Il y a quelques jours, Lysiane Estrada, deuxième adjointe municipale poussait un « coup de gueule ». Elle se plaignait qu’aucun médecin ne se libère pour signer un acte de décès. Mais c’est un problème sous-jacent qu’il aurait été préférable de mettre en évidence : le manque de médecin à Mèze.
Pour contextualiser, le 8 juillet, Lysiane Estrada, adjointe à la mairie de Mèze a poussé un « coup de gueule » sur sa page Facebook. Elle explique : « À 15h30, le téléphone d’astreinte de la ville a sonné. La Police municipale me demandait de me déplacer au domicile d’une personne dont le décès remontait à plusieurs jours. Vivant dans un petit collectif, et compte tenu des températures, il y avait urgence à enlever le corps. Aucun médecin de Mèze ou des alentours pour venir signer l’acte de décès. En congés, ou tous avec une bonne raison pour ne pas venir… » Avant d’ajouter : « Après 3 heures d’appel […] un médecin a été réquisitionné. Heure d’arrivée 18h !!!! Plus de 3 heures d’attente dans la rue avec la famille éplorée… Pour un acte de 20 minutes. Je suis tout simplement scandalisée par cette situation. Hippocrate doit se retourner dans sa tombe ! »
Annie Krommenacker, médecin généraliste à Mèze depuis 37 ans, réagissait : « Urgence ? Non, un décès, malheureusement, n’est plus une urgence ; arrivée du médecin comme annoncé dès votre premier appel à 18 heures. Il n’y a pas eu de réquisition, le médecin était volontaire à venir bien que ce n’était, effectivement, pas son patient. Urgence sanitaire : 3h de plus alors que le décès n’était pas à priori du jour ? Famille éplorée, toute famille est éplorée par le décès d’un proche : la douleur est la même que le certificat de décès soit fait à 15h30 ou à 18h. » Contactée par notre rédaction, le médecin affirmait : « Madame Estrada peut partager ce qu’elle veut sur Facebook, mais pas en tant qu’élue. En tant qu’élu, il faut faire preuve de recul, de réfléchir sur le problème et surtout bien se renseigner. »
Une situation qui risque de s’aggraver
Dans la suite de sa réponse, le Docteur Annie Krommenacker soulève un point très important. « Cela fait des années que nous cherchons des solutions à la problématique du manque de généralistes sur Mèze. Nous avons de nombreuses fois évoqués cela avec les élus de la mairie de Mèze », souligne le médecin Mézois. En effet, la moyenne nationale est de 3,3 médecins pour 1 000 habitants. À Mèze, il y a 10 médecins pour une population de 12 000 habitants. Ainsi, pour la commune, cela représente mois de 1 médecin pour 1 000 habitants. Le Docteur Krommenacker affirmait : « Il y a une trentaine d’années, nous étions déjà 10 médecins, mais pour 7 000 habitants. Aujourd’hui, il y a le même nombre de médecins pour une population de 12 000 habitants. De plus, le médecin de Loupian est récemment parti sans trouver de successeur, cela représente donc 2 000 personnes de plus qui ont dû se répartir sur les communes aux alentours. »
Avant d’ajouter : « C’est aussi une population qui vieillit, il y a trente ans, il y avait un hospice avec tout juste une vingtaine de personnes. Aujourd’hui, il y a deux maisons de retraite, une résidence Sénioriale et des patients qui sont de plus en plus sujet à des polypathologies et qui prennent donc plus de temps à soigner. » Par ailleurs, la situation risque de s’aggraver fortement. En effet, au 31 décembre 2021, deux médecins devraient partir en retraite. Pour l’instant, malgré les annonces, les demandes, ces deux postes ne sont pas remplacés. Et pour ce qui est d’Annie Krommenacker, elle est normalement déjà retraitée. « Je cherche et j’attends que quelqu’un prenne ma place. Je ne suis pas pressée, mais il est évident que si cette situation dure trop longtemps, je partirai sans successeur. C’est une situation qui est très compliquée », affirme-t-elle.
De ce fait, la ville de Mèze pourrait, si aucun solution n’est trouvée, se retrouver avec seulement sept médecins en activité. La situation pourrait devenir très tendue…
Quelles solutions ?
Ainsi, la priorité, pour Mèze, c’est de pouvoir attirer des médecins et il faut que la ville reste attractive. Pour ce faire, il existe plusieurs solutions. « Par exemple, la municipalité de Marseillan a aidé un jeune médecin à s’installer en prenant en charge le loyer pour l’aider à se lancer. Il faudra que les municipalités et les collectivités territoriales rendent l’exercice plus attractif. Les charges sont importantes et effraient les jeunes médecins, il faut les accompagner dans leur lancement », confiait le médecin. Les municipalités de Pomérols et de Pinet vont mettre en place des centres médicaux et permettent ainsi d’attirer de nouveaux médecins dans des locaux neufs.
De nombreuses solutions sont possibles, mais il ne faut certainement pas chercher à blâmer les médecins et le travail qu’ils font. Durant la crise sanitaire, les médecins, les professions libérales, le personnel médical, le personnel soignant…tous ont énormément été sollicités. Et bien qu’une élue ait attendu pendant trois heures l’arrivée d’un médecin, ce dernier avait certainement fort à faire avant de se libérer.
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