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Baudelaire, poète ou « poëte » ?

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Charles Baudelaire, dans « Les Fleurs du mal », se disait « poëte », mais la dernière réédition en date des « Fleurs du mal » orthographie « poète ». Une difficulté parmi d’autres, pour établir le texte définitif du célèbre recueil.

Les éditions Calmann-Lévy publient mercredi la dernière version de cette oeuvre sulfureuse sur laquelle ait travaillé l’écrivain, né il y a 200 ans, le 9 avril 1821.

Baudelaire lui-même n’en vit pas l’aboutissement: c’est plus d’un an après sa mort que cette troisième édition arrive en librairie, en décembre 1868.

« Cette édition avait été voulue par Baudelaire (…) Il y avait travaillé très tôt, avec Michel Lévy et avec son frère Calmann », souligne l’éditeur contemporain.

Il a confié le travail à l’un des plus éminents « baudelairiens » de notre époque, Pierre Brunel, membre de l’Institut.

Baudelaire tenait beaucoup à ce « poëte ». Condamné en 1857 pour outrage à la morale publique, il écrit au début d’une lettre à l’impératrice Eugénie: « Il faut toute la prodigieuse présomption d’un poëte pour oser occuper l’attention de Votre Majesté d’un cas aussi petit que le mien ».

Aspect primitif et brut

La première édition, en 1857, disait « poète ». Elle est contredite par une dédicace à la main sur l’exemplaire offert au « maître et ami » Théophile Gautier: « ne crois pas que je sois assez perdu, assez indigne du nom de poëte ».

Baudelaire considérait cette édition comme très imparfaite. Dans la deuxième (1861), il corrigera: « poëte » partout. Ce tréma est chez lui presque une marque de fabrique, soutenue par l’idée que « poète » pouvait ne compter qu’une syllabe, disgracieuse à l’oreille, et « poëte » deux sans conteste possible.

D’après le dictionnaire de l’Académie française, cette graphie du XVIe siècle a été chassée au XIXe par la seule que nous utilisons aujourd’hui, avec l’accent grave.

Pierre Brunel, auteur d’un essai intitulé « Baudelaire antique et moderne », tranche pour le moderne. « Le Poëte est semblable au prince des nuées », alexandrin de « L’Albatros » (une pièce qui apparaît à partir de la deuxième édition), devient en 2021: « Le Poète est semblable au prince des nuées ».

« J’ai essayé d’adopter une position mesurée et je ne m’en suis pas fait un cas de conscience. Si j’avais voulu donner une édition purement archéologique, j’aurais évidemment respecté cette orthographe d’époque », explique-t-il, interrogé.

« C’était déjà archaïque en son temps. Mais les deux se pratiquaient. Ça pouvait être un choix d’éditeur, aussi », pour donner un aspect primitif et brut à cette poésie, suppose l’universitaire.

Long-temps, longtemps

Baudelaire lui-même ne s’interdisait pas les modernisations. L’adverbe « long-temps » (orthographe du XVIIIe siècle, selon l’Académie française) apparaît quatre fois dans l’édition de 1857. Puis devient « longtemps » à partir de 1861.

Cas plus épineux: « très », que Baudelaire fait toujours suivre d’un trait d’union: « A la très-belle, à la très-bonne, à la très-chère » (poème sans titre, numéroté XLIII). L’édition de 2021 maintient ces traits d’union que nous n’utilisons plus, y voyant un élément de poésie à part entière: « Un processus d’amplification », dans les mots de Pierre Brunel.

« Baudelaire était fidèle à certaines traditions: c’est un aspect de sa personnalité. Dans la spiritualité par exemple, il va très loin dans la révolte, avec le satanisme. Mais il montre aussi son attachement à la religion », souligne l’universitaire.

L’essentiel, pour ce spécialiste, est de faire revivre une édition de 1868 « négligée, sous-évaluée et méprisée ». La Bibliothèque de la Pléiade (Gallimard), qui ressortira en coffret le 8 avril les deux tomes des « oeuvres complètes » de Baudelaire, lui préfère celle de 1861, comme la quasi-totalité des éditeurs depuis un siècle.

Or « mon sentiment est que Baudelaire n’était pas satisfait de l’édition de 1861. Non seulement parce qu’elle souffrait des conséquences de sa condamnation, avec des poèmes interdits de publication, mais aussi parce que des pièces d’une importance considérable ne s’y trouvent pas. Je pense à +Recueillement+ par exemple », commente Pierre Brunel.

« Un des plus beaux poèmes des +Fleurs du mal+ », d’après ce baudelairien, commence par ce vers: « Sois sage, ô ma Douleur, et tiens-toi plus tranquille ».

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Oliver Stone annonce un documentaire sur Lula, après Castro et Chavez

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Oliver Stone annonce un documentaire sur Lula, après Castro et Chavez

Oliver Stone, le renommé réalisateur américain, a annoncé la finalisation de son nouveau documentaire portant sur l’ancien président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva.

Le célèbre cinéaste Oliver Stone a révélé avoir terminé le tournage d’un documentaire sur le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva, qui explore son incarcération entre 2018 et 2019 ainsi que son retour au pouvoir.

Dans une déclaration à Paris, Stone a expliqué que le documentaire traiterait des poursuites judiciaires contre Lula, ainsi que de son emprisonnement pour corruption, un événement qui, selon le cinéaste, n’est pas rare dans certains pays.

Bien que aucune date de sortie n’ait été annoncée, le film devrait être présenté dans des festivals de cinéma, comme Cannes, où Stone est un habitué.

Oliver Stone, qui a déjà réalisé plusieurs films et documentaires sur l’Amérique latine, dont certains ont été controversés, comme ceux sur Fidel Castro et Hugo Chavez, voit en Lula, Chavez et Castro des « humanistes » qui ont travaillé pour le bien de leur pays malgré les poursuites politiques à leur encontre.

Interrogé sur les similitudes entre les trois dirigeants, Stone les décrit comme des originaux qui ont cherché à servir leur pays du mieux qu’ils pouvaient.

Le cinéaste, connu pour son franc-parler et son indépendance d’esprit, refuse de se conformer à la politique américaine traditionnelle et a déjà été qualifié de complotiste. Malgré ses trois Oscars et sa réputation bien établie, Stone admet que le retour aux longs métrages pourrait être difficile pour lui.

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Oscars 2024 : Justine Triet remporte l’Oscar du meilleur scénario pour « Anatomie d’une chute »

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Oscars 2024 : "Anatomie d'une chute" de Justine Triet primé

Le film français Anatomie d’une chute n’a pas obtenu l’Oscar du meilleur film étranger dimanche 10 mars, mais a tout de même remporté le prix du meilleur scénario.

Le film français « Anatomie d’une chute » de Justine Triet a été récompensé du prix du meilleur scénario lors de la 96e cérémonie des Oscars, qui s’est déroulée à Los Angeles le 10 mars. Malgré cette victoire, le film n’a pas remporté l’Oscar du meilleur film étranger, décerné au Britannique Jonathan Zagler pour « La Zone d’intérêt ».

Cette consécration du meilleur scénario, bien que moins spectaculaire que prévue, a été accueillie avec enthousiasme par Justine Triet. Interrogée, la réalisatrice a qualifié cette récompense de « rêve », tout en reconnaissant que cela constituait également le fruit d’une campagne bien menée. Le film, qui était également en lice dans trois autres catégories, repart finalement avec une seule statuette dorée.

Par ailleurs, « Anatomie d’une chute » a été mentionné d’une manière inattendue lors de la cérémonie. Le présentateur américain Jimmy Kimmel a utilisé le chien du film pour faire une remarque ironique sur Gérard Depardieu, impliqué dans des accusations de viols et d’agressions sexuelles. Cette intervention a suscité des réactions mitigées parmi le public et les professionnels du cinéma.

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Nouvelle plainte contre Depardieu pour une agression sexuelle présumée en 2021

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Nouvelle plainte contre Depardieu pour une agression sexuelle présumée en 2021

Une décoratrice dépose plainte pour agression sexuelle présumée sur un tournage en 2021, ajoutant à la série d’accusations visant l’acteur Gérard Depardieu.

Une nouvelle plainte pour agression sexuelle vient s’ajouter au dossier déjà chargé de l’acteur français Gérard Depardieu. Cette fois-ci, c’est une décoratrice ayant travaillé sur le tournage du film « Les volets verts », réalisé par Jean Becker en 2021, qui accuse l’acteur de comportement inapproprié.

L’avocate de la plaignante, Me Carine Durrieu-Diebolt, a confirmé le dépôt de plainte pour des faits d’agression sexuelle, harcèlement sexuel et outrages sexistes auprès du parquet de Paris. Ces allégations s’ajoutent à celles déjà portées à l’encontre de Gérard Depardieu, notamment après la mise en examen de l’acteur suite aux accusations de violences sexuelles émises par l’actrice Charlotte Arnould en décembre 2020.

Selon le récit rapporté par la plaignante à Mediapart, les faits se seraient déroulés à Paris pendant le tournage du film en question. L’acteur aurait proféré des propos déplacés avant de s’en prendre physiquement à la décoratrice, pétrissant violemment différentes parties de son corps, jusqu’à ce que l’intervention des gardes du corps mette fin à l’agression.

Le dépôt de cette plainte survient dans un contexte où plusieurs autres accusations pèsent déjà sur Gérard Depardieu, notamment celle de la comédienne Anouk Grinberg, qui aurait déposé plainte en diffamation contre l’avocate de l’acteur pour des propos tenus sur France 5 en décembre dernier.

Ces nouveaux développements viennent s’ajouter à une série d’enquêtes et de mises en examen déjà en cours à l’encontre de Gérard Depardieu, ce qui souligne l’ampleur croissante des accusations de comportement inapproprié dans le secteur du cinéma français.

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