Planète
Climat: et si ça basculait… dans le bon sens ?
Le verre de la lutte contre le changement climatique est-il à moitié plein ou à moitié vide?
Côté sombre, le patron de l’ONU Antonio Guterres a récemment alerté que les engagements internationaux étaient loin de l’objectif de l’accord de Paris, limiter le réchauffement à moins de deux degrés par rapport à l’ère pré-industrielle.
Côté optimiste, au delà des promesses des grands pollueurs sur une future neutralité carbone, les engagements se multiplient au niveau des secteurs économiques, et la pandémie mondiale a fait prendre conscience des fragilités du système.
« Le balancier va-t-il dans la bonne direction? Absolument », estime ainsi Gernot Wagner, économiste du climat à la New York University. Pour lui, aux Etats-Unis « tout arrive en même temps: le gouvernement fédéral de « Washington, la Silicon Valley, Detroit (l’automobile), Wall Street… »
Une conjonction favorable que les chercheurs appellent « point de bascule sociologique », seuil à partir duquel un mouvement devient irréversible.
Pour l’automobile par exemple, « le point de bascule mondial viendra quand le prix des véhicules électriques sera le même que celui des modèles thermiques, » explique Tim Lenton, professeur en sciences de la Terre à l’université britannique d’Exeter et co-auteur d’une récente étude sur ces basculements dans la lutte contre la crise climatique.
L’étude prend notamment l’exemple de la Norvège, premier pays au monde à passer l’an dernier le cap des 50% de véhicules électriques vendus.
Ironiquement, les incitations fiscales très avantageuses ayant favorisé cette bascule s’appuient sur une richesse principalement basée sur les hydrocarbures, mais le mouvement mondial vers l’électrique est bien réel.
Le Royaume-Uni vient ainsi d’avancer à 2030 l’interdiction des ventes de voitures thermiques, 2035 pour les hybrides. Echéance à laquelle l’américain General Motors, un des plus grands constructeurs mondiaux, a également annoncé son intention de ne plus construire de voitures à émissions polluantes.
Morale
Autre secteur où les choses bougent: la finance, aiguillonnée par des groupes de pression qui militent pour que les gestionnaires se désengagent des secteurs polluants.
Minoritaire au départ, ce type de mouvement finit par avoir une dynamique propre, estime Ilona Otto, du centre d’études du changement climatique de l’université autrichienne de Graz, auteure d’une étude sur ces questions: « Selon des simulations, si 9% des investisseurs se retirent les autres suivront par crainte d’être en retard sur le mouvement et de perdre de l’argent ».
La chercheuse établit un parallèle avec la lutte contre l’esclavage aux XVIII et XIXe siècles, quand des activistes aux motivations morales ont dû affronter un système économique profondément enraciné: « Il arrivera un jour où il sera aussi impensable d’utiliser des énergies fossiles que de posséder des esclaves ».
Cet aspect moral de la lutte pour le climat est de plus en plus visible, notamment dans le mouvement planétaire de jeunes pour le climat et son égérie, la Suédoise Greta Thunberg.
« L’inquiétude sur l’urgence climatique est bien plus prégnante qu’avant », relève Stephen Fisher, professeur de sociologie politique à l’université d’Oxford, qui a piloté une enquête pour l’ONU, sondant 1,2 million de personnes dans 50 pays. Plus de 60% se disaient inquiètes, dont « la grande majorité veulent des actions urgentes et d’envergure ».
Et pour les gouvernants, la rationalité socio-économique peut alors se trouver du côté du changement.
En Chine par exemple, le pouvoir considérait il y a peu la neutralité carbone comme un handicap économique, relève Pan Jiahua, de l’Université technologique de Pékin. « Aujourd’hui, le consensus est que c’est une occasion de création d’emplois, de croissance et de transformation de la société ». Et le président Xi Jinping a récemment fixé à 2060 l’horizon pour la neutralité carbone pour son pays.
Non-retour
Mais ces évolutions se heurtent encore à la réalité des chiffres: les énergies fossiles représentent encore 85% de l’énergie consommée dans le monde, subventionnées à hauteur de 500 milliards de dollars chaque année, selon l’OCDE.
« Un pic structurel dans les émissions » s’annonce cependant, estime Kingsmill Bond de l’ONG Carbon Tracker. Car avant même le trou d’air dans la demande énergétique causé par la crise du Covid-19, « les énergies renouvelables avaient presque atteint le point de bascule », souligne cet analyste.
Ainsi, une récente étude de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) et du gestionnaire du réseau électrique français RTE estimait que la France pourrait, sous conditions, tirer l’essentiel de son électricité des renouvelables à l’horizon 2050.
Pour lutter contre la crise climatique, l’espoir est que ces différents points de bascule se déclenchent et que leurs effets s’additionnent. « Il faut une synergie pour qu’un changement profond puisse intervenir, » prévient Jonathan Donges, du Potsdam Institute for Climate Impact Research (PIK, Allemagne).
Car la bascule peut aussi se faire dans l’autre sens, et de nombreux climatologues mettent en garde sur les « points de non-retour » qui menacent l’avenir de la planète: l’augmentation des températures pourrait ainsi faire fondre les glaces et monter les océans de plus d’une dizaine de mètres. Ou dégeler le permafrost, libérant les tonnes de CO2 qui y sont prisonnières…
Pour Tim Lenton, la conclusion est claire: « Si nous voulons éviter les points de non-retour, nous devons actionner les points de bascule positifs ».
Planète
Inde: la capitale New Delhi ferme la majorité des classes en raison de la pollution
La capitale indienne ferme la majorité des écoles face à une qualité de l’air désastreuse.
La pollution atmosphérique à New Delhi a atteint un niveau critique, forçant les autorités à prendre des mesures drastiques. La capitale indienne, régulièrement classée parmi les villes les plus polluées au monde, fait face à une nouvelle crise environnementale qui bouleverse le quotidien de ses habitants.
Les niveaux de particules fines PM 2,5, particulièrement nocives pour la santé, ont été mesurés à des concentrations 57 fois supérieures aux normes de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ce week-end. Bien que ces niveaux aient légèrement diminué à 39 fois les seuils recommandés lundi matin, la situation reste alarmante. Ces particules, qui peuvent pénétrer profondément dans les poumons et même entrer dans la circulation sanguine, sont associées à des risques accrus de maladies cardiovasculaires et de cancer.
Face à cette situation, la ministre en chef Atishi a annoncé la fermeture des écoles pour tous les niveaux sauf les classes de 10ème et 12ème. Cette décision vise à protéger les élèves les plus vulnérables tout en permettant aux étudiants de terminale de poursuivre leurs études en vue de leurs examens importants. Les écoles primaires étaient déjà passées à l’enseignement à distance depuis jeudi dernier, une mesure maintenant étendue à presque tous les niveaux d’enseignement.
Les causes de cette pollution sont multiples : les feux agricoles dans les régions avoisinantes, les émissions industrielles et le trafic routier dense contribuent tous à cette situation. Chaque hiver, New Delhi et sa région métropolitaine, qui abritent 30 millions d’habitants, souffrent de ce fléau saisonnier. Les autorités tentent de limiter l’impact en imposant des restrictions sur les chantiers et la circulation des véhicules diesel.
Le gouvernement appelle également les populations sensibles, comme les enfants, les personnes âgées et celles souffrant de maladies pulmonaires ou cardiaques, à rester chez elles. Toutefois, pour beaucoup de résidents, la possibilité d’éviter l’exposition à l’air pollué est limitée par des conditions de logement précaires et l’absence de moyens pour se procurer des purificateurs d’air.
L’hiver, avec ses températures plus basses et ses vents faibles, aggrave la situation en piégeant les polluants dans l’atmosphère. En réponse à cette crise récurrente, la Cour suprême de l’Inde a récemment affirmé que le droit à un air pur est un droit fondamental, exigeant des actions concrètes de la part des gouvernements.
Cette situation soulève des questions sur la durabilité des mesures prises et la nécessité d’une stratégie à long terme pour améliorer la qualité de l’air dans la capitale indienne.
Planète
France : une réduction ambitieuse de la consommation d’énergies fossiles pour 2030
Dans un effort sans précédent pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 50 % par rapport à 1990, la France annonce une baisse drastique de sa dépendance aux énergies fossiles d’ici 2030. Cette transition repose sur l’électrification et la décarbonation des secteurs clés, afin de faire face aux enjeux climatiques et de souveraineté.
Le gouvernement français a dévoilé lundi sa feuille de route pour l’énergie et le climat jusqu’en 2050, annonçant des mesures ambitieuses pour réduire l’empreinte carbone du pays. Selon la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) et la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC), les énergies fossiles, qui représentaient 60 % de la consommation finale en 2022, ne compteront plus que pour 42 % d’ici 2030. L’objectif est de réduire cette part à 30 % en 2035 avant d’atteindre zéro en 2050, marquant une transition vers une énergie entièrement décarbonée.
La ministre de l’Énergie, Olga Givernet, a souligné la nécessité d’une action combinée de sobriété et d’efficacité énergétique, associée au développement massif des énergies sans carbone. Ce plan repose également sur un mix énergétique équilibré entre le nucléaire et les énergies renouvelables, marquant une approche duale pour sécuriser les besoins énergétiques futurs. « Ce n’est pas qu’une question d’énergie, c’est un choix de société », a affirmé la ministre, exprimant la portée sociétale de cette transition.
Les grandes lignes de cette stratégie n’étaient pas inédites, puisque la « planification écologique » et le Plan national intégré énergie-climat (Pniec), transmis à la Commission européenne en juillet dernier, en avaient déjà esquissé les contours. Toutefois, leur adoption avait été retardée par des enjeux politiques internes, notamment la dissolution de la précédente assemblée.
Le plan met en avant l’électrification de nombreux usages, dans la mobilité, l’industrie, et le bâtiment. Ainsi, la France projette de porter les ventes de voitures électriques à deux tiers des ventes totales d’ici 2030, avec une proportion de 15 % dans le parc automobile d’ici la fin de la décennie, contre 2,2 % début 2024. Le secteur du bâtiment est également ciblé, avec un objectif de réduction des émissions de CO₂ à 35 millions de tonnes en 2030, par rapport aux 62 millions de tonnes en 2022, grâce à la rénovation de 400 000 maisons et 200 000 logements collectifs par an, et au remplacement des chaudières au fioul.
L’Union française de l’électricité (UFE) a insisté sur l’importance d’un « Plan d’électrification des usages » intégrant des impératifs de compétitivité et de souveraineté énergétique. De son côté, le Syndicat des énergies renouvelables (SER) a salué ce projet pour sa portée en matière de compétitivité économique et de lutte contre le réchauffement climatique, malgré un contexte budgétaire contraignant.
Pour atteindre cette transformation, la consommation d’électricité, essentiellement d’origine décarbonée grâce au parc nucléaire, devra augmenter. Parallèlement, un effort de sobriété énergétique est requis pour réduire la consommation totale de 30 % d’ici 2030 par rapport à 2012, puis de 50 % en 2050. La ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, a mis en avant l’aspect préventif de ces mesures, en rappelant les coûts croissants des catastrophes climatiques. Elle a évoqué le récent drame à Valence, en Espagne, pour illustrer l’urgence de freiner les émissions de gaz à effet de serre.
Les documents de cette feuille de route seront soumis à la concertation publique jusqu’au 15 décembre, puis au Haut conseil pour le climat avant la publication des décrets d’application prévue en 2025. Le Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC-3), publié récemment, anticipe quant à lui un réchauffement de 4°C d’ici la fin du siècle en France, soulignant la gravité des enjeux et la nécessité de concrétiser cette transformation.
France
Un mois de septembre record, 40% de pluies en plus en octobre en France
Les précipitations d’octobre 2024 en France ont dépassé de 40 % la normale, accompagnées d’inondations ravageuses dans le sud et le centre-est. Un mois particulièrement pluvieux et chaud, qui s’inscrit dans une tendance climatique préoccupante.
La France a connu en octobre 2024 un niveau de précipitations inédit pour cette saison, avec une augmentation de 40 % par rapport aux moyennes saisonnières. Bien que ce mois ne figure pas parmi les dix octobres les plus arrosés historiquement, il enregistre des cumuls de pluie exceptionnels dans plusieurs régions, notamment en Provence et dans les Cévennes. En moyenne, 132 mm de pluie sont tombés à l’échelle nationale, avec des niveaux atteignant jusqu’à trois fois la normale sur certains territoires.
Ces précipitations intenses ont entraîné des épisodes d’inondations à répétition, marqués par des événements particulièrement graves dans le centre-est du pays, entre le 15 et le 18 octobre, durant lesquels plusieurs départements ont été placés en vigilance rouge. Cet épisode cévenol, qualifié de sans précédent par la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, a vu des niveaux record, comme à Mayres en Ardèche où près de 700 mm de pluie se sont abattus en deux jours.
L’instabilité météorologique n’a pas épargné le Var et les Alpes-Maritimes, touchés par un second épisode pluvieux du 24 au 27 octobre. À Vidauban, 119 mm de pluie sont tombés en une heure, un phénomène jamais observé dans cette région. Ce déferlement de précipitations a inondé une partie du bassin parisien et certaines zones du sud-ouest, tandis que des crues ont frappé des villes de Seine-et-Marne et d’Eure-et-Loir.
Ces perturbations sont en partie attribuées à la dépression Kirk, qui a traversé le pays le 9 octobre, générant des vents violents, avec des pointes à 211 km/h enregistrées dans les Pyrénées-Atlantiques. Ce jour-là, des précipitations records pour un mois se sont abattues en seulement 24 heures, provoquant la montée rapide de certains cours d’eau et des inondations dans des zones sensibles.
Parallèlement à ces événements, les températures se sont également maintenues au-dessus des normales saisonnières, enregistrant une moyenne de 1,6°C de plus que la période de référence 1991-2020. Si le début du mois a offert une légère fraîcheur, octobre a principalement connu des températures élevées, notamment dans le sud-est. Cette anomalie thermique, associée à un ensoleillement réduit de 20 %, renforce les signes d’un changement climatique en cours.
Les experts, bien que prudents quant à une attribution directe au réchauffement climatique sans études approfondies, rappellent que le réchauffement global, en augmentant la quantité de vapeur d’eau dans l’atmosphère, tend à intensifier la fréquence et l’intensité des épisodes météorologiques extrêmes. L’automne 2024, marqué par des excédents de précipitations et une anomalie thermique persistante, s’inscrit ainsi dans une série d’événements climatiques qui questionnent l’avenir des régions concernées.
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