Un drame conjugal qui a choqué la France. Le procès de l’ex-mari de Chahinez Daoud, brûlée vive en 2021, s’ouvre aux assises de Gironde, révélant des failles systémiques dans la protection des victimes de violences.
Le procès de Mounir Boutaa, accusé d’avoir assassiné son ex-épouse Chahinez Daoud en la brûlante vive en mai 2021 à Mérignac, près de Bordeaux, s’est ouvert devant la cour d’assises de Gironde. Ce crime atroce, qui avait profondément ému l’opinion publique, met en lumière les défaillances des institutions chargées de protéger les victimes de violences conjugales.
Mounir Boutaa, âgé de 48 ans, avait déjà un lourd passé judiciaire. Condamné pour des actes de violence sur une précédente compagne, il avait été libéré de prison fin 2020 après une peine pour strangulation et menaces avec une arme blanche sur Chahinez. Malgré une interdiction de la contacter, leur relation avait repris jusqu’en mars 2021, date à laquelle Chahinez avait déposé une nouvelle plainte. Cette plainte, mal enregistrée par un policier lui-même condamné pour violences conjugales, n’avait pas permis de mettre en place les mesures de protection nécessaires, comme un téléphone grave danger ou un bracelet anti-rapprochement.
Le 4 mai 2021, après deux mois de harcèlement et de surveillance, Mounir Boutaa a commis l’irréparable. Il a attendu près du domicile familial dans un fourgon aménagé pour observer discrètement, avant de tirer sur Chahinez avec un fusil, de l’asperger d’essence et de mettre le feu. Les cris de la victime ont alerté un voisin, mais son intervention n’a pu empêcher le drame. Le corps de Chahinez a été retrouvé presque entièrement carbonisé.
Lors de son audition, Mounir Boutaa a reconnu avoir voulu « la cramer » pour « la punir » et « lui faire la peur de sa vie », tout en niant toute intention de la tuer. Ses avocates ont plaidé l’altération de son discernement, s’appuyant sur les conclusions des experts psychiatres. Cependant, pour l’avocat des parties civiles, Me Julien Plouton, il s’agissait d’un acte prémédité visant à « annihiler » Chahinez, une manière de la châtier pour ce qu’il considérait comme une injustice.
Le drame a également révélé des dysfonctionnements institutionnels. Une enquête administrative a pointé des erreurs dans le suivi de Mounir Boutaa après sa libération, ainsi que des manquements dans la gestion de la plainte déposée par Chahinez. Cinq fonctionnaires de police ont été sanctionnés, dont le directeur de la police en Gironde et le commissaire de Mérignac, pour ne pas avoir signalé les antécédents du policier ayant mal enregistré la plainte.
La famille de Chahinez, originaire d’Algérie, a souligné l’isolement dans lequel elle se trouvait en France, loin de sa protection familiale. Après sa mort, ses parents sont venus s’occuper de ses trois enfants, aujourd’hui âgés de 16, 11 et 8 ans. Une procédure pour « faute lourde » a été engagée contre l’État, parallèlement au procès pénal.
Ce procès, qui se déroule jusqu’au 29 mars, est l’occasion de rappeler l’importance d’une réponse efficace et coordonnée face aux violences conjugales, afin d’éviter que de tels drames ne se reproduisent.