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Culture

Les grandes chansons francophones : « Amsterdam » Jacques Brel

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 » Amsterdam  » Jacques Brel ( 1829 / 1978).

Paris, 16 octobre 1964. Jacques Brel chante à l’Olympia. Ce soir-là, c’est la première et Jacques se sent particulièrement fébrile. En effet, le concert est enregistré pour une diffusion sur une radio nationale.  Les chansons ont été choisies avec le plus grand soin, et Brel décide d’offrir au public un tout nouveau titre. Il n’apprécie guère cette œuvre, mais il pense qu’elle permettra aux musiciens de se mettre en place, et chauffera sa voix. Pourtant, le morceau a de quoi séduire le public,  la mélodie lui a été inspirée par Greensleeves, un air célèbre traditionnel anglais datant du 16 ième siècle. Brel y ajoute des paroles décrivant le quotidien décadent de marins en escale. Mais Brel ne trouve pas sa chanson assez aboutie. Voilà pourquoi il la place en début de concert. C’est donc sans conviction qu’il s’avance vers le micro. Sur quelques notes d’accordéon, il entame : « Dans le port d’Amsterdam… » Le tempo est d’abord lent, l’interprétation contenue et la voix grave. Dans la salle, les souffles sont retenus.

C’est alors que le chanteur belge embarque le public dans une énorme progression dont il a le secret : le rythme s’emballe et les notes s’envolent. Brel chante et surjoue le désespoir d’un bougre enviant ces hommes « pleins de bière et de drame », insensibles aux chagrins d’amour. Forçant sur sa voix, il termine en apothéose son interprétation titanesque. Galvanisé, le public exulte les spectateurs bouleversés sont debout et applaudissent à tout rompre…le destin d’Amsterdam est scellé. Malgré ce triomphe, Brel ne sera jamais convaincu par sa chanson. Au point qu’il refusera toujours de l’enregistrer en studio ! Heureusement, la captation du concert de l’Olympia en 1964 en laisse une précieuse trace, un diamant à l’état brut.

Jacques Brel : C’est en Belgique, près de Bruxelles à Schaerbeek, que naît le 8 avril 1929, la personnalité la plus volcanique de la chanson francophone, Jacques Romain Georges Brel. Son père, Romain, dirige une usine d’emballage. Avec son frère, Pierre, de 6 ans son aîné, Jacques connaît une éducation austère entre collège catholique et scoutisme. À 16 ans, il crée une troupe de théâtre avec quelques copains et écrit lui-même des pièces.

À 18 ans, devant ses échecs scolaires, son père le fait entrer dans l’entreprise familiale. À la même époque, il s’inscrit à « La Franche Cordée », mouvement philanthropique, dont il deviendra le président en 49. Au sein de cette association, il monte de nombreuses pièces de théâtre dont « Le Petit Prince de Saint-Exupéry ». Il y rencontre également, sa future épouse, Thérèse Michielsen, dite Miche. Brel, qui n’a aucun goût pour le travail de bureau, est déjà très attiré par la chanson. Dès 1952, il compose quelques titres qu’il chante dans le cadre familial ou lors de soirées dans des cabarets de Bruxelles, mais la force des textes et la violence de son interprétation sont mal acceptées par son entourage qui ne l’encourage pas du tout.

C’est en 1956 que Jacques Brel rencontre François Rauber, pianiste classique, qui devient son accompagnateur. François Rauber, qui comprend très bien l’univers de Brel, va donner au chanteur la formation musicale qu’il n’a pas, puis devenir l’orchestrateur privilégié de toutes ses chansons.

Puis, Jacques Brel rencontre également un autre pianiste, Gérard Jouannest, qui sera son accompagnateur exclusif sur scène, contrairement à François Rauber avec qui il travaillera plutôt en studio. En outre, Brel et Gérard Jouannest écriront ensemble une grande partie du répertoire du chanteur (« Madeleine », « La chanson des vieux amants », « Les vieux »).

À la suite de ces succès, Jacques Brel reprend les tournées à travers le monde et son rythme de vie ne cesse de s’accélérer. Cependant, dès cette époque, Jacques Brel évoque déjà l’idée d’arrêter la chanson.

En 1964, il obtient le Grand Prix national du Disque en France. Début 1965, Brel fête ses 12 ans de chansons au cabaret « Les Trois Baudets ». La fin de l’année est marquée par une tournée de cinq semaines en URSS, mais surtout par son passage sur la prestigieuse scène du Carnegie Hall de New York. La presse américaine parle d' »Ouragan magnétique ».

Il se consacre désormais presque exclusivement à la voile et en juillet 1974, Jacques Brel part avec Madly et sa fille France sur son voilier l’Askoy. Fin août, aux Açores, Brel apprend la mort de son fidèle ami, jojo. Il rentre pour les obsèques et reste pour le mariage de sa fille Chantal en septembre. En novembre, Jacques Brel est opéré à Bruxelles. Il souffre d’un cancer du poumon gauche déjà très avancé. Il sait qu’il n’a peut-être pas beaucoup de temps à vivre et déclare vouloir mourir seul.

En 1975, Jacques et Madly Bamy, rencontrée lors du spectacle  » l’Homme de la Mancha, s’installent aux îles Marquises, précisément sur l’île de Hiva-Oa. Alors, commence alors une autre vie. Brel achète un nouvel avion, il le transforme en avion-taxi pour aider les habitants des îles environnantes.

Le « galérien des galas » abandonne sa carrière au sommet de sa gloire en 1966. Le Grand Jacques enflammait les salles, habitait ses personnages, gesticulait, suait… Ses spectacles étaient de véritables marathons. Rarement un chanteur aura exprimé ses rages et ses passions avec autant de sincérité et de gravité que Jacques Brel.

En juillet 1978, Jacques Brel soudain au plus mal est transporté en France et est hospitalisé six semaines à Neuilly à la suite de la découverte d’une tumeur cancéreuse. Il finit l’été dans le sud de la France, mais le 7 octobre, il est ramené d’urgence à l’hôpital de Bobigny, dans la région parisienne. Il meurt le 9 octobre d’une embolie pulmonaire.

Pendant que d’innombrables hommages lui sont rendus en France, en Belgique et à travers le monde, son corps est ramené aux Marquises le 12 octobre. Il est enterré sur son île d’Hiva-Oa près de la tombe du peintre Paul Gauguin.

Rarement un chanteur aura exprimé ses rages et ses passions avec autant de sincérité et de gravité que Jacques Brel. Exubérant, mais pudique, Brel a forcé l’affection d’un public pourtant longtemps sévère à son égard.

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Télévision : C8, c’est fini ! La chaîne perd sa fréquence sur la TNT

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TV : C8, c'est fini ! La chaîne perd sa fréquence sur la TNT
©C8

C’est un tremblement de terre dans le monde de la télévision. C8, candidate à la reconduction de sa fréquence TNT, n’a pas obtenu gain de cause. L’Arcom a en effet décidé de la lui retirer pour 2025, tout comme celle de NRJ12.

La décision de l’Arcom, annoncée mercredi 24 juillet, marque une rupture significative pour C8, qui diffuse notamment l’émission populaire de Cyril Hanouna, TPMP. Cette chaîne, qui a été la plus sanctionnée de la télévision française, ne verra pas sa fréquence TNT renouvelée en 2025. NRJ12, également candidate à la reconduction de sa fréquence, subit le même sort.

En revanche, CNews, une autre chaîne du groupe Canal+ et propriété du milliardaire conservateur Vincent Bolloré, a été sélectionnée pour un renouvellement de sa fréquence. Malgré les nombreux rappels à l’ordre par l’Arcom, CNews conserve sa place sur la TNT.

Les décisions de l’Arcom ont également favorisé de nouveaux projets de chaînes. Le groupe Ouest-France et le milliardaire Daniel Kretinsky ont tous deux vu leurs propositions de chaînes présélectionnées pour des fréquences TNT en 2025. L’Arcom a justifié ses choix en se basant sur « l’intérêt de chaque projet pour le public au regard de l’impératif prioritaire de pluralisme des courants d’expression socio-culturels », selon le communiqué officiel.

Cette annonce marque un tournant pour le paysage audiovisuel français, avec une réorganisation des chaînes disponibles sur la TNT. Les téléspectateurs devront s’adapter à ces changements à partir de 2025, tandis que les groupes médiatiques concernés prépareront leur transition ou leur nouvelle stratégie pour maintenir leur présence sur le petit écran.

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France Inter: Adèle Van Reeth visée par une motion de défiance de la rédaction

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France Inter: Adèle Van Reeth visée par une motion de défiance de la rédaction

La directrice de France Inter, Adèle Van Reeth, est visée par une motion de défiance de la rédaction, au lendemain de l’annonce du remplacement de Yaël Goosz par Patrick Cohen comme éditorialiste politique de la matinale.

« C’est avec consternation et colère que nous avons appris par la presse que la direction de France Inter avait décidé de retirer l’éditorial politique du matin à Yaël Goosz » qui pourtant « a fourni un travail exemplaire, fiable, indépendant », explique ce texte. Yaël Goosz reste chef du service politique de France Inter mais devra laisser sa place à Patrick Cohen – qui avait présenté la matinale de 2010 à 2017 – pour l’édito politique de 07h44.

Dans cette motion, les signataires (80% des 95 journalistes de la rédaction) dénoncent une décision « d’une brutalité inouïe en termes de management ». « Ce n’est pas une motion contre Patrick Cohen », tient à préciser un journaliste signataire qui préfère rester anonyme, mais bien contre « un choix incompréhensible et des méthodes violentes » de la direction, la rédaction ayant selon lui appris la nouvelle « dans la presse » mercredi.

Selon France Inter mercredi, Yaël Goosz doit se voir proposer un autre créneau pour intervenir sur la grille, qui reste à déterminer. Les signataires de la lettre dénoncent « bien d’autres décisions incompréhensibles prises par la directrice de France Inter ces derniers mois » et l’impossibilité à « continuer à lui faire confiance pour diriger cette radio ».

Le licenciement de Guillaume Meurice pour « faute grave », après qu’il a répété à l’antenne ses propos polémiques sur le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, et « l’affaiblissement » puis l’arrêt de son émission à succès « Le grand dimanche soir », font partie de ces désaccords entre rédaction et direction, précise le journaliste sous couvert d’anonymat. Il déplore une « difficulté récurrente (de la direction) à dialoguer, entendre, écouter une rédaction qui fonctionne et qui donne des résultats ».

Jeudi, la direction n’a pas souhaité faire de commentaire. En dépit des turbulences, France Inter a largement conservé son statut de première radio du pays avec 6,85 millions d’auditeurs chaque jour d’avril à juin, selon les chiffres de Médiamétrie publiés mercredi.

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MeToo cinéma: le parquet requiert la mise en examen de Benoît Jacquot pour viols

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MeToo cinéma: le parquet requiert la mise en examen de Benoît Jacquot pour viols

Le mouvement #MeToo continue de secouer le cinéma français. Le parquet de Paris a requis la mise en examen de Benoît Jacquot pour viols et examine les accusations contre Jacques Doillon, marquant une nouvelle étape dans la lutte contre les violences sexuelles.

L’étau judiciaire se resserre dans une enquête-phare du #MeToo français visant deux cinéastes : le parquet de Paris a requis la mise en examen pour viols de Benoît Jacquot et réfléchit aux « suites à donner » aux accusations visant Jacques Doillon.

Les deux hommes, qui réfutent les accusations les visant, étaient en garde à vue depuis lundi à la brigade de protection des mineurs. Après y avoir passé une nouvelle nuit, Benoît Jacquot, 77 ans, est présenté mercredi à un juge d’instruction, qui doit trancher sur sa mise en examen ou non.

Le parquet a indiqué avoir demandé cette mise en examen pour « viol, agression sexuelle et violences, susceptibles d’avoir été commis entre 2013 et 2018 » au préjudice de l’actrice Julia Roy et pour « viol sur mineur par personne ayant autorité, viol par concubin, susceptibles d’avoir été commis entre 1998 et 2000, et en 2007 » au préjudice de l’actrice Isild Le Besco. Le ministère public a aussi requis son placement sous contrôle judiciaire.

L’avocate de Benoît Jacquot, Me Julia Minkowski, n’a pas souhaité commenter à ce stade. Lundi, elle avait déploré des « atteintes incessantes » à la présomption d’innocence de son client.

L’actrice Julia Roy, quarante-deux ans de moins que Benoît Jacquot et qui a joué dans quatre de ses films de 2016 à 2021, a évoqué « un contexte de violences et de contrainte morale qui a duré plusieurs années », dans sa plainte le visant et dénonçant des viols et des agressions sexuelles, selon une source proche du dossier.

La comédienne Isild Le Besco, aujourd’hui âgée de 41 ans, a tourné six films avec Benoît Jacquot qu’elle a rencontré quand elle avait 16 ans et l’accuse de violences sexuelles, psychologiques et physiques. « Je crois que Benoît n’est pas un homme qui souhaite faire du mal sciemment. Je ne le vois pas étrangler une femme par plaisir en pleine conscience, comme d’autres hommes le font. Benoît, c’est autre chose: il a cette volonté de pouvoir absolu, de contrôle », a-t-elle estimé dans un entretien mercredi au magazine Elle.

L’autre mis en cause, Jacques Doillon, a lui vu sa garde à vue levée mardi soir « pour des raisons médicales », a expliqué le parquet de Paris. Le réalisateur et producteur, 80 ans, a été relâché sans poursuites à ce stade, le ministère public devant encore définir « les modalités des suites à donner » le concernant. Son avocate, Me Marie Dosé, n’a pas souhaité réagir.

« Dans les deux procédures, les plaignantes qui ont dénoncé des faits qui ne figurent pas dans la prévention retenue seront contactées personnellement », a souligné le parquet.

L’enquête préliminaire a été déclenchée après la plainte déposée par une autre actrice, Judith Godrèche, contre les deux cinéastes, qui contestent les accusations. Âgée de 52 ans, l’actrice a accusé publiquement début février Benoît Jacquot de viols puis Jacques Doillon d’agression sexuelle, déclenchant une nouvelle tempête dans le cinéma français, jusqu’à ébranler la cérémonie des César ou le Festival de Cannes.

« Nous prenons acte du défèrement de Benoît Jacquot devant un juge d’instruction pour des faits de même nature que ceux commis à l’encontre de Judith Godrèche dont les faits sont, pour ce qui la concerne, prescrits », a réagi le conseil de l’actrice, Me Laure Heinich.

« Ces plaintes sont non prescrites. La période que j’ai dénoncée est prescrite. Mais je me sens entendue à travers cette décision », a abondé Judith Godrèche dans une publication sur Instagram. « Rien ne s’efface. Rien n’est réparé. Que la loi s’empare de celui qui faisait sa loi sur nous », a-t-elle insisté. « J’apprends également que le parquet n’a pas encore pris de décision concernant Jacques Doillon. Toutes ses victimes et moi-même retenons notre souffle. Notre espoir persiste. »

Une commission d’enquête sur les violences sexuelles dans le cinéma, l’audiovisuel, le spectacle vivant, la mode et la publicité a débuté ses travaux en mai, stoppés net après la dissolution le 9 juin de l’Assemblée nationale.

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