Face aux tensions géopolitiques, le gouvernement réunit acteurs économiques et industriels pour accélérer le réarmement national.
Jeudi, une réunion stratégique s’est tenue à Bercy, rassemblant des représentants du secteur financier et des entreprises de défense. L’objectif est clair : trouver des solutions pour financer et renforcer l’industrie militaire française, dans un contexte international marqué par la menace russe et les incertitudes liées au soutien américain à l’Ukraine. Cette initiative fait suite à l’appel lancé par Emmanuel Macron le 5 mars dernier, insistant sur la nécessité d’accélérer l’effort de défense national.
La base industrielle et technologique de défense (BITD) française, composée de neuf grands groupes comme Dassault Aviation, Safran ou Thales, ainsi que de 4 000 PME et ETI, dont 1 000 sont considérées comme stratégiques, a besoin de fonds supplémentaires. Les estimations gouvernementales évoquent un besoin compris entre un et trois milliards d’euros. Les investisseurs présents à cette réunion pourraient s’engager à soutenir ces entreprises, notamment via des prises de participation en Bourse, permettant ainsi de renforcer leur stabilité financière et leur capacité à emprunter.
La question de la consolidation du secteur a également été abordée, avec l’idée de rapprocher les activités de certains groupes pour gagner en efficacité. Amélie de Montchalin, ministre des Comptes publics, a souligné la nécessité de renforcer les collaborations européennes, plutôt que de maintenir une fragmentation des entreprises.
Cependant, le secteur financier reste souvent réticent à investir dans la défense, en raison des critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) qui guident leurs décisions. Une évolution de ces critères pourrait être annoncée, comme l’a suggéré Stéphane Boujnah, patron d’Euronext, en proposant de redéfinir l’ESG comme « Énergie, Sécurité et Géostratégie ».
Les assureurs et les banques françaises se sont déjà engagés à soutenir cet effort. France Assureurs a affirmé que ses membres étaient prêts à contribuer au réarmement, tandis que la Fédération bancaire française (FBF) a rappelé que ses membres investissaient déjà 37 milliards d’euros dans le secteur.
En parallèle, le gouvernement explore des pistes pour orienter une partie de l’épargne des particuliers vers la défense, de manière volontaire. Cette réunion marque ainsi un « point de départ » pour un dialogue plus large sur le financement de la défense, avec la participation active de Bpifrance et de la Caisse des Dépôts.
Cette mobilisation s’inscrit dans une semaine dédiée à l’effort de défense, avec des visites sur des sites industriels clés, comme l’usine Eurenco à Bergerac ou celle de KNDS à Bourges. L’Union européenne, de son côté, a lancé un vaste plan de réarmement doté de 800 milliards d’euros, visant à renforcer la sécurité du continent d’ici 2030.
Cette initiative témoigne d’une prise de conscience collective des enjeux stratégiques actuels, où la défense nationale devient une priorité partagée entre l’État, les industriels et les financiers.