passer le flambeau à une nouvelle génération. C’est le meilleur moyen d’unifier notre nation », a ajouté Joe Biden. Il a aussi expliqué que « ces dernières semaines, il m’est apparu clairement que je devais unir mon parti » et qu’il était temps « d’avoir de nouvelles voix (…), des voix plus jeunes ».

Kamala Harris, la vice-présidente de Joe Biden, est en bonne position pour devenir la candidate officielle du camp démocrate pour cette élection. Elle est « expérimentée, elle est forte, elle est compétente », a confié Joe Biden dans son allocution. Et d’ajouter : « elle a été une partenaire incroyable pour moi, une dirigeante pour notre pays. Maintenant, c’est à vous, le peuple américain, de choisir ».

Si Kamala Harris est la favorite et pour le moment la seule candidate qui a postulé pour remplacer Joe Biden, il faudra attendre le vote des délégués démocrates pour l’affirmer. Ils doivent voter entre le 1er et le 7 août. Kamala Harris poursuit donc sa campagne pour l’investiture du camp démocrate.

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Gaza: 70 Palestiniens tués à Khan Younès selon le Hamas, des milliers fuient

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Gaza: 70 Palestiniens tués à Khan Younès selon le Hamas, des milliers fuient

Le ministère de la Santé du Hamas a annoncé lundi que 70 Palestiniens avaient été tués dans des opérations israéliennes à Khan Younès dans le sud de la bande de Gaza, d’où des milliers de personnes ont fui dans la panique après un ordre d’évacuation militaire.

Alors que la guerre entre Israël et le Hamas palestinien ne connaît pas de répit, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu est arrivé lundi à Washington où il doit prononcer mercredi un discours devant le Congrès. Il doit également rencontrer Joe Biden jeudi, a indiqué un haut responsable américain. Le président des États-Unis s’est engagé lundi à « continuer à travailler pour mettre fin à la guerre à Gaza ». Sa vice-présidente Kamala Harris, pressentie pour obtenir l’investiture du Parti démocrate à la présidentielle de novembre, rencontrera elle aussi Benjamin Netanyahu « cette semaine » à Washington, selon ses services.

En quittant Israël lundi, le Premier ministre israélien a estimé que sa visite était « très importante » à un moment de « grande incertitude politique », après la décision de Joe Biden de ne pas se représenter à l’élection de novembre. Principal allié et soutien militaire d’Israël, l’administration Biden s’était agacée ces derniers mois des conséquences de la riposte israélienne à l’attaque menée le 7 octobre en Israël par le Hamas palestinien, qui a déclenché la guerre à Gaza, insistant sur la protection des civils et l’entrée de l’aide humanitaire.

Dans la bande de Gaza, dévastée et assiégée par Israël depuis plus de neuf mois, l’offensive israélienne se poursuit contre le mouvement islamiste Hamas et d’autres groupes palestiniens, notamment dans des régions dont l’armée avait annoncé auparavant avoir repris le contrôle. Au moins 70 Palestiniens ont été tués et plus de 200 blessés dans des « attaques de l’occupation israélienne dans le gouvernorat de Khan Younès depuis ce matin et jusqu’à maintenant », a indiqué le ministère de la Santé du gouvernement dirigé par le Hamas, au pouvoir à Gaza depuis 2007.

Contactée, l’armée n’a pas réagi dans l’immédiat. Mais dans un communiqué, elle a affirmé que son aviation et ses chars « avaient bombardé et éliminé des terroristes dans la région ». Devant l’hôpital Nasser de Khan Younès où morts et blessés ont été transportés, des scènes déchirantes ont lieu sous le regard impuissant des soignants: un homme brandit le cadavre d’un bébé en hurlant, une femme effondrée sous le chagrin se frappe la tête, des gens couverts de sang au regard hagard.

L’armée s’était retirée début avril de Khan Younès, la plus grande ville du sud du territoire palestinien, en disant y avoir achevé après des mois de bombardements intenses et de combats, ses opérations contre le Hamas, considéré comme terroriste par les États-Unis, l’Union européenne et Israël. Mais plus tôt lundi, elle a ordonné à la population de quitter à nouveau l’est de Khan Younès, en disant préparer une « opération contre les organisations terroristes » après des tirs de roquettes en direction d’Israël à partir de la zone.

« Nous étions heureux de préparer le petit-déjeuner », et soudain « les obus tombent, puis les tracts d’avertissement », raconte Hassan Qoudayh, qui a dû fuir avec sa famille comme des milliers d’autres personnes qui sont parties dans la panique. « Il y avait des martyrs dans les rues. Gaza est finie, Gaza est morte. Il ne reste rien, rien. Assez! », a-t-il lancé. Déplacé pour la quatrième fois, Youssef Abou Taimah n’en peut plus. « Nous allons vivre dans la rue! On est épuisés, on n’en peut plus de ces déplacements ».

Lundi soir, des frappes israéliennes dans le nord de la bande de Gaza ont fait 12 morts dans la ville de Gaza et quatre dans le camp de Jabalia, selon le porte-parole officiel de la défense civile dans la bande de Gaza. Le 7 octobre, des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d’Israël ont mené une attaque sanglante qui a entraîné la mort de 1.197 personnes, en majorité des civils, selon un décompte établi à partir de données officielles israéliennes. Sur 251 personnes alors enlevées, 116 sont toujours retenues à Gaza, dont 44 sont mortes, selon l’armée.

En riposte, Israël a lancé une offensive de grande envergure aérienne puis terrestre dans Gaza, qui a fait plus de 39.000 morts, en majorité des civils, selon des données du ministère de la Santé du gouvernement de Gaza, dirigé par le Hamas. Avec le Qatar et l’Égypte, Washington tente de relancer les négociations pour un cessez-le-feu à Gaza associé à une libération d’otages. Une délégation israélienne est attendue jeudi à Doha, selon une source proche des pourparlers.

En soutien aux Palestiniens de la bande de Gaza en proie à un désastre humanitaire et menacée de famine selon l’ONU, les rebelles houthis au Yémen et le Hezbollah libanais, des alliés du Hamas et de l’Iran, ennemi juré d’Israël, ont ouvert des fronts contre ce dernier pays. Samedi, au lendemain d’une attaque de drone meurtrière des Houthis contre Tel-Aviv, Israël a bombardé le port stratégique de Hodeida dans l’ouest du Yémen tenu par les rebelles, faisant six morts.

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États-Unis : Joe Biden annonce le retrait de sa candidature

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États-Unis : Joe Biden annonce le retrait de sa candidature

Coup de tonnerre sur la Maison Blanche: Joe Biden a annoncé dimanche renoncer à briguer un second mandat, sa vice-présidente Kamala Harris se disant prête à le remplacer pour « battre Trump » dans une campagne démocrate désormais plongée dans l’inconnu.

Après des semaines d’incertitudes, fragilisé par les doutes sur son acuité mentale, le président américain de 81 ans a annoncé jeter l’éponge très tard dans la campagne, à un mois de la convention qui aurait dû l’introniser candidat. « Je pense qu’il est dans l’intérêt de mon parti et du pays que je me retire et que je me concentre uniquement sur l’exercice de mes fonctions de président jusqu’à la fin de mon mandat », a déclaré M. Biden dans un communiqué. « Aujourd’hui je veux apporter mon soutien total et mon appui à Kamala pour être la candidate de notre parti cette année », a-t-il ajouté sur le réseau social X depuis sa villa balnéaire où il était confiné après avoir contracté le Covid.

Cette annonce choc, attendue malgré les dénégations répétées du principal intéressé, bouleverse une campagne qui a déjà connu de nombreux rebondissements, au premier rang desquels la tentative d’assassinat de Donald Trump le 13 juillet. Kamala Harris, première Afro-Américaine à avoir accédé à la vice-présidence, s’est déclarée dans la foulée prête à « remporter l’investiture » démocrate en vue de « battre Donald Trump ». Âgée de 59 ans, elle affiche une image de jeunesse face à Donald Trump, 78 ans, qui est sorti cette semaine renforcé de la convention d’investiture qui a vu le Parti républicain se mettre en ordre de marche derrière sa candidature.

Un événement qui bouleverse la stratégie du républicain. « Nous devons tout recommencer » a-t-il écrit sur son réseau social, taclant au passage Kamala Harris, qui sera « encore pire » que Joe Biden. Joe Biden a de son côté annoncé qu’il s’adresserait à la nation « plus tard cette semaine ». À New York, la nouvelle n’a pas fait l’unanimité auprès des électeurs. « C’était la bonne chose à faire pour lui », a réagi Gay Joseph. « Il a été poussé par le parti à quitter la course. Je n’étais pas d’accord », estime pour sa part Joanie Daidon, une autre habitante.

Se faisant l’écho des grandes figures de son parti, le chef républicain de la Chambre des représentants Mike Johnson a appelé le président démocrate à « démissionner immédiatement ». Côté démocrate, où la pression sur le président n’a cessé de monter ces dernières semaines, les louanges continuent d’affluer, l’influent chef des démocrates au Sénat Chuck Schumer saluant par exemple un « grand patriote ». Autre ténor démocrate, Nancy Pelosi, ancienne présidente de la Chambre américaine des représentants, a elle loué « l’un des présidents les plus importants de l’histoire américaine ».

Lors de la convention du Parti démocrate, mi-août à Chicago, le choix de Kamala Harris semble aujourd’hui très possible mais ne sera pas automatique pour autant. Elle a déjà reçu un autre appui de poids, l’ancien président Bill Clinton et son épouse Hillary Clinton, ancienne secrétaire d’État, ayant annoncé dimanche leur soutien à Kamala Harris. Très vite, d’autres personnalités du parti démocrate ont annoncé qu’ils la soutenaient, parmi eux: l’ex-secrétaire d’État Américain, John Kerry, la figure de la gauche américaine, Alexandria Ocasio-Cortez et le gouverneur de Californie, Gavin Newsom, qui était vu comme un possible rival.

Mais l’ex-président Barack Obama, l’une des personnalités démocrates les plus influentes, s’est contenté d’exprimer sa « confiance » dans son parti pour instaurer « un processus qui permettra l’émergence d’un candidat exceptionnel », sans mentionner Kamala Harris. Tout en estimant que Joe Biden était « convaincu que c’était la bonne (décision) pour l’Amérique », Barack Obama a mis en garde les démocrates qui vont « naviguer en terrain inconnu dans les jours à venir ».

Le dernier mot revient aux délégués du Parti démocrate, 3.900 personnes au profil très varié et pour la plupart complètement inconnues du grand public. Le processus de sélection sera « transparent et discipliné », a d’ailleurs promis dans un communiqué le chef du Parti démocrate Jaime Harrison. Le choix de Joe Biden a été salué par plusieurs dirigeants de pays alliés, de l’Australie à Israël, la Russie se disant elle « attentive » à la situation.

C’est la performance calamiteuse de Joe Biden lors de son débat le 27 juin avec Donald Trump qui a précipité les événements. Ce jour-là, c’est un président très affaibli qui est apparu devant les écrans de ses partisans consternés, ne parvenant parfois pas à finir ses phrases. Un spectacle douloureux qui a fait exploser au grand jour les doutes sur son âge, sur lesquels ses proches avaient tenté de maintenir un couvercle. Qui allait être le premier à dégainer pour lui demander d’arrêter là? Des élus démocrates relativement peu connus ont commencé jusqu’à atteindre des poids lourds du parti.

L’un après l’autre, craignant une victoire écrasante de Donald Trump, l’ont lâché, pour la plupart d’abord en privé. Les médias américains, citant des sources anonymes, ont ainsi affirmé que Barack Obama, Nancy Pelosi ou encore Chuck Schumer avaient fait part de leur inquiétude. Et les images d’un Joe Biden récemment testé positif au Covid-19, peinant à descendre la passerelle de son avion, n’ont fait qu’amplifier la nervosité de son camp. Pendant ce temps, Donald Trump, qui a miraculeusement échappé à des tirs pendant un meeting de campagne, semblait, lui, vivre un état de grâce, avec des victoires judiciaires et une consécration lors de la convention du Parti républicain.

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