Malgré des mois de contestation, une partie des Serbes continue de faire confiance à leur président, entre sécurité revendiquée et clientélisme assumé.
En plein cœur des tensions politiques qui agitent la Serbie, le pouvoir en place tente de prouver qu’il conserve un socle de soutien populaire. Alors que des centaines de milliers de manifestants dénoncent corruption et injustice sociale, certains citoyens, notamment dans les zones rurales, affichent une loyauté sans faille envers le chef de l’État.
À Pecinci, petite ville située à une cinquantaine de kilomètres de Belgrade, le parti au pouvoir a remporté près de 85 % des voix lors des dernières élections locales. Pour Marija, une aide-soignante, le président incarne avant tout la stabilité. « On vit en sécurité, sans craindre les bombardements », confie-t-elle, évoquant le traumatisme encore vivace des frappes de l’OTAN en 1999. Elle déplore les perturbations causées par les manifestations, qui compliquent le quotidien des travailleurs comme son mari.
Pourtant, le mouvement de protestation, né après l’effondrement meurtrier d’un auvent à Novi Sad, ne faiblit pas. Étudiants et citoyens bloquent régulièrement les rues, paralysant écoles et transports. Une situation qui exaspère certains, comme Srbijanka, qui accuse les manifestants d’être manipulés par l’étranger. « C’est une minorité bruyante », affirme-t-elle, convaincue que les médias exagèrent l’ampleur des mobilisations.
Selon les analystes, le pays se polarise entre deux blocs irréconciliables : d’un côté, les partisans du président, souvent âgés et moins éduqués, séduits par les promesses économiques ; de l’autre, une jeunesse et une frange urbaine exaspérées par le clientélisme et le manque de transparence. « Les retraités et les bénéficiaires des emplois publics constituent une base électorale solide », explique un expert, soulignant l’importance des investissements locaux et des augmentations de salaires dans le maintien de cette fidélité.
Angelina, une retraitée de Pecinci, résume ce sentiment : « J’ai de quoi vivre, alors pourquoi protester ? » Pourtant, même parmi les soutiens, certains admettent, comme Aleksandar, un ouvrier fataliste, que la situation politique est loin d’être idéale. « On mériterait mieux, mais ça ne changera pas », lâche-t-il, résigné.
Entre défiance et loyauté, la Serbie semble ainsi prise dans un face-à-face où chaque camp se radicalise, sans perspective de dialogue.