En Inde, la censure numérique est devenue la norme sous le gouvernement nationaliste de Modi, avec près de 84 coupures d’internet en 2022. Les minorités sont particulièrement visées et les plateformes sociales sont régulièrement sollicitées pour censurer du contenu.
Près de 30 millions de personnes en Inde ont été privées de connexion Internet en un clin d’œil, soit l’équivalent d’un Français sur deux. Cette panne massive a commencé le 18 mars dernier et s’est étendue sur trois jours dans la région du Pendjab. Les autorités cherchaient à capturer un séparatiste sikh, mais ont échoué.
Pendant ces trois jours, les coupures ont été effectuées afin de limiter la circulation de fausses informations et d’éventuels rassemblements favorables au fugitif. Cette mesure a été décriée par l’Internet Freedom Foundation (IFF), qui a publié le document servant de point de départ à cette mesure, dénonçant une violation des droits humains des habitants de l’Inde. Selon l’Access Now, l’Inde est le pays le plus actif depuis cinq ans dans le domaine des coupures d’Internet, avec 84 shutdowns en 2022, soit près de la moitié du total mondial.
Ces coupures sont devenues la marque de fabrique du pouvoir nationaliste indien mené par le Premier ministre Narendra Modi.
Les coupures d’Internet sont généralement dirigées contre les minorités, comme les musulmans, et les groupes défavorisés. Le Cachemire est la région la plus fréquemment touchée en raison des tensions géopolitiques avec le Pakistan. Les interruptions sont également nombreuses et variées dans leurs objectifs, allant de la lutte contre la diffusion de fausses informations à la prévention de la tricherie aux examens. Près de la moitié de ces coupures reposent sur la section 69A de la loi sur les technologies de l’information, qui permet de se passer de motifs justifiant une action.
Les opposants directs et les critiques du Premier ministre Modi ne sont pas épargnés par la censure numérique. Les plateformes de médias sociaux sont également de plus en plus sollicitées pour toute sorte de demande de la part du gouvernement indien.
Cette répression en ligne représente la face sombre de la nouvelle « Inde numérique » soutenue par Modi, avec en tête de proue son système de paiement par Internet ultra-rapide (UPI), compatible avec de nombreuses applications. Le développement du numérique est « le changement le plus remarquable de notre époque », s’est félicité le Premier ministre indien lors d’un sommet du G20. Cependant, les coupures du réseau Internet mettent à mal ce rapide développement et causent des pertes économiques considérables. « Internet est aussi important pour les entreprises que l’eau pour la vie », a déclaré Sheikh Ashiq Ahmad, président de la Chambre de commerce et d’industrie du Cachemire (KCCI).
En bloquant fréquemment l’accès au réseau, le pouvoir empêche selon lui « toute une génération de faire des affaires ». Et de s’exprimer librement.