Corsica Linea
Nous rejoindre sur les réseaux

Exclusif

Justice : la société Midi Libre reconnue coupable de faute inexcusable après le suicide d’un chef d’agence

Article

le

©Midilibre

La Cour d’Appel de Montpellier a rendu son jugement le 1er décembre 2021 et a condamné le journal Midi Libre dans le cadre du suicide d’un de ses employés. François Charcellay était journaliste et chef de l’agence Midi Libre de Nîmes. Il s’était donné la mort à son domicile, dans la nuit du 19 au 20 mars 2014.

François CHARCELLAY est entré chez Midi Libre en 1997. À sa demande, il a été transféré de l’agence de Sète, après plus de 10 ans de services, vers l’agence de Montpellier en 2008, avant d’être affecté à l’agence de Nîmes en octobre 2009, en qualité de chef d’agence. C’est notamment à partir de ce moment que les conditions de travail se seraient détériorées. Dans une lettre, écrite un mois avant son décès, il déplorait : « J’entame ma cinquième année comme chef d’agence Midi Libre à Nîmes. Je m’y suis épuisé. Un épuisement dû à des conditions de travail parfois insupportables. »

Des conditions de travail qui semblaient avoir un impact très important sur la santé mentale et physique du journaliste. Selon son médecin traitant, « il présentait une hypotension orthostatique, avait un poids fluctuant entre 72 et 77 kilos pour 1m86 sur un fond d’anorexie. Son état d’anxiété était tel qu’il en était devenu insomniaque. […] Il présentait également des épisodes cutanés de type eczéma. Son état de santé a nécessité un traitement d’antidépresseurs et d’anxiolytiques.» C’est pour mettre fin à son mal-être que le journaliste s’est suicidé dans la nuit du 19 au 20 mars 2014. Dans sa lettre d’adieu, datée du 15 mars 2014, il s’adressait à son épouse : « Je suis épuisé, depuis des mois, par mes conditions de travail. De plus, tu sais que dans l’entreprise qui est Midi Libre, personne ne s’est jamais préoccupé des conditions matérielles et financières que mon affectation a engendré sur notre situation financière. »

Midi Libre attaqué en justice

Témoin de premier rang de la situation que traversait son mari, c’est Julienne CHARCELLAY qui a pris l’initiative de cette procédure à l’encontre de la SA Midi Libre en 2015. Lors d’un premier jugement, rendu le 6 novembre 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale (TASS), Midi Libre avait été condamné. Le média occitan avait fait appel de la décision. Midi Libre avait mis en avant une lettre, adressée à son épouse, en date du 28 décembre 2009, dans laquelle François CHARCELLAY pointait du doigt des difficultés personnelles avant même que surviennent ses problèmes professionnels. Toutefois, l’arrêt émis par la Cour d’Appel de Montpellier a confirmé le premier jugement qui a qualifié cet incident comme un accident de travail. « Le suicide de M. François Charcellay est, comme tout suicide, un phénomène multifactoriel dépourvu d’une cause unique, il a été déterminé essentiellement par la dégradation des conditions de travail du salarié qui se trouvait pris entre les contraintes de son environnement professionnel et les exigences de sa direction qui ne lui allouait pas les ressources nécessaires pour y faire face. Dès lors, le suicide du salarié est survenu du fait du travail et constitue bien un accident du travail. »

De plus, la cour a aussi reconnu une faute de l’employeur et donc de Midi Libre. Dans l’arrêt émis par la Cour d’Appel de Montpellier, on peut lire : « L’employeur, qui a soumis durant plusieurs mois le salarié à une dégradation continue de ses conditions de travail, et qui a reçu à plusieurs reprises ses doléances, aurait dû avoir conscience du danger auquel se trouvait exposé le salarié et prendre les mesures nécessaires pour l’en préserver. Tel n’est pas le cas en l’espèce, de l’aveu même de l’employeur qui explique n’avoir pu prendre aucune mesure de protection faute de conscience du danger. Dès lors, l’employeur a bien commis une faute inexcusable. »

Néanmoins, cette décision exécutoire n’est pas définitive, Midi Libre peut se pourvoir en cassation jusqu’à deux mois après la décision de justice. Selon nos informations, il ne devrait pas y avoir de pourvoi en cassation. Maître Isabelle MOLINIER, l’avocate de Mme CHARCELLAY, commentait notamment, « ce sont deux bonnes décisions qui ont été rendues puisque la Cour d’Appel n’a fait que confirmer le jugement de première instance, reconnaissant que monsieur Charcellay avait souffert de harcèlement moral important, conduisant malheureusement à son suicide. La faute inexcusable de l’employeur a été confirmée par cette même Cour d’Appel. »

En outre, Midi Libre doit verser la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts à Madame Charcellay, ainsi que 1 500 € au titre des frais irrépétibles d’appel.


Le suicide, un sujet toujours tabou

« J’ai parfois eu des pensées suicidaires et j’en suis peu fier ». Ces paroles sont celles du dernier single de Stromae. L’artiste belge a chanté L’enfer, son nouveau morceau pour la première fois le 9 janvier en direct du 20 heures sur TF1. Cette performance n’est pas restée sous silence et s’avère même d’utilité publique selon certains spécialistes.

Charles-Edouard Notredame, coordinateur adjoint du 3114 rapportait une « hausse sensible » des appels suite au passage de Stromae. « Il y a des gens qui nous appellent et qui font référence explicitement au fait qu’ils ont vu Stromae à la télé. De manière très claire, on a un effet Stromae », soulignait-il au micro de BFM TV. De son côté, Nicolas Rainteau, psychiatre au CHU de Montpellier déclarait sur Twitter que « L’impact qu’a eu Stromae en trois minutes, je ne l’aurais jamais en une vie de psychiatre ! Ceux qui ont connu la dépression savent que ce n’est pas évident d’en parler. Lui décide de le faire ».

Avoir des idées suicidaires n’est pas anodin. Si vous vous sentez concerné ou que vous avez besoin d’aide, des professionnels de santé sont là pour aider. N’hésitez pas à prendre contact avec des centres médico-psychologiques ou les services d’urgences des hôpitaux. Il est aussi possible de contacter le 3114, le numéro national de prévention du suicide.

——————————————————————————-

Si vous avez des informations à nous communiquer, vous pouvez nous contacter à l’adresse enquete@lesinguliersete.fr – Si vous souhaitez adresser des documents en passant par une plateforme hautement sécurisée, vous pouvez vous connecter au site tipbox.is

Télécharger l’application Le Singulier > IOS (iPhone) > Android (Samsung) <

À LIRE AUSSI > Justice – Sète: François Commeinhes condamné pour favoritisme à une peine de 10 mois de prison avec sursis

Click to comment

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Les + Lus