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La disparition silencieuse des tatouages rituels hindous au Pakistan

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Une tradition ancestrale s’éteint progressivement sur les visages des femmes de la minorité hindoue, confrontée aux mutations sociales et aux pressions identitaires.

Dans les villages hindous de la province du Sindh, près de la frontière indienne, un patrimoine culturel séculaire s’efface peu à peu. Les motifs géométriques qui ornaient depuis des générations les visages et les mains des femmes deviennent progressivement l’apanage des aînées. Cette pratique traditionnelle, transmise de mère en fille, consistait à dessiner à l’aiguille des lignes de points, des cercles et des symboles complexes à l’aide d’un mélange de charbon et de lait de chèvre.

Les nouvelles générations renoncent désormais à ces marques identitaires. Les jeunes femmes issues de la communauté hindoue, qui ne représente que deux pour cent de la population pakistanaise, préfèrent aujourd’hui se fondre dans le paysage social majoritaire. L’urbanisation croissante et l’influence des réseaux sociaux contribuent à cette évolution, beaucoup estimant que ces tatouages les singulariseraient négativement dans l’espace public.

Certains défenseurs des droits des minorités soulignent les difficultés persistantes rencontrées par les non-musulmans au Pakistan, où les pressions sociales et certaines interprétations religieuses condamnent la pratique du tatouage. Cette situation accélère l’abandon progressif d’un rituel dont les origines remontent à la civilisation de l’Indus, à l’âge du bronze. Les anthropologues rappellent que ces symboles servaient autrefois à identifier l’appartenance communautaire et à éloigner les influences néfastes.

Aujourd’hui, les dernières praticiennes comme Basran Jogi continuent leur travail avec une poignée d’enfants dans les zones rurales, perpétuant un geste qui disparaîtra probablement avec elles. Les motifs noirs qui ornent encore certains visages deviendront vert foncé avec le temps et accompagneront leurs porteuses jusqu’à la fin de leurs jours, ultimes témoins d’une tradition qui s’éteint doucement. Pour beaucoup de femmes âgées, ces marques constituent un lien tangible avec leurs aïeules et leurs jeunes années, un patrimoine épidermique voué à devenir invisible.

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