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Marseille, l’émancipation par les vagues

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Dans les quartiers nord de la ville, des femmes apprivoisent l’élément marin grâce à une initiative associative qui comble un déficit criant en matière d’apprentissage de la natation.

Au bord d’une piscine d’eau de mer à l’Estaque, un groupe de femmes s’initie aux mouvements de bras et à la respiration sous la guidance attentive de moniteurs. Issues des secteurs populaires marseillais, elles font partie des nombreuses habitantes qui, bien qu’entourées par la Méditerranée, n’ont jamais eu l’occasion d’apprendre à nager. Une situation que l’association Le Grand Bleu tente de corriger depuis plus de deux décennies.

Fondée en 2000, cette structure propose des formations gratuites destinées à réduire les inégalités d’accès aux activités aquatiques. Son fondateur souligne le paradoxe marseillais. Malgré ses cinquante-sept kilomètres de côtes, une large part de la population, en particulier dans les zones moins favorisées, ne maîtrise pas la nage. Les chiffres nationaux viennent corroborer l’urgence de la situation, avec une hausse significative des noyades au cours de l’été.

Initialement centrés sur les plus jeunes, les cours se sont étendus aux mères de famille à partir de 2020. Aucun homme ne participe à ces sessions, constate l’organisateur. Les formatrices adaptent leur pédagogie à un public parfois marqué par des expériences difficiles avec l’eau. La confiance se bâtit progressivement, au rythme des séances hebdomadaires.

Au-delà de l’apprentissage technique, c’est tout un rapport au corps et à l’espace public qui se transforme. Le port du maillot, la gestion des enfants ou l’éloignement géographique constituent autant d’obstacles préalablement infranchissables. La fracture entre le sud résidentiel et le nord populaire de Marseille se manifeste aussi dans l’accès aux loisirs nautiques et aux équipements.

Pour ces femmes, souvent retraitées ou mères de famille nombreuses, l’acquisition de cette compétence revêt une dimension à la fois pratique et symbolique. Il s’agit de pouvoir surveiller leurs enfants en sécurité, mais aussi de goûter à une forme de liberté longtemps inaccessible. Certaines, après avoir vaincu leur appréhension, s’adonnent désormais avec plaisir au kayak ou au paddle, prolongeant ainsi leur conquête de l’espace maritime.

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