Politique
« Confiance » dans la justice: le remède de Dupond-Moretti devant l’Assemblée
Procès filmés, enquêtes préliminaires mieux encadrées, fin des réductions de peine automatiques: l’Assemblée nationale s’attelle mardi au projet de loi pour la « confiance » dans la justice d’Eric Dupond-Moretti, très critiqué par magistrats et avocats et sur lequel les oppositions sont mitigées.
« Depuis trop longtemps, le fossé entre nos concitoyens et la justice se creuse », répète le garde des Sceaux et ancien avocat.
Le texte est « le fruit d’une longue réflexion que j’ai menée à la lumière de mes trente-six années de barreau », a-t-il fait valoir devant les députés en commission, parmi lesquels de nombreux avocats de profession dont le rapporteur Stéphane Mazars (LREM).
Accélérer les procédures
Dans leur viseur notamment, la limitation de principe à deux ans des enquêtes préliminaires pour accélérer les procédures. Mais seules 3% dépassent cette durée, relève l’Union syndicale des magistrats, qui oppose un « manque de moyens de police judiciaire » et le temps nécessaire aux enquêtes politico-financières.
Le texte d’une quarantaine d’articles, accompagné d’un volet organique, est débattu dans l’hémicycle jusqu’à vendredi, avec plus de 800 amendements à la clé. Parallèlement, le ministre mène campagne aux élections régionales dans les Hauts-de-France.
Parmi la palette de mesures à l’étude, figurent des sujets grand public comme l’enregistrement sonore ou audiovisuel des audiences en vue de leur diffusion, ou le développement du travail en détention.
Mais aussi de nombreuses dispositions plus techniques, trop tournées vers la justice pénale aux yeux de la gauche et de l’UDI, qui auraient souhaité s’atteler à « la justice du quotidien, la justice civile ».
La droite pour sa part accueille avec « vigilance et bienveillance » le projet de loi.
Pôle pour les crimes en série
Dans les mesures les plus débattues figure la généralisation des cours criminelles départementales, sans attendre la fin de leur expérimentation prévue pour 2022.
Ces cours, composées de cinq magistrats professionnels, sans jury populaire, ont été mises en place pour désengorger les cours d’assises et jugent en première instance des crimes punis de quinze ou vingt ans de réclusion, majoritairement des viols.
Eric Dupond-Moretti, qui craignait jadis qu’elles ne remplacent les cours d’assises, a changé d’avis, ce qu’épinglent professionnels comme parlementaires.
Autre sujet sur lequel la gauche va monter au créneau: la suppression des crédits de réduction de peines automatiques. Eric Dupond-Moretti veut « des crédits de peine exclusivement à l’effort », en fonction de la « bonne conduite » en détention et des « efforts de réinsertion ».
Les socialistes rappellent qu' »actuellement, l’automaticité n’est pas de droit » et soulignent la charge supplémentaire pour les juges de l’application des peines.
Le gouvernement veut durcir ce volet pour les agresseurs de forces de l’ordre, après le meurtre d’un brigadier à Avignon lors d’une opération de contrôle sur un point de deal.
Des milliers de policiers doivent d’ailleurs se rassembler mercredi devant le Palais Bourbon à l’appel des syndicats pour réclamer plus de sévérité, alors qu’un projet de loi distinct est en préparation.
Audiences enregistrées
Les députés ont déjà complété le projet Dupond-Moretti en commission sur divers aspects, notamment « l’enregistrement sonore ou audiovisuel » des audiences en vue de leur diffusion, « pour un motif d’intérêt public » une fois le dossier définitivement jugé. Ils ont notamment apporté des garanties supplémentaires au consentement des parties, et prévu d’accompagner la diffusion « d’explications pédagogiques ».
« On s’oriente vers la production d’une émission télévisée » par le gouvernement, grince Ugo Bernalicis (LFI). Mais selon M. Dupond-Moretti, « il ne s’agit surtout pas de faire du +trash+, du +live+ ».
Un amendement gouvernemental entend élargir l’enregistrement aux auditions et interrogatoires par le juge d’instruction.
Autre proposition phare du ministre pour la séance: la création d’un « pôle unique national » au sein de l’appareil judiciaire pour mieux élucider les crimes en série ou non résolus.
Mais pas de débat possible sur l’irresponsabilité pénale: des amendements de députés ont été jugés irrecevables. La question, qui a ressurgi après la confirmation qu’il n’y aura pas de procès pour le meurtrier de Sarah Halimi, gros consommateur de cannabis, doit faire l’objet d’un projet de loi fin mai.
Économie
Climat, guerres, Trump: le G20 sous pression en sommet à Rio
Le sommet du G20 à Rio de Janeiro se tient sous haute tension, avec des enjeux climatiques et géopolitiques majeurs, et l’influence croissante de Donald Trump.
Le sommet du G20, qui réunit les dirigeants des économies les plus influentes du monde, a débuté à Rio de Janeiro dans un contexte marqué par des défis climatiques pressants et des tensions géopolitiques exacerbées. Les discussions, qui se déroulent dans un cadre de plus en plus instable, sont dominées par la nécessité de trouver des accords sur le financement climatique et la gestion des conflits internationaux, tout en anticipant le retour de Donald Trump à la présidence américaine.
Les dirigeants du G20, représentant une part significative du PIB mondial et des émissions de gaz à effet de serre, sont confrontés à l’urgence d’agir pour le climat. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a appelé à des compromis pour garantir un résultat positif à la prochaine conférence sur le climat, la COP29. Cependant, les divergences sur les questions climatiques et les conflits en cours, notamment en Ukraine et au Proche-Orient, rendent les négociations particulièrement ardues. La Russie, absente du sommet, continue d’influencer les discussions par son conflit avec l’Ukraine, tandis que la situation à Gaza et au Liban ajoute une complexité supplémentaire.
Le président argentin Javier Milei, connu pour ses positions ultralibérales et climatosceptiques, introduit une incertitude supplémentaire. Buenos Aires a exprimé des réserves quant à l’adhésion à un communiqué commun, ce qui pourrait entraver les efforts de consensus. De son côté, le président brésilien Lula da Silva, hôte du sommet, souhaite recentrer les débats sur les enjeux sociaux et la lutte contre la pauvreté, avec le lancement d’une Alliance globale contre la faim et la pauvreté, et la proposition d’une taxation des plus riches, déjà discutée entre les ministres des Finances du G20.
L’ombre de Donald Trump, qui devrait revenir à la Maison Blanche en janvier, plane sur le sommet. Joe Biden, en visite en Amazonie, a envoyé un message fort sur la nécessité de protéger l’environnement, soulignant le risque d’un affaiblissement des ambitions climatiques mondiales sous une nouvelle administration républicaine. Cette perspective alimente les craintes d’une fragmentation internationale accrue et d’un retour en arrière sur les engagements climatiques.
Les discussions bilatérales de Xi Jinping avec d’autres dirigeants illustrent également l’importance croissante des pays émergents et des visions alternatives dans un ordre mondial en pleine mutation. Selon Oliver Stuenkel, professeur en relations internationales, le monde entre dans une phase d’imprévisibilité accrue, où les pays du Sud et la Chine auront plus d’espace pour articuler leurs propres stratégies.
Le G20 de Rio de Janeiro se tient à un moment critique où les leaders doivent naviguer entre les impératifs climatiques, les conflits internationaux et les changements politiques majeurs, tout en cherchant à maintenir un semblant d’unité et d’action collective.
Politique
Au bord de l’épuisement, plus de huit maires sur dix jugent leur fonction usante pour la santé
L’Association des maires de France dévoile une étude inquiétante : la majorité des maires français sont au bord de l’épuisement, confrontés à des défis de plus en plus pressants.
Selon une enquête récente, l’exercice de la fonction de maire en France s’avère de plus en plus exigeant, au point de devenir préjudiciable pour la santé de ceux qui l’assument. L’étude, soutenue par l’Association des maires de France (AMF), révèle que 83% des maires estiment leur mandat « usant pour la santé ». Ce chiffre est alarmant et soulève des questions sur la soutenabilité de cette charge publique.
Les maires sont exposés à une multitude de pressions : tensions avec les administrés, menaces, agressions, mais aussi un rythme de travail intense. Plus de 65% des maires interrogés ont avoué ressentir « des moments de lassitude » durant leur mandat, tandis que 64% ont été confrontés à « des coups de fatigue ». Un autre aspect préoccupant est la santé mentale : plus de la moitié des maires (51,2%) souffrent de troubles du sommeil, symptomatique d’un stress chronique et d’une surcharge mentale.
L’étude met en lumière une réalité souvent occultée : la charge mentale, plus que la charge physique, pèse lourdement sur les épaules des élus locaux. Plus de 64% des maires se plaignent de penser à « trop de choses à la fois », et 77% considèrent que leur action n’est pas « efficace » face à la multitude de tâches à accomplir. Cette situation est particulièrement aiguë dans les petites communes, où les maires, souvent seuls, doivent prendre des décisions cruciales sans le soutien social nécessaire.
Cependant, malgré ces difficultés, les maires continuent d’éprouver une grande satisfaction dans leur rôle. Une quasi-totalité d’entre eux (99,7%) ressentent qu’ils font « quelque chose d’utile pour les autres » et 98,5% expriment la « fierté du travail bien fait ». Ce paradoxe entre l’épuisement et le sentiment de réalisation souligne l’importance et la complexité de leur mission.
Cette étude interpelle sur la nécessité de revoir les conditions d’exercice du mandat de maire, pour préserver la santé des élus et garantir la qualité de la gouvernance locale. Il est temps de réfléchir à des solutions concrètes pour alléger la charge des maires, afin que leur engagement civique ne se transforme pas en sacrifice personnel.
France
Emmanuel Macron atteint un seuil historique d’impopularité
Malgré son retrait de la scène politique intérieure, Emmanuel Macron enregistre un nouveau recul dans les sondages. Avec seulement 17% d’opinions favorables, il connaît l’un des plus bas niveaux de popularité jamais atteints par un président en exercice.
La dissolution de l’Assemblée nationale en juin dernier continue de peser lourdement sur la popularité d’Emmanuel Macron. Un récent baromètre révèle que seulement 17% des Français ont aujourd’hui une opinion favorable du chef de l’État. Ce chiffre marque une chute sans précédent pour le président, qui traverse désormais une crise de confiance plus marquée que lors de la période tendue des « Gilets jaunes ». L’étude met en lumière le fossé grandissant entre le président et l’opinion publique, alimenté par son retrait de la gestion des affaires intérieures depuis la nomination de Michel Barnier au poste de Premier ministre, qui concentre désormais l’essentiel du pouvoir exécutif.
Le désenchantement des Français ne se limite pas à une simple baisse de popularité. Selon le sondage, 78% des personnes interrogées déclarent ne plus faire confiance à Emmanuel Macron. Un chiffre élevé, mais qui ne dépasse pas le record d’impopularité enregistré par François Hollande en 2016, où ce dernier avait culminé à 87% de défiance. Cet ancrage persistant d’une méfiance vis-à-vis du chef de l’État traduit un mécontentement profond, notamment au sein des classes populaires et de certaines franges de l’électorat centriste, qui semblent aujourd’hui désillusionnées par les promesses initiales de renouveau portées par le président.
Le sondage illustre également la montée du Rassemblement national (RN) dans le paysage politique français, avec Jordan Bardella et Marine Le Pen occupant les deux premières places du classement de popularité. La progression de figures de droite, comme Marion Maréchal en cinquième position et Éric Ciotti en dixième, témoigne d’un basculement notable de l’opinion publique en faveur des idées portées par le RN, et de la stratégie d’alliances qui semble désormais porter ses fruits. Gabriel Attal, quant à lui, peine à consolider sa base de soutien, fragilisée par sa posture ambiguë de critique du gouvernement tout en menant ses troupes à l’Assemblée nationale. Les tensions entre ses engagements et les attentes de ses partisans l’ont conduit à perdre 4 points auprès des centristes et 21 points à gauche, reflétant la difficulté de maintenir une ligne cohérente dans un contexte politique polarisé.
Cette baisse de popularité et la montée en puissance de l’extrême droite dessinent un paysage politique français de plus en plus incertain, marqué par une désaffection à l’égard de l’exécutif et un attrait croissant pour des alternatives radicales.
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