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Le cuir nigérian, un trésor convoité qui cherche sa propre signature

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Alors que près de 90% de la production locale de cuir est exportée vers les grandes maisons de luxe européennes, une nouvelle génération de créateurs entreprend de bâtir une industrie de la maroquinerie sur le sol nigérian.

Dans les ateliers de Kano, centre historique du travail du cuir, l’activité bat son plein. Les peaux, traitées selon des méthodes ancestrales ou transformées dans des tanneries modernes, constituent une matière première de premier choix pour l’industrie du luxe international. Pourtant, une fois expédiées en Europe pour les phases finales de fabrication, ces mêmes peaux perdent toute attribution nigériane, arborant finalement des étiquettes « Fabriqué en Italie » ou « Fabriqué en Espagne ». Ce paradoxe est au cœur des défis que cherchent à relever des artisans et entrepreneurs locaux.

À Lagos, des designers comme Isi Omiyi ont fait le choix de valoriser intégralement la production nationale. Dans son appartement transformé en espace de vente, elle présente des sacs et accessoires haut de gamme qui revendiquent fièrement leur origine. Pour cette créatrice, il s’agit de rendre visible un héritage et un savoir-faire longtemps occultés par les circuits d’approvisionnement globaux. Une aspiration partagée par de nombreux acteurs émergents qui souhaitent voir reconnue la qualité intrinsèque du cuir nigérian.

Le potentiel économique est considérable. Les exportations de cuir, majoritairement semi-transformé, génèrent plusieurs centaines de millions de dollars de revenus annuels. Les tanneries de Kano, qu’elles soient industrielles comme Ztannery ou artisanales comme l’historique Majema, approvisionnent un réseau complexe d’intermédiaires qui alimentent les géants de la maroquinerie de luxe. Cependant, les conditions d’accès à cette matière première restent difficiles pour les petites entreprises locales, souvent contraintes de se tourner vers des circuits parallèles.

Face à cette situation, des initiatives se structurent pour consolider la filière. Le Lagos Leather Fair, créé par Femi Olayebi, offre une vitrine indispensable aux talents nationaux. Parallèlement, des projets publics, comme l’usine inaugurée récemment dans l’État de Lagos, visent à renforcer les capacités de production et à créer des milliers d’emplois. Pour ces pionniers, l’enjeu dépasse la simple logique commerciale. Il s’agit d’écrire une nouvelle page de l’identité créative du Nigeria, en proposant une maroquinerie qui raconte une histoire authentique et qui séduise une clientèle en quête d’authenticité et de sens.

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