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La Guadeloupe face à la banalisation des armes à feu

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Le quotidien des Antilles françaises est désormais marqué par une prolifération inquiétante des armes à feu, transformant des conflits mineurs en drames et instillant un sentiment d’insécurité profond parmi la population.

Le meurtre de son frère, Jessy, abattu en pleine journée pour une banale rivalité sentimentale, n’a pas entièrement surpris Lynsey Belveder. Cette habitante de Pointe-à-Pitre évoque une réalité devenue malheureusement commune. Elle décrit une société où la présence d’armes parmi la jeunesse est si répandue qu’elle remet en question son désir de fonder une famille. Son témoignage reflète une angoisse partagée par de nombreuses familles, où une sirène ou une simple ressemblance suffit à réveiller l’anxiété.

Les chiffres officiels confirment cette inquiétante tendance. Sur le ressort de la cour d’appel de Basse-Terre, qui inclut la Guadeloupe et Saint-Martin, au moins cinquante et un homicides ont été enregistrés cette année. La très grande majorité de ces actes ont été commis à l’aide d’une arme à feu. Les autorités estiment à quarante mille le nombre d’armes en circulation sur le territoire, soit une arme pour dix habitants environ. Ce chiffre illustre une diffusion préoccupante dans un archipel où le taux d’homicides dépasse de six fois la moyenne nationale.

Les services de police et de gendarmerie observent une évolution notable dans la nature des armes saisies. Aux traditionnels pistolets automatiques s’ajoutent désormais des armes de guerre, retrouvées en plus grand nombre. La situation géographique des Antilles, à proximité du continent américain et au sein d’un espace fragmenté, facilite visiblement ces trafics. Les magistrats alertent depuis plusieurs mois sur une mutation des groupes violents, qui semblent gagner en structuration.

Un phénomène particulièrement alarmant retient l’attention des forces de l’ordre, l’extrême jeunesse des individus impliqués. Des mineurs, parfois âgés d’à peine treize ou quatorze ans, se retrouvent en possession d’armes. Pour les observateurs, cet accès précoce traduit une mutation des codes sociaux, l’arme devenant pour certains un instrument d’affirmation personnelle dans un contexte de perte de repères. L’arme blanche, autrefois prédominante dans les violences, tend à disparaître au profit des armes à feu, utilisées pour des motifs souvent futiles, lors de simples altercations ou de conflits de voisinage.

Contrairement à une idée reçue, le narcotrafic n’explique pas à lui seul cette flambée de violence. Bien que sa part dans les homicides soit en augmentation, elle reste minoritaire. Les autorités pointent plutôt la multiplication des règlements de comptes, des vols qui dégénèrent, des tensions entre bandes rivales et des violences intrafamiliales. Cette situation n’est pas propre à la Guadeloupe. Saint-Martin et la Martinique sont confrontées à des problématiques similaires, avec des taux d’homicides par arme à feu tout aussi préoccupants.

Face à cette situation, les pouvoirs publics ont annoncé le renforcement des moyens d’enquête, avec l’arrivée de personnels supplémentaires et la future installation d’un laboratoire de balistique. Pour les familles touchées et les habitants, ces mesures peinent à apaiser un sentiment d’impuissance et de crainte face à une normalisation de la violence armée qui transforme le tissu social.

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