Nous rejoindre sur les réseaux

France

Génocide: la France a « failli » au Rwanda selon un rapport remis à Macron

Article

le

genocide:-la-france-a-« failli »-au-rwanda-selon-un-rapport-remis-a-macron

La politique de la France au Rwanda entre 1990 et 1994, menée par un président et son entourage « aveuglés idéologiquement », a été une « faillite » et elle porte des responsabilités « accablantes » dans le génocide des Tutsi, selon un rapport cinglant d’historiens remis vendredi à Emmanuel Macron.

Kigali a a salué « un pas important vers une compréhension commune du rôle de la France », dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères.

Ce rapport « marque une avancée considérable » pour comprendre l’engagement français au Rwanda, a estimé le chef de l’Etat français dans un communiqué de la présidence.

La France, où se sont installées plusieurs personnes suspectées d’avoir des responsabilités dans le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994, « poursuivra ses efforts » contre les responsables de génocides, ajoute-t-il.

Le président français a indiqué espérer que la publication de ce rapport permettrait un rapprochement « irréversible » avec Kigali.

Même si les relations entre les deux pays se sont détendues avec l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron en 2017, le rôle de la France au Rwanda reste un sujet explosif depuis plus de 25 ans.

Ce rapport de plus de 1.000 pages, fruit de deux années d’analyse des archives françaises, dresse un bilan sans concession de l’implication militaire et politique de Paris, tout en écartant la « complicité » de génocide longtemps dénoncée par Kigali.

Un bémol qui n’a pas échappé à Hubert Védrine, secrétaire général de la présidence française au moment du génocide, qui a salué « l’honnêteté » du rapport et souligné qu’il « écarte toute complicité de la France ».

Présente au Rwanda depuis que ce pays des Grands Lacs a pris son indépendance de la Belgique, la France « est demeurée aveugle face à la préparation » du génocide des Tutsi du Rwanda de 1994, assène dans ses conclusions la commission de 14 historiens présidée par Vincent Duclert, mise en place en 2019 par Emmanuel Macron.

Les historiens reviennent sur l’engagement français durant ces quatre années décisives, au cours desquelles s’est mise en place la dérive génocidaire du régime hutu, pour aboutir à la tragédie de 1994: quelque 800.000 personnes, majoritairement tutsi, exterminées dans des conditions abominables entre avril et juillet.

Télégrammes diplomatiques, notes confidentielles et lettres à l’appui, le rapport dessine une politique africaine décidée au sommet par le président socialiste de l’époque, François Mitterrand, et son cercle proche, un entourage motivé par des « constructions idéologiques » ou la volonté de ne pas déplaire au chef de l’Etat.

Il raconte des décideurs « enfermés » dans une grille de lecture « ethniciste » post-coloniale et décidés à apporter, contre vents et marée, un soutien quasi « inconditionnel » au régime « raciste, corrompu et violent » du président rwandais Juvénal Habyarimana, face à une rébellion tutsi considérée comme téléguidée depuis l’Ouganda anglophone.

« Alignement »

« Cet alignement sur le pouvoir rwandais procède d’une volonté du chef de l’Etat et de la présidence de la République », écrivent les quatorze historiens de la Commission, en insistant sur « la relation forte, personnelle et directe » qu’entretenait François Mitterrand avec le président hutu Juvénal Habyarimana.

Cette relation, doublée d’une obsession de faire du Rwanda un territoire de défense de la francophonie face aux rebelles tutsi réfugiés en Ouganda a justifié « la livraison en quantités considérables d’armes et de munitions au régime d’Habyarimana, tout comme l’implication très grande des militaires français dans la formation des Forces armées rwandaises » gouvernementales.

Dès octobre 1990, date d’une offensive du FPR (Front patriotique rwandais, ex-rébellion tutsi dirigée par Paul Kagame, devenu président du Rwanda), Paris prend fait et cause pour le régime Habyarimana. Elle s’engage militairement avec l’opération militaire Noroît, censée protéger les expatriés étrangers, mais qui de facto constitue une présence « dissuasive » pour protéger un régime vacillant contre l’offensive rebelle.

Tout en pressant Habyarimana à démocratiser son régime et négocier avec ses opposants -ce qui aboutira aux accords de paix d’Arusha en août 1993-, la France ignore les alertes, pourtant nombreuses, venues de Kigali ou Paris, mettant en garde contre la dérive extrémiste du régime et les risques de « génocide » des Tutsi.

Cercle présidentiel

Qu’elles viennent de l’attaché militaire français à Kigali, des ONG, de certains diplomates, ou des services de renseignement, ces mises en garde sont ignorées ou écartées par le président et son cercle.

« On peut se demander si, finalement, les décideurs français voulaient vraiment entendre une analyse qui venait contredire la politique mise en œuvre au Rwanda », écrivent les chercheurs.

Le rapport souligne notamment la lourde responsabilité de l’Etat-major particulier (EMP) de François Mitterrand, dirigé par le général Christian Quesnot et son adjoint le colonel (devenu général) Jean-Pierre Huchon.

« L’EMP porte une responsabilité très importante dans l’installation d’une hostilité générale de l’Elysée envers le FPR », écrit le rapport, qui dénonce « les pratiques irrégulières », voire les « pratiques d’officine » de cet organe qui court-circuite tous les canaux réguliers pour mettre en oeuvre la politique française sur le terrain.

Avec l’aval, tacite, du président: « aucun document ne montre une volonté du chef de l’Etat de sanctionner ces militaires ou de les retenir dans leurs initiatives », pointe le rapport.

Parallèlement, l’institution diplomatique ne se montre guère plus critique – à de rares exceptions: « les diplomates épousent sans distance ou réserve la position dominante des autorités », et leur administration est « imperméable » à la critique.

L’arrivée en 1993 d’un gouvernement de droite – la France entre en « cohabitation »- ne modifiera pas fondamentalement la donne, malgré des affrontements parfois « impitoyables » entre l’Elysée et le gouvernement du Premier ministre Edouard Balladur, beaucoup moins enclin à l’engagement français au Rwanda.

Incapacité à penser le génocide

Lorsque le génocide commence, le 7 avril 1994, au lendemain de l’attentat contre l’avion du président Habyarimana (dont le rapport ne désigne pas les commanditaires, objet d’une controverse depuis près de 30 ans), cela n’entraîne pas « une remise en cause fondamentale de la politique de la France, qui demeure obsédée par la menace du FPR ». Et même si le chef de la diplomatie de droite Alain Juppé est le premier à parler de « génocide » à la mi-mai 1994, la grille de lecture reviendra rapidement à des « massacres interethniques » et une « guerre civile ».

Il y a une « obstination à caractériser le conflit rwandais en termes ethniques, à définir une guerre civile là où il y a une entreprise génocidaire », écrivent les historiens.

Dans un contexte de retrait ou d’immobilisme international -l’ONU, l’ancienne puissance coloniale belge, les Etats-Unis-, la France sera pourtant la première à réagir en lançant en juin 1994, sous mandat de l’ONU, une opération militaro-humanitaire visant à « faire cesser les massacres ».

Cette opération controversée, Turquoise, a certes « permis de sauver de nombreuses vies, mais non celles de la très grande majorité des Tutsi du Rwanda exterminés dès les premières semaines du génocide », écrit la commission, qui souligne que les autorités françaises « se refusent à arrêter » les commanditaires du génocide ayant trouvé refuge dans la zone sous contrôle français. Ce point est l’un des plus controversés de l’action française au Rwanda.

Les responsables politiques et militaires de l’époque ont pour leur part soutenu avoir sauvé l’honneur de la communauté internationale en étant les seuls à intervenir au Rwanda.

Le génocide prend fin avec la victoire du FPR en juillet 1994. Depuis, la France a entretenu des relations tendues, voire exécrables, avec le Rwanda, marquées par la rupture des relations diplomatiques en 2006.

Même si les relations entre Paris et Kigali se sont détendues avec l’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron en 2017, le rôle de la France au Rwanda reste un sujet explosif depuis plus de 25 ans. Il est aussi l’objet d’un débat violent et passionné entre chercheurs, universitaires et politiques.

Click to comment

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

France

TV : Hanouna accuse l’Arcom de harcèlement et envisage de saisir la justice

Article

le

TV : Hanouna accuse l'Arcom de harcèlement et envisage de saisir la justice

Lors de la rentrée télévisée de « Touche pas à mon poste » (TPMP), l’animateur Cyril Hanouna a ouvertement critiqué l’Arcom, le régulateur de l’audiovisuel, l’accusant de harcèlement. Cette sortie intervient six mois avant le retrait prévu de la chaîne C8 de la TNT, une décision controversée qui met en lumière les tensions croissantes entre la chaîne et le régulateur.

Lors de cette première émission de la saison, Hanouna, âgé de 49 ans, a exprimé sa colère contre la décision de l’Arcom, qui a annoncé que C8 ne serait pas reconduite sur la TNT après le 28 février 2024. Il a affirmé que la chaîne compte faire appel pour renverser cette décision, bien que la notification officielle n’ait pas encore été envoyée au groupe Canal+, propriétaire de C8.

Dans une séquence parodique, Hanouna a chanté en référence à l’Arcom, déclarant que sans ce régulateur, « plus de problème ». Cependant, il n’a pas précisé les alternatives envisagées par la chaîne après le départ de la TNT.

C8, qui appartient au groupe Canal+, fait face à une situation délicate. En huit ans, la chaîne a accumulé 7,6 millions d’euros d’amendes en raison des dérapages de son animateur vedette, ce qui a contribué à la décision de l’Arcom de ne pas renouveler sa fréquence. Néanmoins, Canal+ conserve d’autres chaînes sur la TNT, notamment Canal+, CNews, et CStar.

Cyril Hanouna, vêtu comme Céline Dion, a ensuite enchaîné avec une interprétation parodique de « L’Hymne à l’amour », avant de rejoindre le plateau en moto, marquant le ton souvent provocateur de l’émission. Il a profité de l’occasion pour dénoncer ce qu’il considère comme une atteinte à la liberté d’expression, affirmant que la suppression de C8 est une décision prise uniquement en raison de son animosité avec l’Arcom.

Dans un ton plus grave, il a annoncé son intention de saisir la justice pour harcèlement, affirmant que l’Arcom le cible personnellement, ce qui engendre des messages de haine sur les réseaux sociaux. Hanouna a également exprimé son inquiétude pour les 400 employés de C8 et de sa société de production H2O, qui pourraient perdre leur emploi si la chaîne venait à disparaître de la TNT.

Enfin, Hanouna a reconnu certains de ses excès en direct, tout en défendant les contributions positives de son émission. La décision de l’Arcom et son impact potentiel sur C8 soulèvent des questions sur la liberté d’expression et la responsabilité des médias dans le paysage audiovisuel français.

Lire Plus

France

Rentrée 2024 sous tension : réformes en suspens et incertitudes

Article

le

Rentrée 2024 sous tension : réformes en suspens et incertitudes

Avec une boule au ventre, 12 millions d’élèves ont repris le chemin de l’école ce lundi, alors que les réformes éducatives en cours restent en suspens, dans l’attente d’un nouveau gouvernement.

Alors que la cloche de la rentrée sonne pour des millions d’écoliers, collégiens, et lycéens, l’atmosphère est marquée par une combinaison de nervosité et de questionnements. Pour Julie, mère d’une élève en Terminale, l’année s’annonce sous le signe de l’angoisse avec l’épreuve de Parcoursup en perspective, un stress partagé par de nombreuses familles.

Nicole Belloubet, pour ce qui pourrait être sa seule rentrée en tant que ministre de l’Éducation, respectera la tradition en visitant plusieurs écoles, soulignant que « les affaires courantes ne sont ni un temps suspendu pour l’école, ni un temps mort ». De son côté, Gabriel Attal, également présent sur le terrain, lancera une nouvelle campagne nationale contre le harcèlement scolaire.

Cependant, derrière ces gestes symboliques se cache une inquiétude plus profonde parmi les enseignants. Confrontés à une « cacophonie » sur les réformes comme les controversés « groupes de niveau », ils doivent également faire face à une crise persistante de recrutement, avec plus de 3.000 postes non pourvus, tant dans l’enseignement public que privé.

Le début de cette année scolaire pourrait bien marquer un tournant, alors que l’école se trouve « à un point de bascule » selon les syndicats. La mise en place des « groupes de besoins », initialement appelés « groupes de niveau », en français et en mathématiques pour les élèves de 6e et 5e, suscite une controverse. Ces groupes, censés s’étendre aux classes de 4e et 3e l’an prochain, ont été l’une des mesures phares du « choc des savoirs » voulu par Gabriel Attal lorsqu’il était ministre de l’Éducation. Mais leur mise en œuvre, prônée avec « souplesse et pragmatisme » par Nicole Belloubet, est critiquée pour son manque de clarté et ses risques d’échec pédagogique.

En parallèle, les expérimentations comme la « pause numérique » dans 180 collèges et la « tenue unique » dans près d’une centaine d’établissements ajoutent au scepticisme ambiant. La « pause numérique », en particulier, impose aux collégiens de laisser leurs téléphones à l’entrée de l’établissement, une mesure qui suscite des interrogations quant à son efficacité et sa nécessité, alors que l’utilisation des téléphones est déjà réglementée depuis 2018.

Les enseignants, représentés par des syndicats comme le Snes-FSU et la CFDT Éducation, expriment leurs craintes quant à l’impact de ces réformes dans un contexte politique incertain. Selon eux, certaines « urgences structurelles », comme le manque de professeurs, pourraient être ignorées, accentuant ainsi les difficultés du système éducatif. Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, prédit même que « certainement pas un professeur de français et de maths » ne sera présent « devant chaque groupe » dans les classes concernées.

En toile de fond, la réforme du brevet, un autre sujet délicat, reste en suspens. Le projet de Gabriel Attal de rendre son obtention obligatoire pour passer en seconde a été gelé, laissant planer le doute sur les conditions d’examen pour les élèves de 3e cette année.

Face à ces défis, cette rentrée 2024-2025 s’annonce sous haute tension, entre réformes en suspens, crise politique et incertitudes pour l’avenir de l’éducation en France.

Lire Plus

Économie

L’inflation tombe sous les 2 % pour la première fois depuis 2021

Article

le

L'inflation tombe sous les 2 % pour la première fois depuis 2021

L’inflation en France a chuté à 1,9 %, marquant une baisse significative pour la première fois depuis 2021, selon les derniers chiffres de l’Insee. Cette diminution est principalement due à la baisse des coûts de l’énergie, bien que certains produits continuent de voir leurs prix augmenter.

L’Insee a annoncé que l’inflation en France avait atteint 1,9 %, passant pour la première fois sous le seuil symbolique des 2 % depuis 2021. Ce recul notable s’explique en grande partie par une baisse marquée des prix de l’énergie, qui a contribué à ralentir l’augmentation globale des prix à un rythme plus rapide que prévu. Selon les statisticiens, ce ralentissement des prix énergétiques, en particulier ceux de l’électricité, du gazole et de l’essence, a été déterminant dans cette tendance.

Cependant, tous les secteurs ne suivent pas cette trajectoire descendante. Les prix des denrées alimentaires et des produits manufacturés continuent de grimper, ce qui maintient une pression sur les budgets des ménages. Dominique Schelcher, président de la Coopérative U, a confirmé que bien que l’ère de l’hyperinflation semble être derrière nous, les consommateurs ne perçoivent pas encore cette amélioration de manière significative dans leur panier. Il ajoute que les prix devraient continuer à baisser progressivement, mais qu’ils ne retrouveront probablement pas les niveaux antérieurs, en raison notamment de la nécessité de compenser les augmentations salariales.

Cette baisse de l’inflation, bien qu’anticipée par les experts, arrive plus tôt que prévu. La Banque de France avait initialement prévu que l’inflation repasserait sous la barre des 2 % au début de 2025, avec une baisse plus marquée au cours de l’année. Cependant, cette tendance s’est manifestée dès 2024, malgré des hausses ponctuelles des prix, notamment dans les services de transport, probablement en lien avec les préparatifs des Jeux Olympiques.

L’évolution positive de l’inflation est une nouvelle encourageante pour l’économie française, même si la baisse des prix ne se traduit pas uniformément dans tous les secteurs. Les prochains mois seront décisifs pour observer si cette tendance se maintient et si elle apportera un soulagement tangible aux consommateurs.

Lire Plus

Les + Lus