Le métal précieux, exporté massivement vers les Émirats arabes unis, finance les belligérants dans un conflit dévastateur.
Au cœur d’une guerre civile déchirant le Soudan depuis avril 2023, l’or est devenu une ressource stratégique. Loin de bénéficier à une population appauvrie, cette richesse naturelle alimente les caisses des factions armées, notamment via des circuits opaques centrés sur les Émirats arabes unis. Les deux camps rivaux, l’armée régulière et les Forces de soutien rapide (FSR), tirent profit de ce commerce pour financer leurs opérations militaires.
Malgré l’effondrement économique du pays, les exportations officielles d’or ont atteint des niveaux records en 2024, selon les autorités soudanaises. Pourtant, une part considérable de la production échappe au contrôle de l’État, transitant par des réseaux de contrebande vers des pays voisins avant de rejoindre Dubaï. Les Émirats, plaque tournante mondiale de l’or, rejettent toute accusation de complicité, affirmant respecter scrupuleusement les réglementations.
Sur le terrain, les mines des régions frontalières, notamment au Darfour, sont contrôlées par les FSR, dont le chef, Mohamed Hamdane Daglo, aurait bâti un empire financier grâce au trafic aurifère. Des sociétés écrans et des filiales basées aux Émirats permettraient de blanchir ces revenus, utilisés pour acheter des armes et consolider son influence. Du côté gouvernemental, des entreprises liées à l’armée exploitent également des gisements, avec des exportations principalement dirigées vers Dubaï.
Les preuves s’accumulent sur l’ampleur de ce trafic. Des rapports indiquent que les Émirats importent bien plus d’or que les capacités déclarées par les pays voisins du Soudan, suggérant des flux illicites massifs. Malgré les dénégations émiraties, les observateurs dénoncent un manque de contrôles rigoureux, facilitant le blanchiment de l’or issu des zones de conflit.
Cette économie parallèle prolonge une guerre déjà meurtrière, privant le Soudan de ressources vitales. Tandis que les belligérants se disputent le contrôle des mines, la population subit les conséquences d’un conflit financé par l’exploitation clandestine de ses richesses.