Le Parlement européen ferme ses portes à Huawei : une affaire de corruption secoue l’institution
L’accès des lobbyistes du géant chinois est suspendu après des perquisitions et des soupçons de pratiques illégales. Une enquête judiciaire est en cours.
Le Parlement européen a pris une décision radicale ce vendredi en interdisant temporairement l’accès à ses locaux de Bruxelles et Strasbourg à tous les représentants et lobbyistes de Huawei. Cette mesure, qualifiée de « précautionnaire » par une porte-parole de l’institution, fait suite à des allégations de corruption impliquant le géant des télécommunications chinois. Neuf lobbyistes accrédités par Huawei se voient ainsi privés de leur droit d’entrée, selon le registre de transparence du Parlement. La Commission européenne a emboîté le pas en adoptant une mesure similaire.
Cette décision intervient après une série de perquisitions menées jeudi par la justice belge, dans le cadre d’une enquête sur des pratiques suspectes. Vingt-quatre perquisitions ont été effectuées, dont trois au Portugal, et plusieurs interpellations ont eu lieu, y compris en France. Un suspect arrêté sur le territoire français doit comparaître mercredi devant la chambre des extraditions à Paris. Les enquêteurs se concentrent sur des lobbyistes de Huawei et des assistants parlementaires accusés d’avoir influencé des eurodéputés en échange de rémunérations ou d’avantages divers.
Selon le parquet belge, ces pratiques illégales auraient été menées de manière « régulière » et « discrète » depuis 2021, sous couvert d’activités de lobbying. Les soupçons portent sur des rémunérations pour des prises de position politiques, des cadeaux excessifs, des frais de voyage ou encore des invitations à des événements sportifs. Des scellés ont été apposés sur plusieurs bureaux d’assistants parlementaires à Bruxelles et Strasbourg, dont celui lié à un eurodéputé italien du parti Forza Italia. Ce dernier a affirmé coopérer pleinement avec les enquêteurs, tout en niant tout bénéfice personnel.
Huawei, de son côté, a refusé de commenter directement les interdictions d’accès, se contentant de rappeler sa politique de « tolérance zéro » en matière de corruption. L’entreprise avait déjà été pointée du doigt en 2023 par l’Union européenne, qui la considérait comme un risque majeur pour la sécurité des réseaux 5G. Plusieurs pays, dont l’Allemagne, ont annoncé des mesures pour limiter ou exclure ses équipements de leurs infrastructures.
Cette affaire jette une lumière crue sur les pratiques de lobbying au sein des institutions européennes et soulève des questions sur l’intégrité de certains acteurs. Alors que l’enquête se poursuit, les répercussions politiques et économiques pourraient être significatives, notamment pour les relations entre l’UE et la Chine.