Un drame dans les Pyrénées : un chasseur face à la justice pour la mort d’une ourse
Un octogénaire comparaît pour avoir abattu une ourse en 2021 lors d’une battue. L’affaire relance le débat sur la cohabitation entre l’homme et la faune sauvage.
Un chasseur de 81 ans est jugé les 19 et 20 mars devant le tribunal correctionnel de Foix pour avoir tué une ourse en novembre 2021, lors d’une battue au sanglier dans les Pyrénées ariégeoises. L’homme, qui invoque la légitime défense après avoir été attaqué par l’animal, est accusé de « destruction d’espèce protégée ». L’ours brun, en voie de disparition dans le massif pyrénéen, bénéficie d’un programme de réintroduction depuis les années 1990. Quinze autres participants à la battue sont également poursuivis pour des infractions liées à la chasse dans une zone interdite, la réserve naturelle du Mont-Valier.
L’incident s’est produit près du Rocher de l’Aigle, à 1 300 mètres d’altitude. Le chasseur, surpris par la présence de deux oursons, a été chargé par leur mère, Caramelles, qui l’a grièvement blessé aux jambes avant qu’il ne riposte. Évacué par hélicoptère, il a survécu grâce aux premiers secours prodigués par une participante à la battue, également sapeur-pompier. Pour Jean-Luc Fernandez, président de la fédération de chasse de l’Ariège, l’homme n’avait pas d’autre choix que de se défendre. « Il a sauvé sa peau », résume-t-il.
Cependant, les associations de défense de l’environnement, dont Pays de l’Ours et One Voice, contestent cette version. Elles soulignent que la battue s’est déroulée dans une zone protégée, où la chasse est interdite. « Comment invoquer l’état de nécessité quand on a commis des infractions qui ont conduit à la mort d’une ourse reproductrice ? », interroge Alain Reynes, de l’association Pays de l’Ours. Les parties civiles, au nombre de vingt, réclament des sanctions exemplaires, allant jusqu’au retrait des permis de chasse et à la confiscation des armes.
Le procès relance le débat sur la cohabitation entre l’homme et l’ours dans les Pyrénées. Les éleveurs, notamment, dénoncent régulièrement les attaques de brebis par les plantigrades, qui ont causé la mort de plusieurs centaines de bêtes ces dernières années. Philippe Lacube, président de la chambre d’agriculture de l’Ariège, exprime sa solidarité avec les chasseurs, estimant que « c’est la présence de l’homme dans nos territoires de montagne qui est en question ».
Les associations écologistes, quant à elles, rappellent que la survie de l’espèce est en jeu. La disparition d’une femelle reproductrice comme Caramelles représente une perte significative pour une population estimée à 86 individus en 2023. Le verdict, attendu après délibéré, pourrait marquer un tournant dans la gestion des conflits entre activités humaines et protection de la biodiversité dans les Pyrénées.