À Taïwan, une fanfare entièrement féminine bouscule les traditions funéraires en mêlant musique rock, tenues audacieuses et rituels ancestraux. Dirigée par Hsu Ya-tzu, cette troupe unique redéfinit le deuil avec énergie et créativité.
Dans les campagnes taïwanaises, les funérailles prennent une tournure inattendue grâce à la fanfare Da Zhong. Composée exclusivement de femmes, cette formation musicale transforme les cérémonies en événements vibrants, mêlant saxophones, tambours et hits des années 80. Fondée il y a 50 ans par Huang Sa Hua, la belle-mère de Hsu Ya-tzu, la fanfare a évolué pour s’adapter aux goûts modernes tout en respectant les rites traditionnels.
Les performances débutent souvent à l’aube, avec des musiciennes vêtues de costumes blancs et bleus, arborant rouge à lèvres et bottes blanches. Leur répertoire, qui inclut désormais des titres rock comme « I Hate Myself for Loving You » de Joan Jett, apporte une touche contemporaine aux cérémonies. Pour Hsu Ya-tzu, 46 ans, il s’agit de rompre avec les mentalités rigides et de maintenir la pertinence de cette tradition dans un monde en mutation.
Les réactions des familles sont partagées. Si les plus âgés peuvent être réticents face à ces innovations, les jeunes générations apprécient cette approche dynamique. « Cela doit être animé, ça ne peut pas être trop calme », explique Chang Chen-Tsai, un directeur de pompes funèbres expérimenté. Pour lui, ces funérailles modernisées offrent une manière joyeuse de dire au revoir aux défunts.
Cependant, recruter de nouvelles membres reste un défi. Les horaires matinaux et la nature exigeante du travail dissuadent de nombreuses candidates. Pourtant, pour celles qui rejoignent la troupe, comme Huang Sa Hua il y a des décennies, c’est une opportunité de s’émanciper et de découvrir le monde au-delà du foyer familial.
Aujourd’hui, la fanfare Da Zhong ne se limite plus aux funérailles. Elle anime également des anniversaires, des événements d’entreprise et des galas, prouvant que cette tradition musicale peut s’adapter à tous les contextes. Pour Hsu Ya-tzu, l’avenir de la fanfare repose sur l’énergie des jeunes générations. « Ce travail a besoin de jeunes pour aller de l’avant », confie-t-elle, déterminée à perpétuer cette tradition tout en la réinventant.
Ainsi, à Taïwan, la fanfare Da Zhong incarne une fusion unique entre passé et présent, où le deuil devient une célébration de la vie, rythmée par des mélodies rock et des tenues audacieuses. Une révolution musicale qui résonne bien au-delà des cérémonies funéraires.