Monde
Le Congolais Sammy Baloji veut réactiver la mémoire de l’art africain
Durant quatre siècles d’échanges avec l’Europe, l’art africain a été instrumentalisé, catégorisé de façon simpliste, voire oublié: l’artiste congolais Sammy Baloji présente aux Beaux-Arts de Paris une oeuvre qui « réactive la mémoire » et « se réapproprie » cette histoire.
« C’est l’espace vide de l’Histoire qui m’intéresse. Je veux faire parler ces espaces oubliés », explique l’artiste de 41 ans, originaire de Lubumbashi (sud de la République démocratique du Congo), qui dit travailler sur « les généalogies ».
Sammy Baloji a gravé sur sept plaques de bronze (« Negative of luxury cloth ») les motifs des tissus et coussins que le roi du Kongo, un royaume de l’Afrique du Sud-Ouest, envoyait au XVIe siècle vers le Portugal et le Vatican comme cadeaux diplomatiques.
Sur ses tableaux aux couleurs vives et à l’énergie cinétique (« Wunderkammer, work in progress »), Sammy Baloji a repris les fils verticaux des métiers à tisser traditionnels.
« Le tissage est une des techniques que nous partageons tous, et même l’ordinateur fonctionne sur son système binaire », dit l’artiste.
Roi, jésuites et marchands
Suspendues au dessus de ses oeuvres, quatre « tentures des Indes », des tapisseries du XVIIIe siècle de la Manufacture des Gobelins, représentent des personnes noires dans des univers fantasmés.
La recherche sur l’histoire oubliée, Sammy Baloji l’a faite dans des archives et auprès des musées. Au XVIe siècle, le Kongo était un riche royaume sur l’Atlantique, dont le territoire se partage aujourd’hui entre Congo-Brazzaville, République démocratique du Congo et Angola.
Les échanges entre son roi converti au christianisme, le Vatican et le Portugal, les allées et venues des marchands et des jésuites: ce relatif équilibre sombre avec le commerce triangulaire et la déportation vers l’Amérique des populations. Et les savoirs se perdent.
Pourquoi Sammy Baloji travaille-t-il le bronze? C’est que l’extraction du cuivre, composant du bronze, l’a accompagné depuis sa naissance en 1978 à Lubumbashi, non loin de l’usine de la Gécamines, société qui administrait les mines depuis l’époque coloniale.
« Le cuivre, ça avait commencé avec la production de croix à destination de l’Europe », raconte-t-il.
Les Beaux-Arts ont ouvert leur plus belle salle à cet artiste qui s’impose sur la scène contemporaine pour sa création puissante soutenue par une réflexion sur la colonisation.
Cet ancien pensionnaire de la Villa Médicis à Rome, qui a participé à la Biennale de Venise et à la Documenta à Cassel, n’aime pas être catégorisé « artiste africain ». Il a exposé à Paris (récemment au Grand Palais), New York, Washington, Londres, Sydney et en RDC, creuset d’une création foisonnante.
Objet ethnographique
Sammy Baloji a enquêté sur l’itinéraire des objets venus en Europe. Beaucoup, amenés par les jésuites, ont été exposés dans les cabinets de curiosité à la Renaissance, avant de perdre leur identité propre dans des musées d’histoire naturelle et des expositions universelles, explique-t-il.
A l’exposition de 1897 organisée à Bruxelles par Léopold II, en pleine colonisation belge, « l’Art nouveau » va ainsi intégrer beaucoup de motifs Kongo.
« A un certain moment, l’homme noir va devenir un objet ethnographique. L’ethnographie, c’est la science coloniale. L’histoire de l’art se crée alors autour d’une vision eurocentrique », souligne-t-il.
C’est seulement dans les années 1920 que naîtra le concept d' »art nègre ».
Interrogé sur les restitutions, l’artiste, même s’il est favorable à l’idée, répugne à entrer dans un débat complexe. « En Afrique, note-t-il, les musées fonctionnent d’après des scénographies héritées de l’Europe ».
L’exposition, dans le cadre de la « Saison Africa2020 », est aussi présentée avec le Festival d’Automne, qui devait avoir lieu de décembre à janvier et que le Covid a repoussé à juin-juillet.
– Sammy Baloji, Beaux-Arts de Paris, jusqu’au 18 juillet
Europe
Arrestation du fils de la princesse de Norvège soupçonné de viol
Les forces de l’ordre norvégiennes ont procédé à l’arrestation de Marius Borg Høiby, 27 ans, suspecté d’agression sexuelle. Les détails de l’affaire commencent à émerger.
Lundi soir, les autorités norvégiennes ont mis sous les verrous Marius Borg Høiby, fils de la princesse héritière Mette-Marit, dans le cadre d’une enquête pour viol. Le jeune homme de 27 ans est accusé d’avoir eu un rapport sexuel avec une personne incapable de donner son consentement, selon les déclarations de la police. Cet incident est décrit comme un acte sexuel sans pénétration, où la victime était dans un état d’inconscience ou de faiblesse l’empêchant de s’opposer.
Les investigations ont rapidement progressé. Une perquisition a été menée au domicile de Høiby, où des éléments matériels ont été saisis. Cette arrestation fait suite à une précédente interpellation en août, lors d’une altercation nocturne à Oslo, où Høiby était accusé de violences domestiques. À cette occasion, un couteau avait été découvert planté dans un mur de la chambre de la femme impliquée, avec laquelle il entretenait une relation.
La situation s’est encore compliquée en septembre, lorsque Høiby a été arrêté pour avoir enfreint une ordonnance de protection. La police a révélé qu’au moment de son arrestation lundi, il se trouvait en compagnie de la même femme qui avait été impliquée dans l’incident d’août. Les charges contre lui se sont élargies pour inclure des accusations de violences domestiques.
Marius Borg Høiby, né d’une relation antérieure de Mette-Marit avant son mariage avec le prince héritier Haakon, n’a pas de rôle officiel au sein de la famille royale, contrairement à ses demi-frères et sœurs, la princesse Ingrid Alexandra et le prince Sverre Magnus. La police n’a pas encore décidé si Høiby serait placé en détention provisoire, laissant l’avenir judiciaire du jeune homme en suspens.
Cet événement soulève des questions sur les dynamiques familiales au sein de la royauté norvégienne et sur la manière dont la justice traite les affaires impliquant des personnalités publiques. La Norvège, connue pour son système judiciaire transparent et équitable, devra naviguer avec soin dans cette affaire délicate, assurant à la fois la protection des droits de la victime et le respect des procédures légales.
Europe
Russie : Vladimir Poutine signe un décret permettant un recours plus large à l’arme nucléaire
Face à la montée des tensions avec l’Occident, Vladimir Poutine a modifié la doctrine nucléaire russe, permettant un recours plus large à l’arsenal atomique en cas de menaces jugées sérieuses.
L’annonce de la signature par le président russe Vladimir Poutine d’un décret élargissant les conditions d’emploi des armes nucléaires marque une nouvelle étape dans l’escalade des tensions internationales. Ce décret intervient après que les États-Unis ont permis à l’Ukraine d’utiliser des missiles à longue portée contre la Russie, signalant une évolution stratégique dans le conflit.
Le document, signé le 19 novembre, modifie substantiellement la politique nucléaire russe. Désormais, toute attaque contre la Russie par un État non nucléaire, mais soutenu par une puissance nucléaire, sera considérée comme une agression conjointe. Cette révision reflète une adaptation de la Russie à ce qu’elle perçoit comme des menaces croissantes à sa sécurité, selon les dires du Kremlin. Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a justifié cette mesure en expliquant qu’il était impératif de réajuster les fondements de la doctrine nucléaire face aux défis actuels.
Cette décision intervient à un moment où les relations entre la Russie et l’Occident sont particulièrement tendues. Fin septembre, Poutine avait déjà fait état de sa volonté d’utiliser l’arme nucléaire en réponse à une attaque aérienne massive contre le territoire russe, une menace qui a été réitérée par la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, indiquant que la réponse de la Russie serait proportionnée et décisive.
La Russie accuse également l’Ukraine d’avoir utilisé des missiles de longue portée fournis par les États-Unis pour frapper la région de Briansk. Selon les informations relayées par le ministère russe de la Défense, six missiles ATACM ont été lancés, dont cinq ont été interceptés par la défense antiaérienne russe. Les débris auraient causé des dommages mineurs à un site militaire, attisant encore la tension dans la région.
Cette escalade dans la rhétorique et les actions nucléaires soulève des inquiétudes quant à une possible intensification du conflit, déjà marqué par des échanges de prisonniers et des accusations réciproques d’agressions. La signature de ce décret par Poutine pourrait être interprétée comme une tentative de dissuasion, mais aussi comme une manifestation de l’intention de la Russie de protéger ses intérêts par tous les moyens, y compris les plus extrêmes.
Économie
Climat, guerres, Trump: le G20 sous pression en sommet à Rio
Le sommet du G20 à Rio de Janeiro se tient sous haute tension, avec des enjeux climatiques et géopolitiques majeurs, et l’influence croissante de Donald Trump.
Le sommet du G20, qui réunit les dirigeants des économies les plus influentes du monde, a débuté à Rio de Janeiro dans un contexte marqué par des défis climatiques pressants et des tensions géopolitiques exacerbées. Les discussions, qui se déroulent dans un cadre de plus en plus instable, sont dominées par la nécessité de trouver des accords sur le financement climatique et la gestion des conflits internationaux, tout en anticipant le retour de Donald Trump à la présidence américaine.
Les dirigeants du G20, représentant une part significative du PIB mondial et des émissions de gaz à effet de serre, sont confrontés à l’urgence d’agir pour le climat. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a appelé à des compromis pour garantir un résultat positif à la prochaine conférence sur le climat, la COP29. Cependant, les divergences sur les questions climatiques et les conflits en cours, notamment en Ukraine et au Proche-Orient, rendent les négociations particulièrement ardues. La Russie, absente du sommet, continue d’influencer les discussions par son conflit avec l’Ukraine, tandis que la situation à Gaza et au Liban ajoute une complexité supplémentaire.
Le président argentin Javier Milei, connu pour ses positions ultralibérales et climatosceptiques, introduit une incertitude supplémentaire. Buenos Aires a exprimé des réserves quant à l’adhésion à un communiqué commun, ce qui pourrait entraver les efforts de consensus. De son côté, le président brésilien Lula da Silva, hôte du sommet, souhaite recentrer les débats sur les enjeux sociaux et la lutte contre la pauvreté, avec le lancement d’une Alliance globale contre la faim et la pauvreté, et la proposition d’une taxation des plus riches, déjà discutée entre les ministres des Finances du G20.
L’ombre de Donald Trump, qui devrait revenir à la Maison Blanche en janvier, plane sur le sommet. Joe Biden, en visite en Amazonie, a envoyé un message fort sur la nécessité de protéger l’environnement, soulignant le risque d’un affaiblissement des ambitions climatiques mondiales sous une nouvelle administration républicaine. Cette perspective alimente les craintes d’une fragmentation internationale accrue et d’un retour en arrière sur les engagements climatiques.
Les discussions bilatérales de Xi Jinping avec d’autres dirigeants illustrent également l’importance croissante des pays émergents et des visions alternatives dans un ordre mondial en pleine mutation. Selon Oliver Stuenkel, professeur en relations internationales, le monde entre dans une phase d’imprévisibilité accrue, où les pays du Sud et la Chine auront plus d’espace pour articuler leurs propres stratégies.
Le G20 de Rio de Janeiro se tient à un moment critique où les leaders doivent naviguer entre les impératifs climatiques, les conflits internationaux et les changements politiques majeurs, tout en cherchant à maintenir un semblant d’unité et d’action collective.
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